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INTERNATIONAL : Etat du marché de l’art 2009

L’art Contemporain, une Economie de marché spéculatif ?
Mythe ou Réalité ?

Le Marché de l’art face à la crise : état des lieux

L’art contemporain, pour lequel nous retenons les artistes nés après 1945, a basculé après sept années consécutives de hausse des prix. Rappelons en effet que, pour répondre à une demande accrue portée par de nouveaux acheteurs venus d’Asie, de Russie, du Moyen-Orient mais aussi par la multiplication des spéculateurs et des fonds d’investissements en art alléchés par la rapidité des plus-values, la part
de l’art contemporain s’était rapidement hypertrophiée. Un record en chassant un autre, les prix de l’art contemporain explosaient de +85% entre janvier 2002 et janvier 2008 et le nombre de lots alimentant les catalogues de ventes enflait, notamment pour le marché de l’art haut de gamme. Sur le marché des oeuvres négociées à plus de 100 000 €, la part de l’art contemporain s’élevait en effet de 8% à 19,5% entre 2005 et 2008 !
Sur cette même période, le nombre d’enchères millionnaires pour des oeuvres contemporaines progressait de près de 620% : entre juillet 2005 et juin 2006, sept artistes se partageaient 18 enchères millionnaires. Deux ans plus tard, ils étaient 25 à atteindre 120 fois ce seuil ! Cette année, 19 signatures contemporaines maintiennent
de tels sommets, générant 72 enchères millionnaires entre juillet 2008 et
juin 2009.
Le secteur le plus spéculatif et le plus volatil du marché de l’art fut le premier à souffrir de la dégradation de l’économie mondiale et de l’effondrement des bourses européennes et américaines.
Après le pic de la bulle spéculative atteint en janvier 2008, les prix accusaient une chute brutale de -27,1% sur l’année, suivie d’une baisse de -4,4% sur le premier

semestre 2009. Cette violente correction a gommé en quelques mois deux ans de spéculation, pour revenir au niveau de prix de 2006. Il s’agit de la plus violente correction toutes périodes de création confondues, conséquence de la forte rétractation de la demande sur le secteur haut de gamme.
Cette rétraction de la demande est la conséquence directe de la perte de liquidités sur le marché et d’un nouveau climat de défiance (mère de sûreté approuverait Aristophane). Au début du mois d’octobre 2008, l’Art Market Confidence Index (AMCI), le baromètre d’anticipation d’Artprice permettant de mesurer en temps réel la confiance des acteurs du marché, plongeait soudainement de -13%, en parallèle aux violentes corrections boursières.
Entre octobre 2008 et mars 2009, les nouvelles fortunes en Russie, en Inde et en Turquie fondaient littéralement (disparition de plus de 300 milliardaires à l’échelle mondiale enregistrée à la fin du premier trimestre 2009), les banques cessaient d’alimenter les collectionneurs en crédits destinés à l’achat d’oeuvres d’art, le géant UBS stoppait son pôle de conseil artistique dédié à l’achat et la vente d’oeuvres d’art, les subventions privées américaines dédiées aux arts s’atrophiaient entraînant des suppressions d’emplois massives dans les musées les plus prestigieux (le Detroit Institute of Arts et le Museum of Contemporary Art de Los Angeles ont licencié 20% de leur personnel). Une vague de licenciements touchait le monde de l’art américain : des musées aux fonds d’investissements, sans épargner les plus
grandes galeries. Quelques grands rendez-vous de l’art étaient annulés.
En 2008 déjà, Art Cologne Mallorca, Art Frankfurt, DC Düsseldorf Contemporary n’ont eu pas lieu et l’hécatombe s’est poursuivie en 2009, faisant comme victimes la Scope London, la Scope Hamptons, Photo London, la Red Dot Art Fair de Bâle, La Grosvenor House Art & Antiques Fair, la Biennale des Antiquaires de Paris.
Artparis Abudhabi, qui fut la première manifestation artistique internationale d’envergure dans l’Emirat, n’a connu que deux éditions : la première en 2007, la seconde en 2008. Une autre foire verra cependant le jour sur place en novembre 2009 avec la première édition d’Abu Dhabi Art.

