 
C’est sur une toute autre route que nous entraîne  Jacques Généreux,  qui est, on  le sait et il ne s’en cache pas, la  tête  pensante  de Jean Luc Mélanchon  et  de sa mouvance  « nouvelle gauche ».  Ce qualificatif pourrait valoir disqualification  ou en tout cas  rangement dans l’étagère  « polémique politicienne gratuite ».  Que nenni !   
Dans  « La grande Régression, Généreux nous livre  un condensé, éminemment lisible, de sa pensée, exprimée dans une bibliographie de quelques  20  ouvrages. Généreux  est un penseur, philosophe et sociologue, analyste du fait social tel qu’il apparaît dans son enracinement historique.  
Et cette vision a bien du recul par rapport aux romans de haute finance ou aux traités lénifiants sur  la gestion de crise.
Ce que  Généreux qualifie de   régression  - au sens plus  récurrent pour ne pas  dire  permanent  que le mot crise -   est  en fait le délitement  de la société occidentale,  qui perd, au cours  du  20 e siècle la cohérence sociale   que lui donnaient la rigueur   organisatrice  des institutions  religieuses et autres  structures  sociales  et mentales qui arrimaient l’économie  au « peuple », dans toutes ses contradictions  et  antagonismes.  Défaisant dans une démonstration plutôt brillante le lien que  le discours  commun  fait entre liberté, libéralisme, capitalisme, libre-échange  et modernité, Généreux reprend à zéro  l’analyse  sociétale et sa pensée,  non-conformiste  à souhait,  donne des lignes de pensées et d’action surprenantes  et  fertiles . Le libre échange  est une composante  structurelle de l’économie libérale  et  la délocalisation systématique de l’activité productive vers  des pays à faible coût de main d’œuvre est donc une fatalité à laquelle on ne peut ni ne doit s’opposer ?   voila  le théorème fondamental auquel s’attaque Généreux .
Car, notamment, la territorialité  économique  est un des critères   généralement oubliés ou occultés du raisonnement libéral.
Ce qui est agréable dans la lecture de Généreux c’est qu’il arrive ( parfois avec difficulté, il est vrai) à s’abstraire de l’incantatoire utopiste qui caractérise généralement le discours dit « de gauche » sur l’évolution du capitalisme. Tout en, bien sûr, se démarquant du suivisme impotent de la social-démocratie Ce n’est pas que cet ouvrage procure les recettes imparables de notre bien-être futur. On en a fini du Grand Soir. Mais l’analyse rafraîchissante que propose Généreux féconde l’esprit à la recherche d’une voie possible hors de la confrontation économique qui s’annonce à grands pas. L’ouvrage reste analytique et philosophique, mais, contrairement à ce que le titre pourrait laisser penser, il ouvre une vision optimiste de l’avenir.
Ce livre est important. Il ne fonde pas une doctrine, mais il en déconstruit plusieurs ; des doctrines de gauche comme de droite. C’est une première boîte à outils d’une pensée politique post-écologique, post-tiermondiste, post-altermondiste.
Et si ces questions d’économie sociétale vous intéressent, pourquoi ne pas venir en parler au nouveau café littéraire que l’association Ethicum (www.ethicum.org) organise à la librairie quartier latin à peu près une fois par mois. Détails sur les ethicafés, sur les sites d’Ethicum et de la librairie.

