À travers Bella Figura (1995), Ji ?í Kylián nous invite à réfléchir sur les sources de la beauté et de la sensualité dans notre quotidien. Dans quels recoins de notre réalité se cache la beauté ? Est-elle toujours là où on l’attend ? Dans cette chorégraphie, l’artiste nous pousse à élargir notre champ de vision et à aller chercher l’émotion esthétique au-delà de nos habitudes : dans une grimace, dans un corps qui se contorsionne, voire dans la vulnérabilité du danseur qui, confronté aux difficultés de la pièce qu’il interprète, doit toujours faire « bella figura » (bonne figure).
Pour Ji ?í Kylián, il en va de même pour tout un chacun. Chaque individu doit faire face à un réel qui lui apporte son lot quotidien de déceptions et dont il doit s’accommoder. Mais n’est-ce pas précisément à travers cet effort, que nous effectuons nous aussi pour faire bonne figure et surmonter ce réel, que nous démontrons de la manière la plus éclatante notre capacité à créer du beau ? L’individu confronté à la réalité et ses tentatives pour se l’approprier ou en contourner les difficultés est l’un des thèmes majeurs des pièces de Ji ?í Kylián..
Gods and Dogs (2008) explore cette même piste à travers une réflexion sur notre manière de nous habiller et sur les motivations sous-jacentes qui nous incitent à nous vêtir avec tel vêtement plutôt que tel autre. Toute notre vie, nous portons des habits comme des masques et nous en changeons selon les circonstances et selon la manière dont on nous juge. Là encore, on sent bien toute la fascination de Ji ?í Kylián pour ce qui touche au comportement de l’individu évoluant dans une société aux catégories poreuses et essayant tant bien que mal de trouver sa place.
Ces réflexions ne doivent pas pour autant être synonymes d’œuvres sombres et dramatiques. Bien au contraire, chez Ji ?í Kylián, la légèreté a toute sa place. La folie n’est jamais bien loin. Elle est une soupape qui nous autorise à ne pas prendre les choses graves trop au sérieux. Le répertoire du chorégraphe regorge de situations colorées et surprenantes, à l’image de Chapeau, créé en 2005 pour le vingt-cinquième anniversaire du jubilé de Sa Majesté la Reine Beatrix.