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Ce climat de crise n’a pas épargné les maisons de ventes. Au second semestre 2008, le taux d’oeuvres invendues explose, passant de 33% (premier semestre 2007) à 47%. Pour l’art contemporain, ce sont les nouveaux relais de croissance, Hong Kong, Singapour et Dubaï qui sont les premiers touchés. A Hong Kong, Sotheby’s affichait un taux d’invendus inférieur à 10% en octobre 2007, ce ratio grimpait à 29% en octobre 2008. Par voie de conséquence, les chiffres d’affaires
ont fondu. On craignait le gel des achats, la désertion des salles de ventes, la déroute des nouveaux marchés… et les auctioneers ont dû convaincre en urgence les vendeurs de réviser leurs prix de réserve à la baisse avant les grandes vacations de novembre.

Malgré ces efforts et en dépit de bons résultats enregistrés les 11 et 12 novembre 2008 pour Gerhard Richter et Jean-Michel Basquiat chez Christie’s (adjudications à plus de 10 M€), et pour Yves Klein chez Sotheby’s (Archisponge (RE 11), 19 M$ ou 14,8 M€), le chiffre d’affaires des vacations d’art contemporain fut catastrophique en regard des attentes. Sotheby’s et Christie’s attendaient un volume d’affaires de
430 M$ pour ces deux jours de ventes et ont dû se contenter de 204 M$. Les mêmes vacations en novembre 2007 enregistraient un produit des ventes de 399 M$, 20% au-dessus des estimations basses.
En 2009, les auctioneers doivent modifier leurs stratégies afin de réajuster leurs offres face au nouveau climat financier et à une demande plus timorée.

Les nouvelles stratégies des auctioneers

En 2008, à l’euphorie de la hausse des prix délirante de l’art contemporain succédait un état de nervosité général avec, en toile de fond, le souvenir du précédent krach du marché de l’art où les prix avaient chuté de -44% entre 1990 et 1992 (indice global). Il fallut attendre 1995 avant de connaître une nouvelle période de
croissance sans heurt.

Les grandes maisons de ventes ont réagi rapidement pour prévenir un risque de gel d’enchères étendues à 2009. Pour pallier le risque de pertes, elles ont minimisé le nombre de lots catalogués, fait baisser les prix de réserve (10% de baisse minimum sont annoncés en décembre 2008 par Christie’s International), ont révisé leurs fourchettes d’estimations à la baisse, se sont adaptées à une demande moins
haut de gamme et ont mis un terme aux offres alléchantes de garanties, hormis pour des oeuvres réellement exceptionnelles. Parallèlement, elles se sont lancées dans des restructurations afin de réduire leurs dépenses.
Ces changements stratégiques n’ont pas empêché des réductions d’effectifs, ni la fermeture de la succursale de Philips de Pury à Cologne ou l’abandon en août 2009 du projet de fonds d’investissements dans l’art de Christie’s International.

Ventes d’art contemporain : TOP 10 des maisons de ventes 2008/2009

Rang Produit de ventes Maison de vente
1 199 755 370 € Sotheby’s LONDON
2 55 898 934 € Christie’s NEW YORK
3 48 969 684 € Sotheby’s NEW YORK
4 41 018 667 € Christie’s LONDON
5 25 602 019 € Sotheby’s HONG KONG
6 24 508 727 € Poly International Auction Co. Ltd
7 23 595 443 € Christie’s HONG KONG
8 16 995 896 € Phillips de Pury & Company LDN
9 14 435 744 € Phillips de Pury & Company NY
10 10 048 939 € China Guardian Auctions Co. Ltd

