À la frontière séparant les États-Unis et le Mexique se dresse une barrière, une muraille sinistre et connue de tous. À elle seule, elle incarne tous les murs et refus de l’autre.
Dans Amexica, la photographie est un champ de bataille. On s’y affronte dans un combat entre communautés, cultures et pays. On y voit surtout s’y mener une lutte sans merci entre individus et entre genres.
- © Marie Baronnet Javier, 4th Avenue Jail prison. Comme dans la prison de Tent City fondée par le shérif Joe Arpaio les détenus étaient obligés de porter des uniformes à rayures et d’être enchainés. En 2008, un juge fédéral a statué que les conditions inhumaines de cette prison du comté étaient inconstitutionnelles et compromettaient la santé et la sécurité des prisonniers. Phoenix, Arizona, États-Unis, 2011
Dans un territoire circonscrit par des matériaux agressifs, les contradictions ne peuvent se régler sans heurts ; une arène où, à la fin, ce sont toujours les mêmes qui doivent s’avouer vaincus. Clivage racial, clivage de classe, tout ici s’oppose dans un affrontement où l’un des protagonistes supplie, et l’autre humilie. Monde binaire, alternance de lumière naturelle, aveuglante, et d’obscurité, précarité contre abondance, ville et désert, bricolage et sophistication, milices opposées aux coyotes, comme si cette partie du monde ne fonctionnait qu’en termes schématiques ! Il faut pourtant en convenir, les soirs de pleine lune, dans l’alternance du jour et de la nuit, se joue le combat entre deux forces, entre deux pulsions, celles de la vie et de la mort, de l’amour et de la haine. La ligne de démarcation indique clairement le territoire du maître et le territoire du faible.
Côté États-Unis, le mur est le point de départ d’une psychose généralisée, un déni de réalité partagé par une communauté angoissée. Fermer la frontière, c’est « protéger le peuple contre le crime » et investir le mur d’un caractère sacré. L’ouvrage se veut « impénétrable, beau et solide » (Donald Trump), prévu sur 3 200 kilomètres, borne les confins de la civilisation contre ces modernes « barbares ».
Dans une suite photographique consacrée à la représentation d’une réalité apocalyptique à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, Marie Baronnet ne laisse rien dans l’ombre. Par l’emploi d’une couleur franche, souvent contrastée, avec une tonalité crépusculaire, la photographe fait ressortir la nature d’un conflit qui déchire les communautés. Son attention se porte sur des instants quelconques et juxtapose des moments qui rendent intelligibles le processus, l’apartheid mis en place par le mur, dans l’urgence, portrait par portrait, de saisir le drame qui nous fait face, ses protagonistes et ses modalités.
À découvrir jusqu’au au 11 juin !