Une des nouvelles chansons de cet album dit que « La vie est une menteuse », mais Cali, lui, ne ment pas. Voilà un album de sève, de sourires, de rocs, de rêve, d’amour qu’on veut sentir couler en soi.
Douze chansons qui frappent tour à tour le cœur, le bonheur, les heures qu’on croyait oubliées dans le grand chapiteau de l’enfance. Un passé conjugué au fil du disque au moment présent.
On en crèverait de larmes de joie, tant ici s’emmêlent et s’égarent l’une dans l’autre, dans un tourbillon aussi délicat et animal qu’une chaîne d’ADN, la vie d’avant, et la vie, maintenant.
« La vie quoi ! » lance justement Cali sur ce single euphorique et d’une énergie toute vitaliste qui exhorte chacun à un bonheur immédiat.
Le rockeur qu’on connaît si engagé, ce troubadour qui souffle des flammes de liesse sur son public depuis maintenant plus de vingt ans, a chapitré son existence d’un « Age d’or ».
- Cali - photo Yann Orhan
Et c’est vrai : il ouvre ici ses ailes. En mots. En musique. En confidence. Avec une puissance nouvelle : celle d’un homme ébloui par la vie, tirant de son expérience une force et une joie pures.
Ici, c’est la découverte d’un Cali solaire. Parfois accompagné d’un simple piano bastringue ou d’un fifre comme dans un bal populaire, parfois bondissant dans une pop électrifiée. Cali est joueur et nous embarque pour un disque comme un album-concept sur tous ces âges heureux de nos existences, et sur ce qui au final reste, et parfois manque.
Ses textes, si intimes, ricochent sur Prévert, Apollinaire ou Brel. Le féminin abonde toujours dans ses mots, mais prend des visages inattendus. « Ostende », la
ville-amante, qui sonne déjà comme un classique en lettres d’argent dans la grande tradition de la chanson française.
Ou deux prénoms presque baroques qui se font face à face : sa fille « Poppée », tête blonde, qui surgit comme une brise douce, suspendue au filin transparent d’un piano fantôme.
Et « Coco », la tête brune, fille aînée du chanteur, qui prête sa voix à son père pour un duo. Complices comme « deux gangsters ».
C’est racé. Et pourtant d’une brutalité intacte. Comme si les battements de son cœur n’étaient jamais tout à fait apaisés. Son volcan se joue de nous. Et explose de temps à autre, comme avec Jimmie O’Neill, le chanteur écossais des mythiques Silencers, qui pose sa voix rugueuse dans « Le grand chemin ».
Cali chante comme il vit, sans mensonge et sans artifice.
L’élégance et l’émotion, égrenées tout au long du disque, naissent aussi d’une fusion : celle du chanteur avec David François Moreau, compositeur de musique de film et de ballet, et réalisateur, musicien et arrangeur de « L’Age d’or ».
Un alliage de leurs cultures musicales qui leur a permis de composer ensemble et de sculpter certaines des mélodies, lisibles et claires comme des ritournelles passées. Des mélodies qui revêtent tour à tour des harmonies pleines de force, d’audace et de tendresse. Les instruments et les contrechants sont comme des boomerangs qui reviennent résonner contre les mots et font flancher le cœur de tant d’inattendu.
L’espace musical tourne autour de la voix.
Et soudain, dans « Poppée in utero », le voyage sombre dans un rêve sans parole.
Une comète musicale libre et fulgurante, à la manière de Luciano Berio, remplie de matières sonores enlacées par David François Moreau, dont on reconnaît là particulièrement son travail pour la danse contemporaine.
Enfin, il y a toujours chez Cali un autre artisan secret qui veille, Léo Ferré.
La reprise de « L’âge d’or » clôt évidemment le tout. La boucle se boucle d’elle-même.
Et Cali Récolte ses moissons d’été.