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Viva la liberta

Film de Roberto Ando, en salles depuis le 5 février 2014

Pressentant un déclin annoncé par les sondages et souhaité par son propre parti, un leader de gauche (Toni Servillo) en a marre de lui-même, des autres et de tout ce qui l’entoure. Aussi décide-t-il de quitter l’Italie pour aller se cacher à Paris chez un amour de jeunesse (Valeria Bruni-Tedeschi). Dans l’état de désarroi total qui s’ensuit, son bras droit (Valerio Mastandrea), tentant de dissimuler cette fuite à tous les agités du portable qui le harcèlent, le remplace par son frère jumeau, un écrivain philosophe plutôt « malade du chapeau » et habitué des hôpitaux psychiatriques. Cette idée rocambolesque va s’avérer une réussite.

Ce « remplaçant » (également interprété par Toni Servillo) fait un discours quelque peu « allumé » qui enflamme la foule, enthousiasmée par le ton qui change du ronron habituel et par les mots dénonçant les promesses mensongères.
Ce personnage ébréché, comme vacant de lui-même et imprévisible en permanence, ne cesse de rallier la foule, en clamant les sursauts nécessaires. Il fait rêver ! Les sondages remontent en flèche devant l’honnêteté et la passion exprimées et le parti peut continuer de faire croire aux militants que tout va bien.

Cette comédie est très drôle et dénonce sans ambiguïté la mascarade du monde de la politique politicienne. Elle suit les deux jumeaux : l’un à Paris où il s’est recyclé momentanément dans le cinéma pour lequel travaille son ex, l’autre à Rome où il se prend au jeu d’être acclamé par la foule à la place de ce frère qu’il ne voyait plus depuis vingt-cinq ans. Toni Servillo est épatant dans ce double rôle, passant de l’un à l’autre dans une totale évidence pour le spectateur. L’un recroquevillé sur lui face à ses échecs, l’autre amusé et regaillardi par l’insolite de la situation pour laquelle on le sollicite.

Ce film, assorti au désordre de la politique de Berlusconi et au dégoût de l’obscurantisme du pouvoir, ne pouvait qu’être italien. Il est sorti de l’autre côté des Alpes, peu avant les élections de 2013, laissant dans l’expectative de nombreux votants déjà guère convaincus !

En Italie, comme ailleurs, la politique tient une place complexe très ramifiée, gagnée par la corruption. Roberto Ando a d’abord écrit un roman « Le Trône vide » dont il a tiré ce film réalisé par lui-même. Faisant au passage l’éloge de la folie, c’est malicieusement qu’il critique la difficulté pour le principal parti d’opposition de s’insérer dans la politique à l’italienne. Dommage que les séquences qui se passent à Paris soient un peu faibles et cassent le rythme de cette satire amusante. Voilà un cinéma italien plein d’ironie, tel qu’on l’aime !

Photo de Une : Affiche du film © Bellissima Films

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