Susanna LEHTINEN ICI et AILLEURS 12 avril / 30 mai Installations, photographies, dessins, sculptures - Vernissage le samedi 12 avril
À force de questionner la problématique de la représentation par l’image (ou l’eidôlon, c’est à dire l’image-âme), j’en suis venue à côtoyer mes propres fantômes, ces énergies positives, car il est vrai que « l’être n’existe que hanté, parcouru par d’autres êtres, les fantômes ». Cette énergie des êtres disparus, cette force vitale, l’énormon d’Hippocrate, ce feu interne, cette vibration intime, c’est aussi le monde « subphysique » de la physique quantique, ce monde des eidôla d’Épicure, sorte de doubles voyageurs qui restent invisibles durant leur trajet mais qui sont à l’origine de l’image mentale, phantasia, phantasma [????????], ou encore fantôme. Essence magique de la lumière. D’ailleurs un des buts de l’art n’est il pas de surprendre "cette rencontre, dans l’ambiance, des particules les plus ténues, cette poussière d’émotion qui enveloppe les objets..." ? En Finlande, le fantôme, le double, haamu, est omniprésent : nous avons tous un double à nos côtés, présence erratique et protectrice qui se déplace dans l’espace-temps : intermédiaire psychopompe, il va chercher des réponses dans le monde des morts ; il possède ce don de « vision » suprasensible... tout comme l’image a toujours tenté de représenter l’invisible.
Ainsi le miroir nous renvoie une image ambiguë (de quelle réalité s’agit-il ?), il peut piéger notre double, de même j’assemble mes images, mes objets comme autant de négatifs, de retournements, de suggestions du réel. Je m’amuse de l’homonymie du mot spectre, désignant tout à la fois le monde de l’au-delà, par définition imperceptible, et la représentation des rayonnements électromagnétiques, la lumière, ou autres espaces topologiques pointés, pour représenter l’identité des corps ou bien celle des âmes.
Comme dans un miroir : vous n’êtes pas le reflet, mais le reflet est vous.
Martin CAMINITI
12 avril / 30 mai Installations, photographies, dessins, sculptures - Vernissage le samedi 12 avril
N’en déplaise aux anguleux, aux pointus, aux cabossés et carrés de toute espèce, la perfection, si jamais il s’en trouve en ce monde hésitant, est rondeur. Féminine d’abord, n’importe quel gascon vous le dira, qui ajoutera trop vite, pudique échanson, rondeur du vin de chez nous quand il est sans tâche ni défaut.
Chez Martin Caminiti la rondeur est plus que parfaite, elle est infinie. Comme ses roues qu’il fait tourner dans l’espace sans limite de notre imaginaire, rondes de l’enfance et de ses re-créations, du bonheur nostalgique de ces routes de France où l’été à flonflons bleuit les bicyclettes sur des ballons d’Alsace et des Val à Loup rond.
Pêcheur par son prénom, cycliste par atavisme, franc comme le soleil qui éclabousse de ses rayons tubulaires son port d’attache et réchauffe sa mer sans faire la marée, il nous offre en partage les mystères dorés de ses prises multiples accrochées à ses cannes et pendues à ses filets. Cette rondeur-là est toute finesse, de délicatesse et d’envolée, bouquet de plumes écloses sous le métal premier qu’il déguise et façonne à sa guise, vieux cadres recyclés avant extrême-onction, matériau renaissant du profond de l’oubli, objets réanimés par le souffle de l’artiste... Cette rondeur-là nous joue pour de vrai la musique de la vie, celle des partitions intimes que tout le monde sait mais que trop peu entonnent, huile du pédalier que la chaîne copule, chuintement marin du crin et de la corde, quelques notes égrenées aux pignons de la rue...
Pour notre bonheur, Martin Caminiti est un enfant qui a bien tourné.
Exposition hors les murs “Formats raisin”
5 juin / 5 juillet à l’Espace Vallès de Saint-Martin-d’Hères, Isère
Michel Barjol, Tamina Beausoleil, Céline Brun-Picard, Alain Buhot, Silvia Cabezas Pizarro, Martin Caminiti, Patricia Cartereau, Philippe Chitarrini, Fred Clavère, Claire Dantzer, Corinne de Battista, Jérémie Delhome, Nicolas Desplats, Laurent Galland, Anne Gérard, Geneviève Gleize, Fabien Granet, Michel Houssin, Pascale Hugonet, Lina Jabbour, Frédéric Khodja, Susanna Lehtinen, Rose Lemeunier, Gilles Miquelis, Daniela Montecinos, Marie-Noëlle Pécarrère, Nicolas Pincemin, Pascale Robert, Pascal Simonet, Christian Valverde, Gaëlle Villedary...
Michel BARJOL
5 juillet / 8 septembre Dessins, installations, photographies
Paysages dépaysés
L’artiste affiche son projet de façon apparemment anodine : "Paysages choisis", mais au contact de l’œuvre la formule se révèle subversive. Qui dit choix dit ici réappropriation radicale ! Pourquoi opérer un tel dépaysement de son propre pays, si ce n’est le prix de sa liberté ? Car il ne s’agit pas de se soumettre au despotisme des lieux, de les "représenter" servilement, mais de s’en affranchir pour les reconstruire dans un espace différent, reconfiguré et transfiguré.