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En plein contexte de crise, le système des garanties offertes aux vendeurs s’avérait extrêmement dangereux. Entre novembre 2007 et novembre 2008, Sotheby’s et Christie’s garantissaient le prix de près de la moitié des oeuvres proposées lors des vacations d’art d’après-guerre et contemporain, ce qui leur permettait de garnir leurs catalogues d’oeuvres majeures. Rappelons que la garantie consiste à fixer à
l’avance un prix qui sera versé au vendeur quel que soit le résultat des enchères.
Dans le cas où l’oeuvre est invendue, la maison de ventes s’engage à l’acheter au montant préalablement fixé avec le vendeur. L’appât de la garantie a permis aux auctioneers d’enrichir leurs catalogues de ventes d’absolus chefs-d’oeuvre qui ont largement contribué à multiplier des records d’enchères faisant exploser leurs chiffres d’affaires. C’est, par exemple, en garantissant un prix minimum à David Rockefeller
que Sotheby’s se vit confier l’oeuvre White Center de Mark Rothko, adjugée 65 M$ (48 M€) le 15 mai 2007 à New-York.
Les nouvelles stratégies adoptées se sont avérées opérantes, puisque les taux d’invendus tombaient de -7% entre le second semestre 2008 et le premier semestre 2009.
Les dégâts ont certes été amoindris, mais ce ratio d’invendus demeure
particulièrement élevé en regard des années précédentes : on enregistrait en effet 44,7% d’oeuvres contemporaines ravalées entre juillet 2008 et juin 2009, contre une moyenne de 34% sur les cinq dernières années.
De plus, les maisons de ventes n’avaient pas suffisamment baissé leurs fourchettes d’estimation, notamment sur le secteur haut de gamme. Résultat : 65% des oeuvres contemporaines vendues étaient cédées sous leurs estimations basses en 2008/2009 (seule la moitié des lots vendus étaient frappés sous les estimations pessimistes les années précédentes). En temps de crise, l’art contemporain devient
donc plus abordable : la part de lots vendus moins de 5 000 € a progressé de près de 20% (passant de 50% entre juillet 2007/juin 2008 à 69%).
Entre l’explosion des invendus et la chute des prix, le volume d’affaires des maisons de ventes s’est considérablement atrophié entre le premier semestre 2008 et le premier semestre 2009 : la perte enregistrée est de l’ordre de -66,8% sur cette période !
Un bémol est cependant à apporter à cette déflagration aux allures de
catastrophe : rappelons que les marges de progression des grandes maisons de ventes ont été stratosphériques avant que la crise ne se déclare sur le marché de l’art.

Top 10 des plus fortes enchères d’art contemporain 2008/2009

Artistes nés après 1945
- ventes du 1er Juillet 2008 au 30 juin 2009
Artiste Adj. (€) Prix au marteau / Lot Vente

1 HIRST Damien 11 606 720 £ 9 200 000:The Golden Calf (2008) 15/09/2008 (Sotheby’s LONDON)
2 HIRST Damien 10 723 600 £ 8 500 000 : The Kingdom (2008) 15/09/2008 (Sotheby’s LONDON)
3 BASQUIAT Jean-M 9 450 000 $ 12 000 000 : Boxer (1982) 12/11/2008 (Christie’s NEW YORK)
4 HIRST Damien 5 803 360 £ 4 600 000 : Fragments of Paradise
(2008)
15/09/2008 (Sotheby’s LONDON )
5 BASQUIAT Jean-M 5 711 020 £ 4 520 000 : Untitled (1982/83) 01/07/2008 (Sotheby’s LONDON )
6 PRINCE Richard 4 763 395 £ 3 770 000 : « Overseas Nurse »
(2002)
01/07/2008 (Sotheby’s LONDON )
7 CHEN Yifei 3 815 770 ¥ 36 100 000 : Thinking of History at
my space (1979)
29/05/2009 (Poly International
Auction Co.,Ltd BEIJING)
8 BASQUIAT Jean-M 3 781 130 $ 5 150 000 : « Mater » (1982) 13/05/2009 (Christie’s NEW YORK)
9 CURRIN John 3 738 240 $ 4 800 000 : Nice ‘N easy (1999) 05/14/2008 (Sotheby’s, New York)
10 PRINCE Richard 3 611 720 £ 2 800 000 : « Dude Ranch Nurse #2 »
(2002-2003)
19/10/2008 (Christie’s LONDON )

Entre juillet 2002 et juin 2003, l’art contemporain dégageait 75,4 M€, puis 900 M€ de plus entre juillet 2007 et juin 2008 ! Ainsi, le score de 570 M€ enregistré sur la période juillet 2008/juin 2009 représente encore une hausse de 87% par rapport au volume d’affaires de 2005/2006.

Orient vs Occident

Les places de marché chinoises ne sont pas les seules à rythmer les ventes asiatiques.
Désormais, Taiwan, la Corée du Sud, Singapour et le Japon sont des places de marché incontournables sur la cartographie mondiale. Elles constituent, avec la Chine, une force de frappe capable de renverser l’ordre établi par les américains : cette année, pour la première fois, la zone Asie dégage un volume d’affaires supérieur au mastodonte américain (130 M€ contre 123 M€), particulièrement affecté par la crise !

