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Jean-Claude Rossel, une conquête de la forme

Pastel/Collage

Suite du texte de John Squiers

Son souci de clarté, de justesse, d’équilibre, à travers l’exubérance même de ses signes, me fait le reconnaître typiquement français, comme ses tableaux me font aussi souvent penser à quelques précises et fines pièces d’Erik Satie dont délicieusement les accents « simultanément s’atomisent et s’agrègent ».

Sur les traces de nombreux artistes de tous les pays du monde, il devient méditerranéen. Dans la lumière de là bas, il laisse de plus en plus chanter ses couleurs au maximum de leur éclat.

Son « passage », cet espace, ce piège à lumière, cette architecture qu’il a patiemment construite et faite sienne, lui permet, sur cette rigueur initiale, une plus grande audace du graphisme et de la couleur.

Il peut « enfin » travailler « sans dessein » et pour notre bonheur, se laisser aller au seul plaisir de peindre ; mais avec quelle maîtrise et après une longue initiation à la plus exigeante des libertés, celle qui force à l’authenticité, la seule qui mène à l’originalité. (John Squiers, New-York, décembre 1986)

Pastel/Collage

Je comprends que, face aux œuvres de Jean-Claude Rossel on évoque la musique, Satie en particulier, et j’ai moi-même envie de lui accoler de la poésie, le haï-kaï, éloigné de la littérature d’exégèse… accoler n’est pas le mot, faire résonner plutôt, des mots qu’on laisse vibrer « tout seuls » en quelque sorte, comme Jean-Claude le fait avec les touches de peinture, de pastel, gestes délicats ou violents, mais comme « détachés »… c’est le terme qu’il emploie de sa propre personne pour ses tableaux achevés dans l’interview, mais le détachement, il faut bien qu’il soit en amont…

Pastel/Collage

Quelques haï-kaï d’Hugo Caral pour Jean-Claude Rossel…

J’ai donc cherché quelques poèmes d’Hugo Caral, qui déjà, dans des éditions, accompagna les œuvres d’Aurélie Nemours, Alberte Garibbo, Frank Lalou… j’ai cherché des haï-kaï, qui, en parlant de couleur et de lumière, pourraient rencontrer les espaces de Jean-Claude Rossel, où couleur et lumière, en étant objet de dépouillement, deviennent vraiment des espaces « abstraits ». Comme le haï-kaï, peut-être…

Ah ! couleurs du monde
sous l’eau encore plus belles
d’une éternité

A jours gris cœurs gris
la mélancolie n’est triste
elle est couleurs pales

Dis-moi la couleur
du ciel instable d’automne
dis-nous ses nuances

Alizés voyageurs
couleurs grands vents
saisis dans tes ailes

Un palmier la mer
l’Estérel ce roc là-bas
ses couleurs s’effacent

Ni couleurs ni formes
noir kaos des éléments
l’ordre viendra seul

Juste avant l’aurore
la nuit glauque sans couleurs
vagues premiers cris

Splendeur du mistral
la terre tzigane en feu
nos yeux couleur d’eau

La couleur n’en use
qu’à la plus intense attention
sinon te vaincra

Et maintenant… question de lumière…

Lumières glacées
la naissance d’une étoile
mémoire atomique

Jour à contre-jour
drame des lumières d’ombres
cyprès cœur d’obscur

Georges Seurat peint
éblouissements serrés
l’ombre ici lumière

la Grande Jatte pétille
la baignade noie les feux

Dans ce passé vide
comme un tunnel de lumière
ton être secret
Sur les galets l’aube
lumières du sud galets noirs
la longue ballade

Blanches sur la mer
voiles mangées de lumière
ce ciel incertain

La première pierre
pierres d’angle et clé de voûte
vitraux des lumières

Des gouttes de nuit
filtrées des arbres d’hiver
harpes de lumières

Cyprès maître obscur
antenne noire du temps
son ombre est lumière

Pastel/Collage

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