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Palais des Festivals de Cannes - Danses et ballets masqués de Bali

Une magnifique soirée de spectacles balinais était proposée au Palais des Festivals de Cannes, avec un éventail très complet et très diversifié de ce que nous offre la scène balinaise. Si scène il y a, car danse, musique et théâtre sont tellement inscrits dans la vie quotidienne des habitants de cette île paradisiaque que les spectacles se déroulent le plus souvent dans la rue ou devant un temple, même s’il est minuscule.

La troupe Jaya Semara Wati nous parvient du village de Sebatu, au centre de l’île de Bali. La première partie du spectacle propose des danses accompagnées par le fameux gamelan, l’instrument de musique qui accompagne tous les genres entremêlés : danse, chant, pantomime, théâtre... Les gamelans (en métal ou en bambou) sont donc nombreux sur scène en faisant partie intégrante du spectacle avec d’insolites lignes mélodiques, spécifiques à cet instrument. Le langage du gamelan est très riche et varié.
A Cannes, des danses sacrées étaient présentées, parfois avec un seul danseur (ou une seule).

Leurs gestes éliminent les mots, avec des signes spirituels où les esprits des morts sont bien souvent présents.

Les danseurs parlent avec les yeux, avec les mouvements de mains et de doigts qui s’agitent de façon très subtile et nous semblent, à nous, Occidentaux, totalement hermétiques. Mais, c’est d’une telle beauté que l’on ne peut qu’admirer.
A Bali, on apprend à danser dès l’enfance.
Sur la scène cannoise, souvent la danse était exécutée par un seul danseur parfois par un groupe de plusieurs, en montrant aussi bien le flirt de papillons que des rituels dans des danses assises où le torse et les yeux s’expriment de façon très subtile. Les morts sont bien souvent convoqués : pour les Balinais la frontière entre les morts et les vivants est très ténue.
Dans une deuxième partie sur-titrée, car parlé en javanais ancien, la narration révèle un art vocal très ancien mi-chant, mi-paroles.
C’est du théâtre avec des masques où tous les personnages sont très codifiés. Familiers du théâtre balinais, ils sont donc présents dans tous leurs spectacles et parlent avec des signes et non plus avec des mots.
Même si les comédiens profèrent des sons gutturaux, les Balinais ont une variété de gestes et de mimiques pour toutes les circonstances à exprimer dans la vie. Et donc tout autant dans un spectacle où elles sont utilisées à point nommé.
Le danseur semble possédé par son rôle, avec les roulements mécaniques des yeux, les moues de lèvres, les crispations musculaires, ... : tout a, pour les Balinais, une signification qui nous reste énigmatique.
Nous pouvons davantage nous familiariser avec les personnages ritualisés, sans pour autant définir la narration. Le Barong est la figure à la fois la plus habituelle et la plus obscure de la scène balinaise. En action, il est animé par deux hommes : l’un soutenant l’avant, l’autre formant les pattes de derrière. A sa suite arrive Rangda - qui signifie veuve, elle est donc l’épouse d’un esprit. Veuve et sorcière, elle est terrifiante, maléfique.
Tous deux reviennent systématiquement dans les spectacles et ils étaient donc sur la scène cannoise.
Considéré comme un art primitif, nous ne pouvons cependant qu’être fasciné et émerveillé par le mystère et la beauté de ces danses éblouissantes.
Cette évasion vers cet ailleurs lointain nous a enthousiasmé, ainsi que tout le public du palais des Festivals de Cannes qui a largement applaudi ce merveilleux spectacle insolite.

Caroline Boudet-Lefort

Tous visuels de l’article DR courtesy Palais des Festivals de Cannes

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