| Retour

Fin de cet événement Juin 2016 - Date du 9 octobre 2015 au 12 juin 2016

TNN - Saison 2015-2016

Afin de perfectionner sa sélection, Irina Brook a choisi début septembre pour présenter la programmation de l’année 2015-2016 du Théâtre National de Nice. Plutôt que de citer la liste des spectacles qui peut être découverte dans la jolie plaquette turquoise créée par l’artiste Armand Scholtès, Irina a préféré, au cours de la conférence de presse, parler de sa « politique » théâtrale et de son idéologie : « Impossible d’ignorer ce qui se passe dans le monde et qui va en s’aggravant » a-t-elle dit. Aussi son désir est-il que le théâtre puisse parler de tout cela en rassemblant un public prêt à échanger et à rire. Le rire n’empêche pas d’alerter, bien au contraire !
La sélection proposée est celle qu’Irina Brook aurait elle-même envie de voir et qu’elle souhaite donc partager. Même si elle est davantage indigeste que nourrissante, la programmation est axée sur les principales préoccupations du moment : les réfugiés d’une part et l’environnement avec la dégradation de la planète d’autre part. (Comment ne pas penser à la Conférence sur le climat à Paris en décembre qui doit réunir les grands de ce monde ?)

the valley of astonishment, texte & mise en scène Peter Brook & Marie-Hélène Estienne, du 20 au 25 novembre 2015 © DR

Bien sûr la phrase « Nous sommes tous reliés » est devenue un cliché répété de bouche en bouche, a-t-elle dit, en ajoutant que quelque chose se passe dans le monde pour tenter « de se mettre dans les chaussures d’un autre ». Ce lien pourrait être réalisé par le théâtre qui devrait être la préoccupation de tous. Une pièce a le pouvoir de rassembler les gens dans une profonde empathie. Est-ce idéaliste ou utopiste de le croire ? s’interroge-t-elle.

En cette année qui célèbre la nature, Irina Brook a désiré que le TNN se joigne à la bataille sur le climat et l’environnement quelle que soit la quantité des informations partagées. Avec son équipe, elle a donc créé un festival intitulé « Réveillons-nous ! », prévu du 26 novembre au 12 décembre. Trois semaines riches en spectacles « engagés » et en personnalités importantes qui donneront des conférences sur ce sujet, avec l’opportunité de faire des propositions et de chercher des solutions alternatives pour parler du climat en lien avec l’économie, l’éducation, la religion et donc l’humanité.

shakespeare free style ! projet pédagogique dirigé par Irina Brook, les 23 et 24 janvier 2016 © DR

En avant-première du Festival, une journée événement est proposée dès le 26 septembre. Hubert Reeves, astrophysicien bien connu pour ses préoccupations sur l’avenir de la planète et de l’humanité, sera l’invité d’honneur, tandis que le soir même Mélanie Laurent présentera en avant-première « Demain » un documentaire qu’elle a réalisé avec Cyril Dion sur la disparition possible d’une partie de l’humanité d’ici 2100. Comment l’éviter ? Ajoutons une exposition des oeuvres d’Armand Scholtès et un marché bio prévu sur le parvis du théâtre.

La programmation « engagée » de l’année se poursuit avec des créations d’un théâtre d’actualité entre janvier et mars, un théâtre au service de ce qui se passe dans le monde en résonance avec l’humanité et la planète sur lequel Irina Brook a insisté en disant que plutôt qu’un choix, cela lui a semblé une évidence.

Ainsi « Terre noire » de Stefano Massini, auteur italien nommé récemment directeur du Piccolo Teatro de Milan, raconte la bataille qui oppose un couple de paysans sud-africains à d’impitoyables multinationales qui ne veulent que « faire du fric ». Irina Brook mettra en scène cette image du monde en péril, interprétée par Romane Bohringer. Avec la même comédienne, Irina s’est emparée d’un autre texte puissant et poétique de Lina Prosa, « Lampedusa Beach » empreint des mythes grecs pour donner une dimension universelle à un naufrage de migrants clandestins. Sujet aussi brûlant que celui de « Esperanza », un texte-radeau de Aziz Chouaki, mis en scène par Hovnatan Avédikian à la suite d’un échange avec des détenus de la Maison d’arrêt de Nice. Un drame intense sans pourtant être dénué d’humour.

D’autres créations sont annoncées, comme « Le petit théâtre du bout du monde » avec les marionnettes poétiques d’Ezéquiel Garcia-Romeu. Et bien sûr, Shakespeare avec, pour la deuxième année, le Festival « Shake Nice » qui s’ouvrira sur les collèges et les lycées, avec tout un travail de terrain pour réfléchir à ce qu’est le spectacle aujourd’hui. D’ailleurs un accueil particulier est prévu pour ceux qui ne sont jamais allés au théâtre. Comment les attirer ? Le public est lui-même concerné pour les inciter.

Comme la Directrice du théâtre, nous ne citerons pas l’ample programme de l’année qui s’ouvrira début octobre avec du théâtre musical « Le crocodile trompeur » une farce burlesque et bouleversante d’après « Didon et Enée », l’opéra de Purcell. Et il faut souligner le spectacle écrit et mis en scène par Peter Brook (le célèbre père d’Irina), « The valley of astonishment » dans lequel il poursuit ses recherches sur le mystère du cerveau humain.

Irina Brook a insisté sur le fait que les spectacles sélectionnés étaient abordables pour tous, sans rien d’ennuyeux et qu’il y aurait encore des surprises à venir ! Bien sûr, avec le théâtre comme miroir de la société, il est impossible de fermer les yeux sur les injustices du monde qui nous entoure et sur des réfugiés sans-abri, si proches de nous.

Fini de rêver, il est temps de se réveiller. « Réveillons-nous ! » clame Irina Brook. Tous ensemble !

Photo de Une : le crocodile trompeur / didon et énée, d’après l’opéra de Henry Purcell & d’autres matériaux, mise en scène Samuel Achache & Jeanne Candel, direction musicale Florent Hubert, Les 9 et 10 octobre 2015 © DR

Artiste(s)