C’est dès l’adolescence qu’Agnès Jaoui a été formée au chant lyrique et elle l’a toujours pratiqué avec ses amis d’alors. Aujourd’hui, elle en a fait un réjouissant spectacle en imaginant sur scène son chaleureux salon de musique. Au milieu de la scène trône un divan en velours rouge recouvert de coussins. Un piano droit et une batterie complètent le décor qui pourrait sembler improvisé.
Sont réunis Canto Allegre, le groupe avec qui Agnès Jaoui chante depuis près de 20 ans et Carabanchel, groupe sud-américain créé par le musicien et compositeur argentin Fernando Fiszbein.
La salle est comble, tous ses fans sont là et ils sont nombreux à admirer l’actrice de cinéma (César d’un second rôle dans « On connaît la chanson »). Ils sont curieux de découvrir la chanteuse, vibrante et pleine de vie. Elle les accueille en parlant de ses choix et en introduisant le premier morceau : la cantate « Actus tragicus » de Bach, pour laquelle elle est rejointe par la mezzo-soprano Julia Selge et les ténors Loïk Le Guillou et Nicolas Marie. Tous sont réunis pour chanter avec des incantations viscérales d’un lyrisme exacerbé élevant les esprits dans le public.
De tempos jazz aux solos de clarinette ou de bandonéon, la musique circule sur des rythmes variés, passant de Bach au « Boléro » de Gloria Lasso, sans que le programme ne recherche l’ambition.
Le propos reste profond et léger comme le toucher de la pianiste
Chaque instrument y va de son solo. Les pulsations de la batterie suggèrent une musique de racines et de transcendance.
Les contrastes musicaux ne sont en rien déroutants, l’écoute du public circule volontiers dans cette panoplie de rythmes variés et accepte ces surprises imaginées avec dérision et humour.
Chacun y va de sa partie, et, si Agnès Jaoui prend parfois le dessus en chantant avec une sublime intensité, de bonnes vibrations entre eux les réunissent dans une fusion de jolies surprises.
Avec sa magnifique chevelure de chanteuse lionne, l’actrice ne rugit pas, mais transperce les coeurs de sa mélodieuse voix de soprano.
Le concert ressemble ainsi à certaines soirées où tout est improvisé alors que chacun prouve son propre talent, avec des reprises tous en choeur (et "en coeur" , car les sentiments circulent entre la scène et la salle). Les interprètes donnent au spectacle un caractère énergique et enjoué procurant une tempête d’émotions.
On aime vraiment bien ce spectacle concocté par Agnès Jaoui. Elle offre même une chanson écrite par elle avec des paroles fortement inspirées du poète René Char, dit-elle.
Le programme pourrait paraître ambitieux avec cette quantité de morceaux scéniques en genres variés, mais tout circule de manière décontractée et joyeuse. Oui, le public est en joie et Agnès Jaoui fait de toutes ces rencontres, entre les arts et les artistes, l’occasion d’embraser la salle en invitant même le public à danser, comme les chanteurs ! Et à chanter !
« Pour terminer, annonce-t-elle, une chanson chilienne : « Todo cambia » c à d « Tout change ! ». Mais en fait, toujours avec le même dynamisme, elle entraîne encore le public à entonner avec eux « Toréador » le célèbre air de « Carmen » de Bizet que tout le monde connaît. S’il n’a pas voulu danser, le public chante plus volontiers. C’est sûr, « On connaît la chanson » !
Caroline Boudet-Lefort
