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Chapitre 55 (part V) : Dernières nouvelles du Mouvement MADI

Suite et fin de la chronique de France Delville...

Suite de « Pedro Subjectivo » de Carmelo Arden Quin

C’est là que finit le texte que Carmelo Arden Quin a montré au philosophe, mais il poursuit, dit-il, ainsi :
L’incertitude des temps que nous vivons. L’absence de forme de l’eau. La santé de la logique. L’incapacité de l’homme à créer des éléments. Le mérite de l’art en général. L’innocence de la femme comparée à l’homme. La dignité de l’assassin du roi. Les entraves qui nous empêchent d’avancer. Les arrière-goûts des peurs qui subsistent après le drame. Cette maladie qu’est le sommeil. L’aspect tranquille de la pampa. Le remède à la douleur. Les fiançailles. La nuit de l’enchantement. L’événement horrible. Le deuil pourpre. La perte des biens. L’oubli. L’ombre et la lumière. La splendeur de la maison d’en face. La terrasse de l’homme. Le roman des étoiles. La citerne rouge. Le chariot qui arrive seul avec le mort, les chevaux comme perdus sur le chemin. Enfance. Visage hébété. Pierre est mort. Masoller. 1918. J’avais cinq ans.

Jean Branchet : « Khamon 3 » (2007)
DR

Il a plu. La pampa couverte de flaques. La cour de la ferme noyée. A l’horizon un cavalier qui passe. La lune naît.
1) Rien de fictif. Je l’ai vécu.
2) Eux seulement. Les excellents.
3) Semblent une légende. Légende.
4) Il me faut la connaissance du mensonge
5) Je suppose que c’est le mythe essentiel de l’éternité
6) Seul le respect avec lequel on agit est capable de faire naître le consentement normal et faire que la coutume éthique s’implante et perdure
7) L’alternative n’a pas de mesure exacte. Elle ne fait pas attention à la tenue.
8) Il n’y a pas d’interprétation des séries
9) Il y a des façons d’agir, il y a un labyrinthe dans le bois
10) Il y a dans le bois des endroits isolés pour le repos du corps
11) Il y a un risque à vouloir se donner pour vaincu
12) Il faut faire attention et agir si possible concentré
13) Subjective ne prend pas parti. Il n’argumente pas. Il ne prend pas position. Il n’est pas intéressé.
14) Contribue-t-il à interpréter ce que nous appelons lutte pour l’expérience ?
15) Le hasard est simple et le danger passager
16) Ceci et les autres choses qui se réfèrent à l’éternel
17) Il n’y a hélas pas d’intégration pour les faibles
18) Rien ne remplace la tendresse
19) Lutter pour rien est liberté de conscience
20) Refuser le pouvoir en proclamant que tout existe et que rien n’est
20) Dispositions de la colère, ça oui

Carmelo Arden Quin avec Alexandre de la Salle, Alberte Garibbo, Bolivar et Alain Clavier en train de regarder à la télévision la Coupe du Monde de Football en 1986

Je n’avais pas besoin de Schilds pour continuer (c’est un personnage). Il apparut et je l’intégrais aussitôt dans le texte. Je le fis de taille moyenne. Blond, visage pâle. Pommettes saillantes. Yeux gris, cheveux crépus et nez prononcé. Bouche petite. Moustache soignée. Sourcils épais. Les habitants d’Almagro (c’était un quartier où j’habitais à Buenos Aires) le connaissent et viennent aussi dans le texte avec moi. Ils m’aident à le créer. Je fais connaître Schilds à Subjective. Schilds émet à longueur de temps des doutes sur les choses. Si on lui demande des exemples il n’en donne pas. Il se fait prier si on l’interroge sur les circonstances qui l’ont amené à se manifester. Il demande qu’on lui explique la demande plus en détail. Il semble ignorer absolument la rencontre. Il a l’habitude de donner des conseils.

