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Didier Van Cauwelaert

Evénements liés à l'artiste

Didier VAN CAUWELAERT à Nice pour (...)

L’invité de ce mois de janvier est Didier van Cauwelaert qui présentera son dernier ouvrage Au-delà de l’impossible, paru aux éditions Plon. Et si nous avions la preuve que la conscience, après la mort, continue à transmettre des sentiments et de l’information ? Et si cette preuve nous était apportée par deux des plus grands génies de la science, (...)

Fin : Janvier 2017 Voir l'événement

De romans en pièces de théâtres, de spectacles musicaux à la réalisation de films, l’écrivain questionne le monde à travers ses personnages dans la richesse et la diversité de son oeuvre. On le croise, on échange facilement et l’on repart avec un sourire qui en dit long sur sa passion de l’écriture, de l’imaginaire et du partage…

© Denis Félix

Didier van Cauwelaert. Etre écrivain comme vous l’êtes, c’est un métier ? une passion ? une vocation ?

- Didier Van Cauwelaert : C’est une vocation qui est devenue un métier, sans cesser d’être une passion.


On vous attribue très souvent une réussite rapide et pourtant, vous avez eu à surmonter de bien nombreux obstacles, et cela depuis tout jeune. Comment s’est déroulé ce véritable parcours du combattant ?

- Didier Van Cauwelaert : La grande chance, c’est de savoir très tôt ce pour quoi l’on est fait, ce qu’on est prêt à risquer, à sacrifier… Le reste est une affaire de travail, de circonstances, de rencontres, d’obstination. Il faut trouver son chemin sans se perdre en route.

Il faut avouer une certaine dose d’obstination pour avoir gardé le cap toute ces années dans un milieu où les places sont chères. Où avez-vous puisé ce courage à toute épreuve ? En quoi vous êtes-vous accroché pour parvenir à votre but ?

- Didier Van Cauwelaert : On s’accroche au rêve, aux encouragements, à la fierté de prendre des risques au nom d’une passion… Et puis je n‘avais pas de position de repli, pas de « métier de secours ». Je n’en voulais pas, dans une sorte de prudence paradoxale. Les acrobates, quand ils n’ont pas de filet, savent qu’ils n’ont pas le droit de tomber.


Vous êtes installé actuellement près de Paris, dans un coin de campagne, mais vous êtes natif de Nice. La Côte d’Azur ne vous manque t-elle pas ?

- Didier Van Cauwelaert : Montherlant disait : « Un foyer n’est pas un lieu où l’on séjourne, mais un lieu où l’on revient. » Quand la Côte d’Azur, ma famille et mes amis me manquent, je reviens. Mais je travaille mieux dans la forêt, le silence, le froid.

Paris, Nice ou ailleurs. Quelles sont les conditions qui vous permettent de trouver l’inspiration et vous amène à vous plonger dans de nouveaux projets d’écriture ?

- Didier Van Cauwelaert : Ça ne se dit pas, mais, par rapport à l’inspiration, je suis souvent en état de résistance. Le travail de l’imaginaire est comme un entraînement de sportif : plus j’écris, plus de choses demandent à être écrites. Pour me lancer dans un nouveau projet, il faut que je ne puisse pas faire autrement. Quand la pression intérieure est trop forte, quand le projet demande à « sortir », je cède. Le problème n’est pas de trouver l’idée, mais le temps et l’énergie nécessaires à sa mise en forme.

À travers tous les livres que vous avez écrit, le lecteur même novice, peut ressentir une « patte » Van Cauwelaert. Selon vous, serait-ce l’évocation du paranormal que l’on retrouve dans la plupart de vos écrits ? Ou une stylistique particulière qui en est la raison ?

- Didier Van Cauwelaert : J’essaie d’aborder les thèmes les plus complexes de la manière la plus simple. C’est pourquoi mes narrateurs sont souvent des gens ordinaires à qui il arrive des choses extraordinaires, qui leur permettent de repousser leurs limites en découvrant qui ils sont vraiment. Le facteur déclenchant peut être l’amour, l’amitié, la manipulation « révélatrice », les mystères de l’identité… Lorsque j’aborde les phénomènes inexpliqués, c’est leur conséquence qui m’importe bien plus que leur nature. Et l’humour qu’ils génèrent par la perturbation. Un critique a dit que j’étais un « hyper-réaliste du surnaturel ». J’ajouterai : « Et inversement. » Mais le plus important pour moi, c’est le style, pas le genre. Le style, c’est à la fois un regard, une musique, et un travail d’artisan où l’on ne doit pas sentir l’effort.


Quelles sont les références littéraires qui vous ont aiguillé et conduit dans votre propre voie d’écriture ? Les écrivains qui vous ont marqué durant votre carrière ?

- Didier Van Cauwelaert : Tous ceux qui allaient dans le sens de mon écriture, plus loin et mieux. Marcel Aymé, Romain Gary, Diderot, Balzac… J’ai commencé à écrire à huit ans, avant d’avoir vraiment lu : leur influence n’a donc été qu’une confirmation, un stimulant. Pas un « modèle » qui risque d’étouffer la personnalité.

