| Retour

Biennale de Venise 2022, The Milk of Dreams

La 59e Biennale d’Art contemporain de Venise, intitulée « The Milk of Dreams », le Lait des Rêves, inspirée d’un livre de contes pour enfants de l’artiste surréaliste Leonora Carrington, offre une place importante aux femmes, aux minorités, aux cultures généralement peu représentées. Cecilia Alemani, la commissaire générale, interroge le devenir troublé de notre monde et ses métamorphoses. La guerre en Ukraine présente dans les consciences est représentée symboliquement au cœur des Giardinis par des tas de bois brûlés et d’un monticule de sacs blancs contenant du sable. Le pavillon russe est bien sûr fermé, les artistes ayant refusé de participer pour protester contre l’invasion de l’Ukraine. Pour la première fois depuis 127 ans, deux artistes femmes noires ont été récompensées : l’anglaise Sonia Boyce, et l’américaine Simone Leigh.

Pavillon américain

Dans le pavillon américain transformé en cahute recouverte d’un toit de paille, les sculptures monumentales en bronze de Simone Leigh représentant des femmes africaines belles, hiératiques et sans yeux, telles des reines géantes, un hommage aux femmes noires rarement évoquées, encore moins célébrées par l’histoire.

©AA

Pavillon anglais

Il a été recouvert très agréablement d’images et de sons. Des écrans montrent des femmes chantant des blues dans un décor d’images et de formes cubiques dorées.

Le Pavillon espagnol est remarquable pour sa simplicité et son minimalisme - on ne peut peut pas faire moins - il expose… des ombres - ses propres ombres, celles créées par les verrières du plafond qui se projettent sur les murs d’un blanc immaculé. Ce sont des ombres de formes géométriques qui forcément évoluent selon le trajet du soleil. C’est très beau, pur, reposant. Cela semble simple mais il a fallu pour cela démonter en partie le plafond, mettre des verrières. Ignasi Aballí, l’artiste barcelonais a dû calculer pour savoir comment la lumière allait jouer, créer des cloisons de différentes hauteurs pour « casser » les ombres, créer des salles de différentes tailles, des couloirs. Ainsi l’architecture est elle-même doublement œuvre plastique. On est loin des salles surchargées d’objets ou de couleurs. L’exposition se nomme : “Corrección”.

©A.A

Le pavillon suisse

Latifa Echakhch présente une installation de sculptures éphémères en bois fin dont certaines ont été brûlés et dont il ne reste que les structures intérieures qui les supportaient.

©AA

Le pavillon français

Zineb Sedira, née en France de parents algériens, et vivant en Angleterre interroge son identité multiple. Mémoire et transmission sont au cœur de l’installation réalisé dans le pavillon français. « Les rêves n’ont pas de titre » consiste en une installation où elle a reconstitué une partie de l’appartement de ses parents dans les années 60, complété par un environnement cinématographique avec des caméras, des bancs de montage, un plateau de tournage et un grand bar avec piste de danse et tables où on peut s’installer. L’ensemble dégage une grande nostalgie bercée par le son du tango.

©A.A

Au pavillon belge

Des écrans montrent des jeux d’enfants dans le monde, des jeux simples avec des roues de camion à faire remonter sur des monticules, des jeux de pierres à lettre dans des trous, des courses d’escargot aux coquilles repeintes comme des voitures de sport, un drôle de jeu consistant à faire ensemble des ouh pour attirer des nuées de moustiques au dessus du groupe d’enfants puis à les écraser en tapant dans ses mains, un genre de chat perché sur des grosses pierres, des jeux de guerre où les fusils sont des miroirs et les balles les éclats de lumière qu’ils renvoient, et bien sûr des jeux de billes et des cordes à sauter… On est loin des jeux électroniques.

Le pavillon polonais

Il est couvert par des tapisseries de l’artiste rom Malgorzata Mirga-Tas. Un immense patchwork de personnages en tissus de couleurs cousus racontant l’épopée mythique des Roms vers l’Europe, des scènes de la vie quotidienne, des symboles… une œuvre puissante.

©AA

Dans le Pavillon grec

La salle est plongée dans le noir, on vous installe sur des fauteuils mobiles, les pieds surélévés, on y est pratiquement allongé. On vous équipe alors d’un casque de vision 3D et des écouteurs. C’est le noir total. D’un coup, vous voilà au-dessus d’une route, voguant rapidement très haut (comme j’ai le vertige, je dois fermer les yeux et expliquer à mon cerveau que c’est une illusion, que je suis bien assis dans une pièce et que je ne vais pas tomber). L’impression de réel est puissante. J’ouvre les yeux de temps en temps, pressé d’atterrir. Enfin, je me retrouve devant des gens : un vieil homme aveugle conduit par sa fille. Il est juste là devant moi et me parle. Nous sommes dans un genre de bidonville : détritus au sols, voitures cassées, maisons de bric et de broc. C’est l’histoire d’Œdipe à Colone tournée avec des Roms, habitants de cette zone dévastée. Ils portent des masques et jouent les personnages de la pièce : le chœur antique, Thésée, le Roi d’Athènes, et Œdipe errant sur les routes guidé par sa fille Antigone, qui essaie de trouver asile à Colone… On est immergé dans ces lieux, l’effet de réel est impressionnant, la mise en scène de Loukia Alavanou plus qu’originale. On en sort interloqué.

Le Pavillon allemand a été en partie déconstruit, nous montrant son sous sol et les murs de brique. Une vision archéologique.

Le Pavillon du Danemark présentait de scènes spectaculaires assez macabres de centaures

©AA

Dans le Pavillon central, à l’entrée, l’éléphant vert très réaliste de l’Allemande Katharina Fritsch.

©AA

Photo de Une (détail) le pavillon allemand DR

Artiste(s)