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CHRONIQUE 9 : Qui a parlé en premier de l’Ecole de Nice ? - Chronique Bimensuelle sur l’Ecole de Nice - par André Giordan et Alain Biancheri

Résumé des chroniques précédentes

Pour un ensemble d’artistes à Nice, l’art devient dans les années 60 un catalyseur, un antidote aux industries de la conscience, un moyen de résistance aux impositions culturelles. Ils vont jouer sur les décalages et les recadrages de la vie quotidienne et routinière pour en révéler les ressorts ; et par là faire émerger à la conscience la possibilité de se réapproprier sa propre vie. Tout était alors pour eux : jeu, joie, façon d’exister loin du monde et des marchés de l’Art…

Le monde de l’Art a besoin de mythes et de légendes, quitte à reconstruire l’histoire ou à noyer le poisson !.. Ils étaient fort peu nombreux dans les années 60, et même 70, à s’intéresser à ces jeunes artistes qui constitueront l’Ecole de Nice. Très rares furent les collectionneurs ou les galeristes qui eurent l’insight de l’Histoire . Ce ne furent pas non plus les critiques d’Art qui jouèrent le jeu de son émergence ! Bien au contraire… Le plus célèbre d’entre eux, Pierre Restany fut des plus critiques, protégeant seulement ses « poulains » –Klein, Arman, Raysse et César- pour faire exister le mouvement qu’il porta à bout de bras, le Nouveau réalisme.
Les artistes durent faire le tam-tam par eux-mêmes, et dans cet emploi certains furent plus « moteur » que d’autres. Ben fut de ceux qui se dépensèrent le plus, avec Sosno –qui n’était pas encore le sculpteur qu’il est devenu- et Alocco. Par la suite, Jean Mas prit le relai. En fait les premiers qui parlèrent de cette Ecole furent des journalistes. Pendant l’été 1960, on trouve dans Combat, un journal aujourd’hui disparu, un premier article sous la plume de Claude Rivière.

Y-a-t-il une école de Nice ?

Nous pourrions le croire, car très nombreux sont les peintres demeurant à Nice. Arman, Yves Klein, Martial Raysse, Laubiès, Jean-Pierre Mirouze, Sacha Sosnovsky et tant d’autres encore. Ils sont plein d’ardeur et d’audace. Laubiès travaille continuellement, ne prenant que peu de temps pour se baigner et il nous découvre de magistrales toiles.
Sa palette s’enrichit de tons orangés et jaune assourdi. Il arrive ainsi à égayer ses visions et les intensifie de toute la chaleur et de la lumière du Soleil. Ce ne sont plus des mondes disparus mais il suggère ainsi une vie extraordinaire triomphante de tous les temporels.

Raysse, poète et artiste, présente des élytres transparentes et veinées. Libellules de nos rêves, transmutations ou métamorphoses, nous assistons à l’éclosion d’une vie végétale non seulement pleine de poésie, mais encore entachée de l’intensité expressive de nos rêves et içi nous comprenons mieux encore les pertinentes explications de Bachelard. Des sculptures aussi sont là. Sculptures colorées et qui,faîtes d’objets plastiques, amènent à une reconsidération de la sculpture elle-même tant elles nous font repenser à ces statues grecques peintes et les espaces mieux soulignés grandissent et s’affirment davantage. Ce sont également des sortes de monnaies-du-pape, en métal, légères et presque diaphanes ; ce sont des boîtes qui s’encastrent les unes dans les autres, des ressorts et roues engainés, toute une chimie qui nous rapproche d’une physique nucléaire et qui surtout se métamorphosent comme Alice au pays des Merveilles.
Ce jeune peintre, modeste et silencieux, remonte parfois à Paris et nous espérons que nos lecteurs pourront enfin le découvrir.

Les grands dans de petits villages fatigués...

