- Frédérique Nalbandian, Jacqueline Gainon - Photo courtesy Galerie Eva Vautier
Jacqueline Gainon
Ainsi soit-il
C’est autour du dilemme entre l’image et la peinture, entre la mémoire et le fantasme,
entre les bonnes manières et les jeux interdits que s’articule cette exposition de
Jacqueline Gainon.
- Jacqueline Gainon Sans titre, 2013 huile sur toile 190 x 150 cm - Droits réservés Courtesy Galerie Eva Vautier
Placées sous le signe de la couleur, deux séries de grandes peintures bleues et rouges s’affrontent ici dans des registres opposés. Exécutée dans un style naïf presque léché, la série bleue fait appel aux souvenirs d’enfance de l’artiste : elle repose sur une libre interprétation de photographies d’excursions dans l’arrière pays niçois. Elle donne à voir d’étranges portraits incroyablement paisibles dans lesquels l’artiste encore petite fille et les membres de sa famille semblent endormis et comme étrangers les uns aux autres. Quant à la série rouge, infiniment plus gestuelle et expressionniste, elle met en scène un huis-clos inquiétant dans lequel une jeune fille vêtue d’une robe rouge devient la proie d’un groupe de garçons armés de battes mais encore en culottes courtes. Entre sévices et jeux érotiques, ces scènes cauchemardesques viennent contrecarrer l’imagerie d’Épinal de la série bleue et tout ce qu’elle pouvait énoncer de rassurant et d’idéal sur la notion de famille mais aussi et surtout sur l’idée de peinture.
- Jacqueline Gainon Sans titre, 2014 huile sur toile 146 x 114 cm -Droits réservés Courtesy Galerie Eva Vautier
Catherine Macchi
Frédérique Nalbandian
Frédérique Nalbandian est diplômée de l’École Pilote Internationale d’Arts et de Recherches, Villa Arson, Nice. Depuis ces années passées à expérimenter des formes en devenir, elle raffine sa science des matériaux et son intérêt pour la vaste et troublante question de l’écoulement du temps. Le savon occupe toujours une place prépondérante dans son travail de sculptrice, mais aussi le plâtre et le verre. Au gré des occasions, ces substances se chargent d’eau, d’air, de pigment rouge carmin et de poudre de charbon, s’en laissent imprégner et même meurtrir. Des échanges chimiques s’opèrent donc à l’évidence dans des installations qui épousent les lois de paysages en friche ou dialoguent avec des espaces architecturaux chargés de sens.
- Frédérique Nalba - Périples, Carros 6-01-13, Nice 1-09-14, 2012-2012, savon, marbre, pièce évolutive 200 x 64 x 42 cm - Droits réservés Courtesy Galerie Eva Vautier
Dans ces travaux d’où émergent autant de volumes en équilibre que de structures
« intranquilles », l’artiste décline des motifs tels que le cercle et la colonne. Dans d’autres réalisations qui disent quelque chose du rapport de l’homme au monde, il s’agit de l’oreille et de l’entente, de mains en prière et de quasi-silence. Ici, des réceptacles avec leurs larges surfaces de vibrations, là, des concrétions faites de plis et de méandres comme ceux du cerveau par exemple. Indéniablement, ces oeuvres, de par leur force répétitive et leur pouvoir d’intégration de signes langagiers — il faut écouter les titres que l’artiste attribue à ses oeuvres —, imposent l’idée d’une quête entée sur le poétique et hantée par ce qui en fait le prodige : l’éclosion du sens, sa possible déhiscence, sans le recours à l’argumentation ou au moindre système dialectique.
- Frédérique Nabaldian « Capacité », 2014 verre, plâtre 14 x 7 cm - Droits réservés Courtesy Eva Vautier
Enfin, il faut dire que Frédérique Nalbandian exécute nombre de dessins où surgit avec plus ou moins de netteté sur le papier, un tissage entre références à l’histoire de l’art et imprécis d’anatomie. Une partition, pourrait on dire, entre ce qui relèverait du désir de décrire le tournoiement du ciel et celui de remettre l’homme au centre du système ...
Ondine Bréaud-Holland