| Retour

ARDOISE LITTERAIRE : Lunes en papier - Par Jean-Jacques Ninon pour Art Côte d’Azur

Lunes en papier, André Malraux, 1921

Au sortir de la Grande Guerre, le jeune André Malraux (1901-1976) qui n’a pas réussi à décrocher son baccalauréat, fréquente artistes et gens de lettres : Léger, Derain, Picasso, Chagall, Dufy, Gromaire, François Mauriac, Paul Eluard, Blaise Cendrars, Raymond Radiguet, Jean Cocteau, Louis Aragon, Max Jacob, Tristan Tzara, apôtre du mouvement Dada. Il se met aussi à écrire. Dans « La Connaissance » de janvier1920, où il s’apparente à ces « jeunes gens peu désireux de publier des poèmes flasques (mais couronnables), fanfreluches de gloses mirobolantes » qui « partirent à la recherche d’un artiste capable de produire une œuvre dont une esthétique nouvelle pût s’extirper sans plagiat ".

Or, il a décelé cet avant-gardiste en Max Jacob. Quand il rencontre Clara Goldschmidt, quelques mois après, il lui susurre, en guise de déclaration d’amour : " Je ne connais qu’une personne qui soit aussi intelligente que vous : Max Jacob ". Celui-ci l’a présenté au prestigieux marchand de tableaux Daniel-Henry Kahnweiller qui l’a embauché comme éditeur à la galerie Simon.

Pas étonnant alors que l’année suivante, en 1921, il y publie son premier livre, Les Lunes en papier dédicacé à Max Jacob, et épouse Clara, le 21 octobre, non sans s’être mutuellement promis de se séparer au bout de six mois (le couple ne se séparera qu’en 1937 et ne divorcera que dix ans plus tard).

Ce petit roman poétique est un voyage insolite, cosmique, au terme duquel les péchés tuent la mort, une déesse, au « Royaume Farfelu », et en oublient la raison. La fable métaphysique est illustrée par des gravures sur bois de Fernand Léger, ce qui en fait un ouvrage pour bibliophiles.
Si plus tard, Malraux avouera, en 1967 : " J’ai écrit Lunes en papier à vingt ans : une gloire de café ", il rappellera dans ses Antimémoires, avoir – involontairement – remis à jour le mot « farfelu ». C’est en effet dans ses Lunes en papier qu’il réapparaît pour la première fois au XXe siècle. Commençait également une aventure tout aussi farfelue, bizarre, chaotique, fantasque. Première pierre d’un destin sorti de l’imagination de l’autodidacte.

Malraux qui aimait les masques, les énigmes, créa son propre mythe. Normal pour un grand mythomane, si l’on en croit Olivier Todd (« André Malraux. Une vie »). Dandy de grand chemin, un de ses émules, François-Marie Banier, photographe et littérateur, tentera de marcher dans ses premiers pas. Pas avec le même succès. Sinon financier. Il n’est d’ailleurs pas farfelu de distinguer sur le cliché de la manifestation de soutien au général de Gaulle, le 30 mai 1968, l’éphèbe Banier, juste derrière le ministre Malraux. Tous deux réclamant le retour à l’ordre.

Retrouver la biographie de l’artiste Jean-Jacques Ninon et toutes ses créations en cliquant ici

J-J Ninon expose en permanence à la Galerie Ferrero à Nice

Artiste(s)