Philippe Vacher : « Sans titre » (2007)
DR

a) S’il n’y a pas d’ironie dans le propos pourquoi l’énigme ?
b) Le consentement doit se faire familier
c) L’habitude a-t-elle changé de place ?
ch) En admettant qu’il y ait une mesure parfaite, faut-il faire confiance et ajouter l’élégance à sa façon d’être ?
d) Puisqu’il n’y a pas d’inconvénient à l’appliquer, la supposition peut être acceptée sans risque majeur
e) Feindre peut être une attitude uniquement de défense, et non comme le soutient une certaine école psychologique, désir inconscient d’agressivité (ça c’était une pointe que je lançais à Pichon-Rivière pour provoquer un débat, une polémique)
f) Nous pensons que nous servons des causes logiques
g) Bien sûr que le doute existe
h) Subjective donne plus de valeur au silence qu’à la description explicite du récit
i) Les causes se réduisent parfois à un seul terme immédiat
j) L’agression, la destruction et autres attaques, bien que fâcheuses, sont tolérables si elles surviennent dans le rêve
k) Uniquement le suivant peut advenir
l) Se prononcer dans la gloire solaire du jour
ll) C’est faire grand préjudice à la santé du corps de seulement penser à quitter cette planète
m) Nous savons tous que notre ignorance est grande, et le désir se répète sans trêve, et les pierres fines ne sont pas précieuses

Renato Milo : « Sans titre » (2009)

Cantique à Spinoza

Le texte en était là lorsqu’est arrivé cet ami avec l’Ethique de Spinoza. Alors j’ai ajouté un Cantique à Spinoza :
« Il m’est impossible de penser si mon esprit ne s’associe pas à l’ombre lumineuse de l’objet ; je dis ombre de lumière, voulant signifier image, et sa source irradiante, l’objet de beauté. L’image reçue est distincte de ce qu’elle reflète (c’est une parodie de ce que dit Spinoza) ; la sphère est une chose (lui il dit le cercle est une chose) et l’image de la sphère une autre. L’image de la sphère n’est pas un objet avec un intérieur et une périphérie inhérents à l’objet lui, même, la sphère, comme l’image de tout autre corps, n’est pas le corps lui-même. Etant quelque chose de distinct de ce dont elle est l’image, elle sera aussi en elle-même quelque chose de compréhensible, c’est-à-dire que l’image, étant d’essence formelle, peut être objet d’une autre essence objective, et par là cette autre essence objective, considérée en elle-même, sera quelque chose de réel et de connaissable, et ainsi indéfiniment.

Mirella Forlivesi : « Rosono cometa » (1995)
DR

Pierre, par exemple, (ça c’est 100% Spinoza) est un objet réel (c’est Spinoza 100%) ; l’image que je me forme de Pierre est l’essence objective de Pierre, qui, en elle-même, est aussi quelque chose de réel, mais distincte de Pierre lui-même. Parce que l’image que je me fais de Pierre est quelque chose de réel, cette image sera aussi l’objet d’une autre image contenant objectivement en elle tout ce que l’image de Pierre contient, formellement, et, à son tour, cette image qui aura pour objet l’image de Pierre, aura aussi son essence, qui pourra à son tour être l’objet d’une nouvelle idée, et ainsi de suite jusqu’à l’infini.

Vincenzo Mascia : « Noir et blanc n°2 » (2007)

Chacun pourra expérimenter en voyant, en sachant qui est Pierre, ce que lui aussi sait ; et encore celui qui sait qu’il sait qu’il sait, et ainsi du reste. On peut alors constater que pour connaître l’essence de Pierre, et je reviens à l’essence de Pierre subjective, le mien, et encore moins connaître l’image de l’image de Pierre. Ce qui veut dire que je n’ai pas besoin de savoir de savoir que je sais. Et encore moins de savoir que je sais que je sais. De même que pour connaître l’essence du cône, il n’est pas besoin de connaître celle de la sphère. Le contraire se donne dans ces concepts-ci ; pour savoir que je sais, il est nécessaire que je sache auparavant ; il s’ensuit évidemment que la réalité n’est en rien extérieure à l’essence objective elle-même, c’est-à-dire que la manière de sentir l’essence objective de Pierre est la réalité même ».

Pour relire la première partie de cette chronique.

Pour relire la deuxième partie de cette chronique.

Pour relire la troisième partie de cette chronique.

Pour relire la quatrième partie de cette chronique.

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