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ARDOISE LITTERAIRE : Une Etude en rouge, Arthur Conan Doyle - Par Jean-Jacques Ninon pour Art Côte d’Azur

Une Etude en rouge, Arthur Conan Doyle, 1887


A cette époque, tout médecin pratique les accouchements. Ce qui est le cas du docteur Arthur Conan Doyle (1859-1930) lorsqu’il signe, en 1887, Une Etude en rouge, acte de naissance de frères siamois : l’un qui deviendra le plus célèbre détective de tous les temps ; l’autre qui sera le greffier scrupuleux de ses enquêtes. Sherlock Holmes et John Henry Watson.

Tous deux embrassent peu ou prou la noble profession de leur géniteur. Le policier amateur est le clone de Joseph Bell, un professeur de la faculté de médecine dont l’écrivain fut l’étudiant. Watson, lui, est un médecin militaire. Réformé à la suite d’une mauvaise blessure à l’épaule écopée en Afghanistan, il a été rapatrié sur les bords de la Tamise. Il y vivote d’une maigre pension. Sherlock sera sa bouée de sauvetage. Financière : ils partagent le même appartement ; psychologique : les aventures de son colocataire le réintègrent socialement. Personnage secondaire, faire-valoir, il apparaît pourtant indispensable, ne serait-ce que par l’humanité qu’il insuffle à son compagnon désincarné, figé. C’est le Haddock de Tintin. Un marin sauvé des eaux par un autre limier. A croire que les surhommes ont besoin d’un grouillot à l’âme sensible.

Le roman policier Une Etude en rouge s’ouvre d’ailleurs sur le curriculum vitae du scribe Watson, présenté par lui-même. Puis vient l’intrigue, où la découverte d’un cadavre oblige Scotland Yard à recourir – ce qui est un comble – à un « privé », dont les méthodes vont révolutionner la recherche du coupable. Apparences trompeuses, remises en question au profit d’une méticuleuse observation et d’une déduction discursive et logique. Un discours de la méthode qui se révélera un code pour ses futurs collègues. Le processus fera recette – notamment auprès d’Hercule Poirot et de Miss Marple – : meurtre (avec ou sans corps), indices dérisoires (heureusement que Holmes possède une loupe), investigation dialectique, réunion de famille des suspects. Morceau de bravoure s’il en est, consistant en une longue élimination sélective et fastidieuse des coupables putatifs, lors de laquelle même eux s’endorment. Mais au bout du tunnel, la lumière jaillit. Et réveille enfin l’auditoire. C’est, au Royaume-Uni le triomphe du Siècle des Lumières et de la rationalité, deux cents ans plus tard. Via le crime et malgré l’héroïne à laquelle est accroché le héros. L’Encyclopédie réduite à un code.

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J-J Ninon expose en permanence à la Galerie Ferrero à Nice

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