Vence doit beaucoup à Dubuffet car c’est à lui que nous devons l’impeccable tenue de la Galerie Les Mages de Chave. Bien entendu, nous savons que Chagall et Carzou demeurent également dans Vence, mais ils sont moins actifs.
A la Galerie Chave, nous découvrons Eppelé, Bellmer, Kopac, Dallaire et quelques autres. Gabritchevsky, biologiste russe devenu fou, ne trouve de repos que dans la peinture, Ozenda s’apaise avec quelques toiles semi naïves. Pons refait vivre les visions de Goya. Et ce sont des amis de Paris : Dado, César qui, dans son hommage à Brancusi magnifie son aîné tout en affirmant sa propre originalité. Appel et Jorn n’ont plus cette même violence et à la lumière de Provence, il y a comme une évanescence.
André Verdet n’est pas à Saint-Paul et c’est dommage car sans nul doute il organiserait des expositions locales qui ne seraient pas dans cette appartenance
d’artisanat un peu déformé par un léger snobisme. Au Haut de Cagnes, Yves Klein est éblouissant et ses empreintes polychromes de corps nus, prennent
allure envoûtante. Mais l’artiste se repose devant le Château, d’homériques courses de cafards (n’est-ce pas le meilleur moyen de le tuer ?) ont conquis toute la population. Un musée Renoir vient de s’ouvrir dans l’ancienne maison du maître à Cagnes- même.

Quelques rencontres

De Nice à Villefranche, trés peu de distance.
Cela nous est donc facile d’admirer la Chapelle de Cocteau qui cerne autour de vigoureuses figures quelques points qui arrivent en sortes de centres nerveux, offertoires mystiques d’adoration et de prières.
Ces cellules nerveuses sont là affirmant dendrites et neurones et ainsi Jean Cocteau s’exorcise de magies mystérieuses propres à sa poétiques. Bien entendu, la Côte est surpeuplée et c’est avec joie que nous retrouvons Maître Kam, passionné de peinture et qui, au cours de courtes vacances, s’imprègne de cet art dont il ne peut se passer.
C’est le professeur Brimo, rencontré souvent à Auvers-sur- Oise et qui, à Beaulieu, parcourt les cimaises d’une nouvelle galerie. Jean Cocteau se repose au Cap Ferrat à Santo Sospir et il se repose en travaillant avec acharnement bien entendu. Y a-t-il
une école de Nice ? Pourquoi pas après tout. Mais nous sommes contents de voir naître une décentralisation et , tant pis pour Paris car il est quasi impossible d’y rêver et c’est pourquoi l’artiste, en ce temps d’éblouissements de lumière, s’en vient en Provence afin de redécouvrir sa poésie intérieure et sa liberté. Nous pouvons penser avec Raysse : Une allégresse de vignes au penchant du ciel, ciel de briques rouges de méduses bleues...Ici, nous ne sommes plus mallarméens car j’ai lu tous ses livres...mais la chair n’est pas triste et il n’y a plus d’hélas.

- Claude Rivière
- Extrait de la Charge Solaire de l’Artiste,
in Combat du lundi 22 août1960

Sans doute s’agissait-il d’un « marronnier » publié en plein été sur Nice et les… vacances ? De quoi occuper les vacanciers ! En tout cas la question est posée : « Y a-t-il une école de Nice ? »

La presse française et internationale ne s’empare pas immédiatement du sujet. Seules des revues spécialisées parlent de « l’Ecole de Nice ».
Pas de mystère, elles sont produites par des artistes ou futurs artistes de… l’Ecole de Nice. La toute première à l’avoir présenté s’appelait Sud-communication. En juin 1961, un article se veut une « théorie » de l’Ecole : « L’ECOLE NIÇOISE veut nous apprendre la beauté du quotidien. FAIRE DU CONSOMMATEUR UN PRODUCTEUR D’ART. » Il est signé Alexandre Sosnowsky qui se fera appeler plus tard Sosno .

Chubac, Sans titre, Mamac (photo Séverine Giordan)

C’est en 1959 qu’Arman accomplit son grand geste en S’APPROPRIANT LES POUBELLES. Depuis longtemps, ce peintre avait été fasciné par les déchets, les ordures, les papiers gras, les objets abandonnés, déjà utilisés par des artistes comme Kurt Schwitters, Duchamp, Arp, Picabia, mais dans un esprit tout à fait différent. Arman n’utilise plus ces objets d’une manière littéraire et analogique, mais bien pour ce qu’ils sont en soi, en les mettant EN VRAC dans des cuves de verre (Exposition de Dûsseldorlf en 1960). Il s’aperçut aussi du pouvoir étrange de L’ACCUMULATION d’un même objet dans une cuve. Et il émit alors le postulat suivant : "Mille ressorts de montres sont plus ressort de montre qu’UN ressort de montre". Maintenant ses œuvres se vendent aux alentours du demi-million d’anciens francs.

