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Anna, de Jacques Toulemonde Vidal

Dans le cadre des Rencontres Cinématographiques de Cannes qui ont eu lieu du 11 au 17 décembre 2016, Art Côte d’Azur a particulièrement suivi pour vous le "Panorama des Festivals", une sélection, effectuée par Pierre de Gardebosc, de huit longs métrages internationaux, en avant-première : nous vous invitons à découvrir ces œuvres qui ont été récompensées dans d’autres festivals en France et à l’étranger. Cette sélection est une belle opportunité de se confronter au « goût des autres » et nous sommes heureux de partager avec vous ces regards d’ailleurs qui étendent nos horizons. Après vous avoir présenté "The Birth of the Nation" et "Tempête de sable", nous poursuivons avec "Anna", primé au « Colombian film festival » 2016.

Ce film franco colombien suit le périple d’une femme, souffrant d’un dédoublement de personnalité, de la France à la Colombie par amour pour son enfant.

Anna, séparée de son ex-mari, voue un amour exclusif et possessif pour son fils Nathan ; elle souhaiterait en avoir la garde mais son ex-mari la jugeant irresponsable et naïve de par sa fragilité psychologique, se refuse à lui laisser leur fils. Anna décide donc de retourner en Colombie sur un coup de tête embarquant avec elle son petit ami Bruno et son fils Nathan. Celui-ci réticent au départ et privé de ses repères quotidiens se laisse convaincre du bien-fondé de leur entreprise.

Tout au long du film, Anna s’attelle à sa tâche de mère idéale ; telle une enfant elle embarque ses amours vers le chemin de l’insouciance ; mais elle vit aussi avec l’angoisse permanente de perdre son fils. Son identité franco-colombienne illustre bien sa nature ambivalente.

Mais en Colombie la réalité socio-économique est tout autre et la difficulté permanente ; pourtant, sous fond de cumbia, le peuple colombien montre une solidarité et un soutien qui n’existe pas en France.

Ce Road movie est stressant du début à la fin ; le spectateur s’attend au pire à chaque instant ; un incident fâcheux peut vite arriver.

Le film suit le point de vue des 3 personnages : celui d’Anna en proie avec ses démons et sa perception de la vie, celui de de Bruno son compagnon qui se révèle petit à petit comme celui qui comprend le mieux Anna et qui sait comment l’apaiser ; enfin, celui de Nathan, son fils, qui voit sa mère sous un visage différent, ce qui va lui permettre de grandir.

Le réalisateur pose la question de la réaction à adopter avec des personnages comme Anna.

Faut-il la priver de son fils ? Jusqu’où peut-on aller pour préserver le bonheur de l’enfant ? L’amour excessif n’est-il pas aussi une prison qui prive l’enfant de son épanouissement personnel ? Jusqu’à quel point peut-on priver un enfant d’un de ses parents ? De quel droit peut-on juger un parent, sachant que l’éducation parfaite n’existe pas ?

Le réalisateur nous amène à réfléchir sur ces sujets pas toujours faciles à aborder mais nous laisse le libre arbitre de notre décision.

Anna NOTE D’INTENTION de Jacques Toulemonde Vidal

"Anna est un film sur la maternité et sur l’identité ; un film qui explore des thématiques proches de celles du cinéma américain des années soixante dix.
Comme dans L’épouvantail de Jerry Schatzberg, A Dog Day Afternoon de Sidney Lumet ou Macadam à deux voies de Monte Hellman, Anna décrit le parcours de personnages marginaux, aux réactions extrêmes, parfois irrationnelles, des personnages qui tentent de trouver leur salut au sein d’une société incompréhensive et aliénante. Ils poursuivent des rêves illusoires et chimériques impossibles à accomplir. Anna est un film sur l’obsession d’être comme les autres et sur l’angoisse de ne pas y parvenir. Cette histoire m’est très personnelle. Ceux qui ont vécu autour de personnes comme Anna, connaissent la complexité des relations que l’on tisse avec elles, la difficulté d’affronter les situations dans lesquelles elles se plongent.
Anna est instable, bien-sûr, mais c’est aussi une mère. Une mère merveilleuse qui peut être dangereuse pour son entourage et pour elle-même. La question qui traverse ce film est : que faire avec les personnes comme Anna ? Les supporter stoïquement ? Les oublier ou les enfermer dans des hôpitaux ? Je ne sais pas si ce film trouve une réponse claire et concrète, mais il a le mérite de nous obliger à nous poser ces questions. Anna décrit également un voyage entre la France et la Colombie. Comme mon personnage principal et comme le film, j’ai toujours été partagé entre ces deux pays. Je suis né au sein d’une famille française en Colombie, et j’ai toujours été considéré comme un étranger tant à Bogotá qu’à Paris. Le motif du road-movie dans ce film me permet de décrire différents endroits où j’ai vécu et de les montrer du point de vue de l’étranger, à travers Anna en France et Bruno en Colombie. De cette manière, la description de chaque décor que traversent les personnages acquiert une certaine nouveauté, partagée par le spectateur et par les personnages.
Pour moi, la justesse et la force du jeu des comédiens est la première priorité. A travers des essais et des improvisations avec les acteurs professionnels et non professionnels, nous avons essayé d’abolir la frontière entre personnes et personnages. L’objectif a été d’obtenir un niveau de jeu juste et réaliste, intense, voir même légèrement exagéré étant donnée la nature extrême et changeante des personnages. La caméra a été à leur merci, elle s’est livrée à une chorégraphie harmonieuse et complémentaire à la leur, et a essayé de saisir une réalité qui manque toujours de lui échapper. Une réalité qui permettra au spectateur de sombrer dans le même tourbillon d’émotions que traversent les personnages, de participer à leur voyage".

(Date de sortie en France non connue à ce jour)

Les Rencontres Cinématographiques de Cannes sont organisées dans le cadre de la manifestation Les Rencontres de Cannes. Créées sous l’impulsion de David Lisnard, Maire de Cannes, les Rencontres de Cannes proposent plusieurs disciplines : les Rencontres Littéraires, les Rencontres Débats et les Rencontres Cinématographiques.

Artiste(s)

Jacques TOULEMONDE

Jacques Toulemonde, grandit à Bogotá au sein d’une famille francocolombienne, avant de partir en France en août 2001. A Paris, il s’inscrit en Lettres Modernes à la Sorbonne. Il travaille ensuite pendant dix ans comme premier assistant réalisateur sur plusieurs long-métrages tels que : Los Viajes del (...)

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