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Angelin Preljocaj, chorégraphe heureux

Angelin Preljocaj, chorégraphe réclamé dans le monde entier, était à Mougins la semaine dernière. La scène 55 a présenté son ballet « Gravité » créé en 2018. Nous l’avons rencontré quelques minutes avant le spectacle, dont les treize interprètes furent au final puissamment applaudis. Le chorégraphe aixois consacra un peu de son temps à la fin de la représentation pour s’entretenir avec le public.

En même temps que « Gravité », en passe de devenir un classique comme sa version contemporaine de « Roméo et Juliette », les projets artistiques d’Angelin se multiplient. La Scala de Milan lui commande « Wintereise » sur la musique de Schubert, Londres a vu sa « Fresque poétique », et l’opéra Garnier présente « Le Parc » sur une musique de Mozart.

Photo courtoisie Preljocaj

Soul Kitchen, son film tourné à la suite d’ateliers de danse à la prison des Baumettes, est projeté partout. Cette rencontre entre la danse et le cinéma n’est pas nouvelle, mais c’est la première fois en milieu carcéral. Le cinéma le passionne :« des expériences à renouveler ».
Le chorégraphe parle facilement avec beaucoup de simplicité :« je m’attelle à présent au Lac des Cygnes, une version contemporaine bien entendu, novatrice cela ce conçoit. C’est un monument. Affronter ce Lac est un risque de plus à prendre. Ce danger, je le ressens à chaque fois, on sait qu’on peut toujours se tromper, cela oblige à rester exigeant ».
On sent que le travail l’intéresse davantage que la notoriété  :« je suis un chorégraphe heureux  ». A Aix-en-Provence où il est installé depuis 2006, son Pavillon Noir est un bel outil. Il cite volontiers son architecte, et n’est pas avare de qualificatifs :« ce lieu dessiné par Rudy Ricciotti est merveilleux. Je travaille avec une équipe formidable, techniciens et danseurs compris. Dans ce monde mercantile, disposer d’un endroit entièrement dédié à la danse est une grande chance ».

Photo courtoisie Preljocaj

Une chance aussi pour les Mouginois et pour les spectateurs de tout le département que d’avoir pu assister à « Gravité ».

Une boucle de huit tableaux qui s’enchaînent avec une parfaite fluidité, où le final lumineux est dansé sur le fameux Boléro de Ravel.

Il se présente comme un « ressouvenir » de la ténébreuse ouverture.
La gravité, « c’est ce avec quoi on s’affronte dès qu’on se lève, et dont on essaie de s’affranchir dans la danse. Ce pourquoi les danseuses se portent sur les pointes le plus haut possible. Dans la danse contemporaine, la gravité est un partenaire et un désir d’émancipation. Dans ce ballet, la gravité change au fil des tableaux. Elle s’appuie sur une texture sonore particulière ». Autrement dit sur des styles musicaux aussi différents que ceux composés par Ravel, Bach, ou les musiciens technos. Même sur le silence et les sons naturels. On pense à Merce Cunnigham avec qui Angelin avait travaillé jadis : « Ce chorégraphe, moins connu du grand public en France que Pina Baush, a pourtant laissé un héritage immense. Il a modifié les paramètres de l’espace et du temps, il a libéré la danse de son assujettissement à la musique ».

Photo de Une et de l’article courtoisie Preljocaj

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