Martial Raysse lui, a été, après de solides études secondaires, étudiant en lettres et aussi champion d’athlétisme. Il abandonna la littérature pour la peinture et en quelques années il arriva à être un des meilleurs peintres abstraits sur la Côte d’Azur et ses œuvres commençaient à avoir une excellente cote quand il remit toute sa carrière en question, fasciné par la beauté brute du plastique, beauté existant tout naturellement DANS LES OBJETS LES PLUS USUELS. Les grands magasins à prix uniques devinrent son royaume. Un quart d’heure avant l’ouverture de son exposition à Milan (1961), toutes ses œuvres en plastique étaient vendues à des collectionneurs. Il confirma ainsi pour sa part LA THEORIE DE L’ECOLE DE NICE SUIVANT LAQUELLE LA VIE EST PLUS BELLE QUE TOUT.

A notre époque, des Niçois comme Jefe et surtout Ben se livrent à des travaux d’une grande importance théorique, particulièrement Ben avec ses Écrits où il renouvelle, en les trempant dans le réel, les procédés de peinture lettriste.

L’ECOLE NIÇOISE veut nous apprendre la beauté du quotidien. FAIRE DU CONSOMMATEUR UN PRODUCTEUR D’ART. Une fois qu’un être s’est intégré dans cette vision, il est très riche, pour toujours. Ces artistes veulent s’approprier le monde pour vous le donner. A vous de les accueillir ou de les rejeter.

- Sacha Sonovsky
- In Sud-Communications n°108 bis, 1961

Ce n’est que deux ans après que la presse emboîte le pas avec des articles dans le Monde, L’Express et toujours Combat avec de nouveaux textes de Claude Rivière.

- Spécial Midi : L’Ecole de Nice

"Il faut détruire les oiseaux jusqu’au dernier. Le garçon qui parle a dix-huit ans. Il est allongé sur la plage entre un peintre et un poète. A trois, ils jouent à se partager le monde.
Celui qui entraîne aux rêves se nomme Yves Klein. Grâce à lui, Nice deviendra un de ces lieux privilégiés de l’esprit à l’instar de Nantes, pôle magnétique du surréalisme depuis la rencontre d’André Breton et de Jacques Vaché.
Rien pourtant ne préparait le chef-lieu des Alpes-Maritimes à un tel destin. Entre la mer et le soleil, on y vit au rythme de 1900 : le legs Dufy - des centaines d’oeuvres - dort dans des caisses depuis des années. Faute d’un domicile digne de lui, disent les uns. Jugés trop audacieux disent les autres. Sans contact avec Paris, quatre artistes s’y sont révélés : Yves Klein, Le Clézio, Arman, Martial Raysse. Maintenant, ce sont des vedettes internationales.
Certains partagent leur temps entre New York et la Côte d’Azur. Ils ont lancé l’Ecole de Nice.
A la mort de Klein, ce fut Arman, son compagnon d’enfance, qui prit sa succession à la tête de l’Ecole de Nice. Champion de judo et de pêche sous marine, c’est lui qui encourage, donne des conseils, organise des expositions. Au temps des vaches maigres, c’est chez lui que s’élaborait la stratégie à suivre lors de la visite d’un marchand, d’un collectionneur ou d’un critique.

Benjamin Vautier, dit Ben, admirateur de Duchamp et de Klein, fut l’intermédiaire. C’est le personnage le plus pittoresque de Nice. Il possède un magasin de disques d’occasion transformé en caverne d’Ali-Baba Pop’Art. Poète engagé dans de multiples activités, il hésite entre la peinture, le théâtre et l’acte gratuit. Ayant décidé que l’oeuvre d’art ne réside que dans l’intention, c’est finalement de sa vie qu’il fait une oeuvre d’art.

