Tout se déroule en vase clos dans un bureau de la Police des Polices. Aucune ouverture et le seul regard sur l’extérieur est un écran d’ordinateur où l’on peut voir des agents de police massacrant un jeune homme qui a aussi été blessé par un tir de Flash-Ball lors d’une manifestation tendue de gilets jaunes.
Bien sûr, l’enquêtrice de l’IGPN (Léa Drucker) n’obtient que des dénégations au cours de ses interrogatoires de policiers : ils refusent de voir ce que les images montrent. Elle s’en trouve troublée.
La stricte objectivité des faits entraîne un aveuglement pour percevoir réellement ce qui s’est déroulé au cours de cette manifestation où l’évidence est niée, malgré les preuves. L’enquêtrice est sidérée de découvrir que la Police entrave la justice pour se protéger elle-même et elle constate comment une démocratie peut ainsi glisser en état policier.
Ce thriller atypique ne raconte pas une dérive, mais la logique d’un système policier, et ce dossier 137 devient pour l’enquêtrice davantage qu’un simple numéro parmi d’autres dossiers.
Ainsi le film est-il captivant pour tout spectateur. Face aux abus de l’institution policière, on peut aussi s’interroger sur la préparation des policiers à se retrouver confrontés sur le terrain à une telle violence.
Léa Drucker est épatante dans ce rôle complexe où elle montre bien le trouble que provoque cette situation à l’enquêtrice qu’elle incarne avec une grande justesse, ce qui donne une résonnance politique au film. La tension est constante : il faut protéger la façade pour éviter le scandale.
Les films de Dominik Moll ne laissent jamais indifférent, le spectateur reste toujours sous tension.
Dans « Dossier 137 », il lui donne à voir les manipulations de la Police pour se préserver en cas de bavure.
L’enquêtrice de l’IGPN ressent un grand désarroi face aux victimes des violences policières mutilées à vie et pour lesquelles elle ne doit rien laisser transparaitre. Ainsi se trouve-t-elle déchirée entre le sens de sa mission et la violence du système qui écrase tout le monde : les policiers tout autant que les manifestants.
Caroline Boudet-Lefort
