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Fin de cet événement Novembre 2015 - Date du 28 octobre 2015 au 28 novembre 2015

Le fils de Saul (Son of Saul)

Chaos

Première réalisation magistrale d’un jeune cinéaste hongrois élevé en France dénommé Làszlo Nemes, "Le fils de Saul" était le Grand Film de la sélection cannoise 2015.

Prenant pour sujet l’Holocauste et pour cadre l’enfer d’Auschwitz au mois d’octobre 1944, Làszlo Nemes raconte deux jours dans la vie de Saul Ausländer, Sonderkommando au camp de la mort (c’est à dire membre de ce groupe de prisonniers juifs, isolés du reste du camp et qui étaient obligés d’assister les nazis dans leur plan d’extermination de leurs coreligionnaires) qui, en découvrant dans un crématorium le cadavre d’un garçon dans les traits duquel il croit reconnaître son fils, va s’entêter, jusqu’à l’absurde, à lui faire donner une sépulture et faire prononcer par un rabbin "le kaddish" (la prière aux morts).

Alors que tant de films ont relaté l’horreur de la Shoah, avec plus ou moins de réussite, parfois sous forme documentaire ("Nuit et Brouillard" d’Alain Resnais, "Le Chagrin et la pitié" de Marcel Ophùls, "Shoah" de Jacques Lanzmann), parfois sous forme conventionnelle ("Holocauste" de Marvin Chomsky, "La liste de Schindler" de Steven Spielberg), "Le fils de Saul" renouvelle avec brio l’archaïque représentation de la barbarie nazie au cinéma, trop souvent romancée ou didactique et toujours perçue comme un système infailliblement organisé.

Il propose ainsi aux spectateurs d’adopter le point de vue subjectif de son protagoniste principal, Saul (interprété par l’acteur Geza Röhrig) et de découvrir ; grâce à une utilisation originale du hors champ, l’enfer à tâtons, à portée de voix, à portée d’oeil myope.

Filmé en format 35mm et donc en cadrage serré, "Le fils de Saul" distille dès les premières images, un malaise lancinant qui est, au final, la seule forme adaptée à la narration d’une telle abomination, l’horreur naissant non pas de l’explication ou de la vision explicite de millions de Juifs exterminés mais de l’atmosphère électrique et chaotique qui vous imprègne progressivement jusqu’au bout de ce film insoutenable et fascinant à la fois.

Le spectateur est hypnotiquement et personnellement plongé dans l’enfer des ténèbres des chambres à gaz où seuls règnent la Mort et le Chaos et, quels que soient ses préjugés, il ne peut ressortir indemne et sceptique d’un tel voyage au bout de l’enfer.

A voir impérativement.

Grand Prix du Jury Cannes 2015

Sortie en salles le 4 novembre prochain

Photo de Une : © Ad Vitam

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