D’abord ruser avec ce terroir si souvent caricaturé, en le soumettant à une vue aérienne : imposer une verticalité pour libérer le paysage de ses pesanteurs chtoniennes et de ses clichés touristiques. Pour effectuer cette ascèse, il s’agit de prendre de la hauteur, de se donner de l’air, de désenclaver le paysage : l’outil technologique de Google Earth offre ici une nouvelle clé. Mais ce n’est encore qu’une étape transitoire, car l’espace recréé est loin d’être abstrait. Au contraire, le paysage épuré est résolument remodelé, réaménagé, réhabité, tout en gagnant en universalité. Un pays n’est pas fait que de limites, de contours, de "coins", mais de passages, d’ouvertures, d’horizons...
La disjonction de l’espace plastique vis-à-vis des lieux permet de rédimer leur finitude. N’est-ce pas la racine même du mot espace (en grec, spaô) que de signifier "tirer hors de, extraire, étirer au point de déchirer" ? La technique artistique opère ici sur le topos familier un travail d’extension pugnace, de fragmentation, pour se placer résolument dans l’Ouvert*. Soumis à une dislocation salutaire, le paysage est littéralement sculpté et rebâti par l’artiste : il fait alors apparaître des sillons, des tracés, des dénivelés, des lignes de crêtes, des écartements, des intervalles, des passages insoupçonnés, des issues esquissées, des tronçons qui s’ébauchent et se chevauchent, d’invisibles correspondances ... On peut penser aux "chemins qui ne mènent nulle part" du philosophe rustique**, mais ici il ne s’agit plus simplement de chemins recouverts d’herbes qui s’arrêtent en lisière de forêts, comme au bout du monde : plutôt des perspectives ouvertes par une exigence artistique tenace, imposant du haut de l’atelier les lois de son imaginaire. L’artiste devient alors le paysagiste d’espaces u-topiques, d’émancipation vis-à-vis du locus originel.
Frédéric NAKACHE
5 juillet / 8 septembre Dessins, installations, photographies
Mon travail s’articule autour de la notion de mémoire. Dans ma pratique artistique, j’assemble des morceaux du monde matériel, de l’histoire de l’art et de la photographie ainsi que des éléments personnels. Avec ces fragments, je construis une narration particulière, qui n’est autre que l’exploration de ma propre expérience de la réalité.
MURS… murmure : Silvia CABEZAS PIZARRO, Claudie DADU, Claire DANTZER, Bertrand GADENNE, Gilles MIQUELIS, Patrick SIROT
18 octobre / 25 novembre Dessins, installations, peintures, vidéos et une carte blanche à Martine ROBIN et Lydie MARCHI
MURS… murmure succédera à Formats raisin, un événement créé en 2012 et reconduit en 2013 à la Galerie Martagon, repris en 2014 à l’espace Vallès à Saint-Martin-d’Hères : une expérience qui nous a questionné sur l’occupation du mur (plus précisément son remplissage). De là nous est venue l’envie de poursuivre l’expérience de confrontation de techniques, d’idées et de genres, en allouant un mur par artiste.
Que ces murs se fassent échos, se répondent, nous interpellent, chuchotent, murmurent.
Que ces murs discutent entre eux, proposent des espaces de repos, des espaces de réflexion, des espaces ludiques. Qu’ils nous renvoient à nos questionnements intimes, troublent nos certitudes, qu’ils deviennent autant de zones de découvertes et d’interrogations sur le travail des artistes, leurs techniques.
La circulation dans l’espace de la galerie facilitera les effets de surprise (l’exposition se répartit sur 3 étages) :
Au rez-de-chaussée Patrick Sirot réalisera un dessin mural : traces de crayons répétitives qui font sortir du mur des scènes insolites parfois, comme ce fut le cas au musée de Toulon. Nous pourrons assister à un véritable lâcher d’animaux fixant le visiteur qui franchit le pas de la porte.
Côté gauche, Claire Dantzer organisera son espace par des reflets, une œuvre qui s’efface ou se transforme en fonction de nos déplacements.
En face, Claudie Dadu accumulera des sous verres de formats différents, formant un nuage silencieux de dessins réalisés avec ses cheveux.
Au 1er étage, Gilles Miquelis recréera un mur de son atelier où sont présentés différentes esquisses, croquis crayonnés, ébauches, travail de réflexion qui lui permettent d’affirmer l’œuvre définitive.
En face, Silvia Cabezas Pizarro lui répondra par une suite de dessins (non encadrés), fixés légèrement détachés du mur pour lui permettre de poursuivre un tracé discret directement sur celui-ci, une installation délicate, sensible, douce et silencieuse.
Au 2e étage nos deux galeristes invitées ont choisi le silence, le murmure pour occuper leur espace .
À l’extérieur, aux N°54 et 56 Grand’ rue (nos voisins) les murs accueilleront Bertrand Gadenne et ses vidéos visibles la nuit tombée.
Source : http://www.galeriemartagon.com/gale...
Photo de Une : © DR