SUR LA COQUILLE. Parmi de multiples activités, il édite une revue : Tout monte des happenings, distribue des tracts qui annoncent : Je signe les élections législatives, je signe les remises de décorations. Les escargots vivants signés Ben sur la coquille sont vendus avec brochure d’élevage. Un jour, comme il avait annoncé qu’il authentifiait n’importe quoi comme faisant partie du Tout. il eut des ennuis avec le syndicat des experts qui lui déniait le droit de délivrer des certificats d’authentification. Ses idées de pièces de théâtre se résument à une situation dont le public fait souvent les frais : Une actrice fait du strip-tease. On fait évacuer la salle par la police des moeurs ; Annoncer un vol et fouiller systématiquement les spectateurs : Découvrir un resquilleur qu’on fera expulser ; L’auteur annoncera que la pièce est trop mauvaise, qu’il a honte qu’il refuse de la laisser jouer. C’est par Ben que le Clézio a eu connaissance de John Cage, de Duchamp et des happeners américains du groupe Fluxus ; George Brecht, La Monte Young, Ray Johnson, Dick Higgins, Bob Patterson, ces promoteurs d’une nouvelle sensibilité suscitée par une infirme variation de perspective.

Les vocations de peintres s’éveillent dans le sillage d’Arman et de Raysse. Parmi les plus jeunes, il y a Gilli, qui a pu réaliser ses projets le jour où Arman lui a donné sa scie électrique. Il fait des montages en contre-plaqué, sorte de boîtes de souvenirs aux couleurs industrielles. Venet Bernar, qui a fait son service militaire avec Martial Raysse, assemble les plaques de carton qu’il peint au pistolet. Ses grandes surfaces géométriques marquent un retour à l’abstraction. Gilli et Venet Bernar seront tous deux à la Biennale de Paris en septembre prochain. Ils représenteront la Nouvelle Ecole de Nice."

- Otto Hahn
- L’Express du 2 au 8 août 1965

Ce n’est que beaucoup plus tard en 1968 que le presse locale abordera le sujet. Le Patriote, journal communiste alors très influent devança Nice-Matin.

- L’Ecole de Nice à Vence :
Un show explosif

" Comment peut-on considérer l’Ecole de Nice, le manifeste de Ben n’en est qu’un des multiples aspects, aussi individualiste et gratuit vis-à-vis de l’ensemble que peuvent l’être les tableaux objets ou gadgets proposés. Il serait vain d’y rechercher une tendance artistique déterminée, une éthique ou un esthétique aux points communes, justifiant le titre d’Ecole, adopté d’ailleurs par ses membres avec un grand point d’interrogation. Sans que ma définition satisfasse, j’en suis persuadé, ses promoteurs, je crois que l’on pourrait établir les fondements de l’Ecole de Nice sur deux principes : d’une part l’irrespect systématique et voulu de toute tradition ancienne ou récente en fait d’art ou de philosophie et, d’autre part, l’attribution à l’objet ou à l’élément de qualités intrinsèques ou extrinsèques exploitables".

- Michel Gaudet, Le Patriote
- Nice, 1968

Suite à la prochaine chronique  !

Chronique 1
Chronique 2
Chronique 3
Chronique 4
Chronique 5
Chronique 6
Chronique 7
Chronique 8
Chronique 9
Chronique 10
Chronique 11
Chronique 12
Chronique 13

Interprétation d’une oeuvre

VENET Bernar 1941-

Démarche Evolution

Figure marginale de l’Ecole de Nice, Bernar Venet n’a participé à aucun des mouvements spécifiques mais a plutôt constitué l’axe conceptuel des artistes ayant travaillé à Nice.
Né en 1941, il matérialise le concept de la forme lorsqu’il habite à Nice : l’étalement de tas de Goudron ou le déploiement de Cartons qu’il enduit de couleurs monochromes constituent des sculptures livrées à elles-mêmes ; lorsque Bernar Venet s’installe rue Pairolière, dans le vieux-Nice, il crée les Cartons Peints et réalise une première exposition à la galerie Matarasso.
Le concept de la forme laisse place à celui de la ligne lorsqu’il découvre les plans et le dessin industriel. Des équations mathématiques vont faire l’objet de tableaux qui présentent une accumulation de signes. Venet veut conserver le signifiant pour animer une surface : le tableau est un concept, matérialisé par des éléments graphiques dépouillés de leur sens et qui mettent à jour plastiquement la pensée mathématique. Venet s’installe à New York dès 1968 ; l’arc, l’angle, et la diagonale, isolés de leur contexte, deviennent des réalisations sculpturales qui occupent l’espace sous la forme d’installations souvent gigantesques. Dès les années 80, les lignes indéterminées vont aussi se matérialiser sous la forme de sculptures de très grandes tailles en acier brut dans différentes parties du monde : elles mettent en évidence la dichotomie intérieur/extérieur et la matérialisation du geste aléatoire. Le contraste entre la fragilité du signe et la robustesse du matériau crée une distorsion visuelle et s’oppose à la sculpture traditionnelle. Beaucoup d’installations vont occuper le sol niçois, comme le Jardin Albert Premier ou cette année la Promenade des Anglais.