En 2007, la Chine redistribuait les cartes en devenant la troisième place de marché mondiale pour les ventes aux enchères. Pékin et Hong Kong se sont rapidement imposées comme de nouveaux relais de croissance, et furent le théâtre d’investissements particulièrement agressifs depuis 2005. Outre la force de frappe des maisons de ventes chinoises comme Poly International Auction et China Guardian, le dynamisme du marché hongkongais a attiré Sotheby’s et Christie’s, secouant le marché de l’art deux fois par an avec leurs vacations d’art moderne et contemporain asiatique. Dans le sillage des deux mastodontes, Bonhams frappait
pour la première fois le marteau à Hong Kong en novembre 2007, suivie par Artcurial en janvier 2008.

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L’art contemporain asiatique, chinois en particulier, a subi de plein fouet les effets pervers de deux années d’envolée spéculative. Entre octobre et novembre 2008, Christie’s et Sotheby’s orchestraient à Hong Kong leurs ventes d’art moderne et contemporain asiatique. Le taux d’invendus habituel enregistré pour ce type de vacations oscillait entre 9 et 14%, il culminait cette fois à 35%. Le 30 novembre 2008, la cession d’art asiatique de Christie’s fut un fiasco : 44% d’oeuvres contemporaines leur sont restées sur les bras.
Si elle confirme cette année sa troisième place, gagnée en 2007 au profit de la France, la Chine perd cependant -63% de produit de ventes en matière d’art contemporain (95 M€, contre 259 M€ entre juillet 2007 et juin 2008). En regard de cette perte, c’est le pays le plus durement frappé par la crise dans ce secteur. Les premières conséquences de la crise financière mondiale sur le marché de l’art ont commencé par secouer les ventes de Hong Kong en octobre 2008 avant de se répercuter à l’échelle planétaire. L’Asie serait-elle en passe de devenir le nouveau pouls du marché ?
L’une des forces du marché asiatique, et chinois en particulier, est de soutenir avec un formidable dynamisme ses compatriotes, y compris les artistes les plus jeunes.
Dans le Top 50 des plus belles entrées aux enchères en effet, les Chinois écrasent toujours le marché. Près de la moitié des plus belles entrées en salles des ventes cette année sont le fait d’artistes
chinois, vingt-trois précisément, contre six artistes américains, trois anglais, un français (Gilles Barbier). Si l’on inclut tous les artistes asiatiques du Top 50, soit les Chinois, les Japonais, les Coréens
et les Indonésiens, ils représentent alors 64% des plus belles premières enchères sur l’ensemble des signatures artistiques mondiales !
Pour leurs premiers pas en ventes publiques, les Chinois Shanqing
Jiang, Ding Shang, Jiaming Wang et Jindong You signaient chacun une enchère à plus de 100 000 €. A ce niveau de prix, on compte aussi quatre Anglosaxons (les Américains Mark Bradford et Ann Broadaway, ainsi que les Britanniques David Adjaye et Nasser Azam) mais aucun autre artiste.

Quant à la formidable résistance du Royaume-Uni cette année, elle tient en un nom : Damien Hirst. Le cas Hirst, étendard mondialement connu de l’art contemporain britannique, s’avère particulièrement
impressionnant : il décrochait plus d’enchères millionnaires entre juillet
2008 et juin 2009 que tous les artistes contemporains mis aux enchères aux Etats-Unis sur la même période ! Pas moins de 29 enchères millionnaires saluaient les oeuvres du britannique, contre 17 signées sur le continent américain (en euros).

The Golden Calf (2008)

©ADA GP
Damien Hirst
The Golden Calf (2008)
11 606 720 €
Sotheby’s, Londres, 15 sept. 2008
©ADA GP

Toutes les sources de cet articles viennent de Artprice. ( Selon étude sur le marché de l’Art Contemporain à l’occasion de la Fiac2009)

LA FIAC EN IMAGE
Les deux formats vidéos démarrant automatiquement, il vous faudra mettre sur pause l’une ou l’autre afin de visionner les formats avec audio.

Les formats vidéos sont issus de sources "Artivi" pour la Fiac 2009

Horaires

Ouverture au public
Du jeudi 22 au dimanche 25 octobre 2009
Cour Carrée du Louvre, de 13h à 21h
Grand Palais, de 12h à 20h

Jardins des Tuileries
Tous les jours de 7h30 à 19h30.

Sur invitation
Avant-première Cour Carrée du Louvre : mardi 20 octobre, de 15h à 21h
Après-midi professionel : mercredi 21 octobre, de 15h à 17h
Vernissage : mercredi 21 octobre, de 17h à 22h

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