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Fin de cet événement Novembre 2015 - Date du 7 octobre 2015 au 7 novembre 2015

Fatima

Un film de Philippe Faucon

Sortie en salles le 8 octobre 2015

Trois ans après « La Désintégration » qui analysait la fabrique de terroristes et la radicalisation religieuse, Philippe faucon est de retour avec « Fatima ». Ayant passé une partie de son enfance au Maroc et en Algérie, le réalisateur a toujours attaqué frontalement les préjugés dont souffrent les communautés d’origine maghrébine.

Fatima vit seule avec ses deux filles, l’une réussit à devenir étudiante en médecine, l’autre, à la langue bien pendue, est en révolte contre tout. Pour cette minette survoltée, avoir honte de sa mère va de pair avec ses rêves d’ascension sociale. Afin de les élever au mieux et avec l’espoir qu’elles auront une vie meilleure qu’elle-même, cette mère originaire du Maroc fait des ménages la nuit dans des bureaux et le jour chez une bourgeoise qui l’humilie malgré (ou avec !) sa gentillesse affectée. Fatima maîtrise mal le français, d’où une frustration dans ses rapports avec ses filles qui sont, tout à la fois, sa fierté et son inquiétude. Pour communiquer avec elles, elle prend des cours d’alphabétisation et se met à écrire ses mémoires en arabe pour trouver les mots qu’elle n’a jamais pu leur dire. Pour cela, il aura fallu une chute dans un escalier l’immobilisant un certain temps.

Quoi qu’ignorante de psychanalyse, elle comprend qu’elle en a « plein le dos », quand elle a mal au dos et que les médecins ne peuvent donner de diagnostic. De même qu’elle sait que travailler dur empêche de penser. Mais, quel que soit son discernement, sa condition d’immigrée, de femme voilée sans instruction, ne lui donne accès qu’à des boulots pénibles, peu considérés et à des vexations (racistes) quotidiennes.

La lecture de « Prière à la lune », un recueil de poèmes, de pensées et de fragments autobiographiques que Fatima Elayoubi a publié en 2008, a offert à Philippe Faucon la matière de son nouveau film. Cette française d’origine marocaine, qui ne maîtrisait pas la langue à son arrivée en 1983, explique avoir trouvé dans l’écriture une façon de se libérer, d’exister aux yeux des autres.

Pour l’interpréter, le cinéaste a fait confiance à une comédienne non professionnelle découverte à Lyon où le film a été tourné. En acceptant ce rôle, Soria Zeroual a voulu être le porte-voix de toutes les Fatima. Dans une situation proche du personnage qu’elle incarne, elle gagne elle aussi sa vie en faisant des ménages dans des bureaux. Sans doute, est-ce pour cela qu’elle est aussi authentique et touchante dans ce rôle qui l’interpelle. Pour jouer ses filles, elle est entourée d’excellentes comédiennes issues du théâtre, Zita Hanrot et Kenza Noah Aïche. Etant sans tête d’affiche et avec un scénario si peu « bétonné » au départ, le film a, évidemment, eu bien du mal à trouver un financement. Il faut d’autant plus louer sa réussite et le fait d’aborder un sujet – toujours d’actualité - sans sentimentalisme racoleur.

Lors de sa présentation au dernier Festival de Cannes, dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs, le public a fait une longue ovation à la fin de la projection de « Fatima », et l’auteure comme les comédiennes et le réalisateur n’ont pu retenir leurs larmes. L’émotion était également à son maximum parmi les spectateurs totalement convaincus par ce film si attachant !

Photo de Une : © Droits réservés

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