« Relief carton » 1965 Peinture industrielle sur carton ondulé
122 x 102 cm coll. du MAMAC (photo Séverine Giordan)

Description/Interprétation

Ce grand carton plié se perçoit dans une lecture immédiate ; aucune ambiguïté sur l’origine de cet objet fermé et recouvert de peinture monochrome.
Mais alors, quel peut-être son sens ou sa destination ? Un emballage quelconque, ou une protection utilitaire dont la fonction a maintenant disparu… Cependant, les pliages du carton, les pans rabattus, les cloutages laissent imaginer certaines notions par rapport au caché, au non dit, et cet effet de fermeture étanche rebute l’approche du spectateur – mais lui permet aussi d’imaginer quelle manipulation pourrait révéler son mystère. Nous ne sommes pas non plus face à un ready made, puisque le carton a été transformé, et il devient une véritable œuvre d’art.

Morphologie

Le format déjà, n’est pas innocent ; la forme globale rectangulaire est reprise en écho par d’autres rectangles plus allongés, qui semblent subdiviser la totalité de la surface en portions presque identiques : de haut en bas se présente un premier pan horizontal, suivi d’un autre plus étroit constitué de bandes verticales irrégulières dont les séparatrices sont signifiées par les pliures ou les rajouts. La mise en abîme de ces rectangles s’apparente aux proportions idéales du nombre d’or, répétées dans des rapports d’orthogonalité constants.
Le polygone d’enveloppe subit un certain nombre de décalages ; cette ligne accidentée, rectiligne ou incurvée, participe au graphisme général de l’œuvre : les points formés par les trous ou les clous, les lignes discontinues ou interrompues des cassures sont autant d’éléments plastiques et d’ animations de surface qui s’opposent aux plages de repos de la zone médiane ; quelques pliures obliques dans la partie gauche viennent contredire l’orthogonalité générale pour ajouter une note discordante. L’ascétisme des lignes prouve la quête d’une épuration formelle.

Chromatisme

Violence ou agression ? Le rouge s’impose dans toute sa splendeur… Mais si le vermillon recouvre la totalité de l’œuvre, l’éclairage et les aléas du bombage font alterner des nuances chaudes et froides, distribuées selon le jeu des plis ou des trous. La peinture passée à la bombe ou au pistolet trahit la volonté de distanciation par rapport à l’acte pictural, mais les accidents et manipulations sont autant de gestes artistiques qui donnent vie au matériau inerte ; Bernar Venet refuse d’éliminer toute trace de subjectivité. Les références immédiates aux œuvres monochromes du passé (Malevitch, Klein) sont vues à travers les modifications du support.
Le titre explicite laconiquement l’origine du support, mais la matière devient un élément prépondérant dans la lecture de l’œuvre : les éraflures, les sillons ou les ondulations magnifient les textures comme dans certaines recherches d’artistes matiéristes. Les déchirures ou les restes de collage au scotch participent à la matérialité d’ensemble en l’animant. Les faibles reliefs produits par les protubérances infimes font lire l’œuvre comme une surface traitée en aplats avec des effets de matière, face au spectateur.

Les Chroniques précédentes :

Chronique 1
l’école de Nice

Chronique 2
école de Nice2

Chronique 3.
école de Nice comment tout a commencé

Chronique 4.
école de Nice, des lieux des rencontres

Chronique 5.
école de Nice un passé culturel incomparable trop méconnu

Chronique 6.
les apports de l’école de Nice

Chronique 7.
Qu’ont-ils voulu dire sur l’art, à partir de l’art ?

Pour en savoir plus
Alain Biancheri, André Giordan et Rébecca François (2007), L’école de Nice ; Collection Giordan-Biancheri, Ovadia Editeur, Nice.

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