| Retour

Hector Berlioz, le compositeur qui aimait Nice

"Voilà que j’aspire l’air tiède et embaumé de Nice à pleins poumons, voilà la vie et la joie qui accourent à tire-d’aile, et la musique qui m’embrasse, et l’avenir qui me sourit, et je reste à Nice un mois entier à errer dans les bois d’orangers, à me plonger dans la mer, à dormir sur les bruyères des montagnes de Villefranche, à voir, du haut de ce radieux observatoire les navires venir, passer et disparaître silencieusement. C’est ainsi que j’ai passé à Nice les vingt plus beaux jours de ma vie" écrivit Hector Berlioz dans ses mémoires.

Finalement, la ville d’Azur ne s’est pas montrée très généreuse avec le compositeur en ne lui octroyant qu’une rue reliant la gare SNCF à l’avenue Victor-Hugo dans le quartier des musiciens. Et pourtant, Berlioz vint à trois reprises à Nice, dont il conserva un souvenir émerveillé.

Romantique et travailleur acharné

Le compositeur, en 1863. DR

Au printemps 1831, première halte dans ce qu’il appelle "le quartier des Ponchettes" où il apprend que sa fiancée l’abandonne pour épouser le célèbre facteur de piano Camille Pleyel. C’est à cette époque qu’il écrit son ouverture du roi Lear sur la colline du château, dans la Tour Bellanda, en romantique inspiré par la Méditerranée. "J’ai un appartement délicieux dont les fenêtres donnent sur la mer. Je suis tout accoutumé au continuel râlement des vagues. Le matin, quand j’ouvre ma fenêtre, c’est superbe de voir les crêtes accourir comme la crinière ondoyante d’une troupe de chevaux blancs. Je m’endors au bruit de l’artillerie des ondes, battant en brèche le rocher sur lequel est bâtie ma maison" s’émerveille t-il dans ses mémoires.
Retour dans la ville de son cœur en 1844 pour ce travailleur acharné, et souvent malheureux du manque de reconnaissance de son talent par ses contemporains. Il est alors en convalescence."Je ne revis pas sans émotion les lieux où je m’étais trouvé treize ans auparavant. Je nageai beaucoup dans la mer, je fis de nombreuses excursions aux environs de Nice, à Villefranche, à Beaulieu, à Cimiez, au Phare" raconte t-il dans une lettre. Il est reparti revigoré, encore plus ébloui par la beauté de notre région. Enfin, ultime passage sur la Côte d’Azur, en 1868. Une mauvaise période pour lui, marquée par une congestion cérébrale - il a alors 66 ans - qui le fit chuter lourdement lors d’une excursion à Monaco. Il en donne le récit poignant dans une lettre à la grande duchesse de Russie.

La reconnaissance, enfin...

Chef d’orchestre reconnu, compositeur romantique et classique enfin respecté, Hector Berlioz organisa d’importants concerts publics et créera même le concept de festival. Il ne jouait pas "petit bras" puisque pour son Requiem composé en 1837 il utilisa pas moins de... 440 musiciens et chanteurs pour la première qui eut lieu en la cathédrale Saint Louis des Invalides, les exécutants étant placés dans tous les coins et recoins de l’édifice, ce qui ne devait quand même pas être bien évident pour les diriger.
Aujourd’hui, nous dirions que cette performance trahissait un petit côté mégalo de ce bon Hector. Mais son romantisme échevelé, la puissance de sa musique l’ont installé aux premiers rangs des grands compositeurs.
Bonne fille, Nice avait organisé en son honneur une grande exposition l’an passé pour les 150 ans de sa disparition.
La reconnaissance, enfin...

Photo de Une : L’affiche de Bernard Lancy pour "La symphonie fantastique", film de Christian Jaque tourné en 1942 avec Jean-Louis Barrault dans le rôle titre. DR

Artiste(s)