De nombreux prix littéraires ponctuent votre parcours impressionnant (Prix Del Duca en 1982, prix Roger Nimier, prix Goncourt en1994, Molière en 1997, Grand Prix du théâtre à l’Académie Française, prix Marcel Pagnol, prix Nice Baie des Anges en 2007, etc…). Qu’est-ce que cela change pour un écrivain d’être consacré de la sorte ?

- Didier Van Cauwelaert : Je n’aime pas la consécration : j’aime les cadeaux, et je dis merci. Mais les cadeaux ne m’ont jamais « changé ». Le plaisir, le rayonnement qu’ils apportent n’est qu’un encouragement à rester soi-même tout en allant plus loin.

Avec votre précédent roman publié chez Albin Michel, Les témoins de la mariée, le lecteur peut partir à la découverte d’une histoire encore empreinte d’empathie pour l’humain. Un roman sur l’amitié qui part d’une situation, une fois de plus on ne peut plus cocasse… Comment imaginez-vous de telles histoires et comment naissent ces étonnants romans ?

- Didier Van Cauwelaert : Je pars toujours d’une situation inattendue qui perturbe et révèle. Parfois la vie m’apporte ces situations, parfois je les invente de toutes pièces. Mais il m’arrive souvent des choses qui me ressemblent. La matière romanesque, on la produit aussi dans la réalité. Je traite souvent ma vie comme mes romans. Folie, rigueur, prises de risque au service d’une harmonie retrouvée… J’ai besoin de construire et de reconstruire.

Une pièce de théâtre également fait partie de votre actualité, Le Rattachement. Une pièce qui raconte le rattachement du Comté de Nice à la France, voulu par Napoléon III. Pourquoi avoir choisi de traiter particulièrement de ce sujet historique ? Une façon de souligner votre lien étroit et votre affection pour Nice ?

Le Rattachement joué à Nice en Juin 2010 devant le Palais Préfectoral (c) Courtesy H.Lagarde pour le TNN

- Didier Van Cauwelaert : La pièce était une commande de la Ville de Nice, que j’ai acceptée lorsque j’ai trouvé mon « angle d’attaque » pour traiter ce moment d’histoire qui me tient à cœur. J’ai imaginé qu’avant de venir au monde, chacun de nous dépose un projet de vie comme un aviateur dépose un plan de vol, et doive justifier ce projet devant une sorte d’examinatrice. Mettre en scène Napoléon III défendant son incroyable destin « à venir » était une rare jubilation.

Mis en scène par Daniel Benoin, avec Mélanie Doutey, Alexandra Lamy et Samuel Labarthe, ce spectacle a remporté à Nice un immense succès public et critique, au mois de juin. Le reverra-t-on ?

- Didier Van Cauwelaert : Publiée chez Albin Michel, la pièce a été filmée par France Télévisions, lors des représentations à Nice, et sera diffusée prochainement sur France 2. Un projet de reprise à Paris se profile également.

Avec ce projet, pensez-vous que le théâtre apporte une perspective nouvelle à l’écrivain ?

- Didier Van Cauwelaert : J’aime alterner la solitude du romancier et le travail d’équipe au théâtre ou au cinéma. Chaque aventure apporte une nouveauté dans la continuité. Là, je vis à fond le succès de Thomas Drimm, « la série jeunesse que les adultes s’arrachent », comme dit la critique. Le tome 2 vient à peine de paraître chez Albin Michel que les projets d’adaptation audiovisuelle se bousculent.

Quant à votre roman Hors de moi, acheté par le cinéma américain, il vient d’être tourné avec Liam Neeson et Diane Kruger. Pouvez-vous nous en dire plus ?

- Didier Van Cauwelaert : L’adaptation américaine est formidable, mais je n’ai pas encore vu le film qui est en fin de montage. En tout cas, je ne pouvais pas rêver d’un meilleur casting.

Après 40 ans d’écriture, songez-vous à ralentir le rythme ou bien au contraire l’amplifier ?

- Didier Van Cauwelaert : Je ne décide rien d’avance. Mais je n’ai pas l’intention de m’économiser avec l’âge, au contraire… C’est un tel bonheur de vivre sa passion, quel que soit le mal qu’on se donne…


On vous sent très accessible lorsque l’on vous rencontre, au détour d’un festival ou d’un événement littéraire, une simplicité et une ouverture sur l’autre qui enthousiasme. Pour celui ou celle qui n’a pas eu encore la chance de vous rencontrer, quel conseil donneriez-vous à un jeune auteur aujourd’hui ?

- Didier Van Cauwelaert : « N’écoutez personne, sauf si les conseils confirment vos intuitions, vos questionnements, alimentent votre besoin de progresser dans votre direction ».

Interview réalisée par Rodolphe Cosimi, octobre 2010

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