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CHAPITRE 47 (part I) : Bernard Reyboz, véritable démonstration du vivant.

Cette semaine la chronique de France Delville est dédiée à Bernard Reyboz...

« Sans titre » s’intitule l’exposition de Bernard Reyboz au CIAC (Centre international d’Art Contemporain, Château de Carros), du 3 mars au 10 juin 2012. Dans l’une des salles, face à des « Monolithes bleus », une phrase de lui est inscrite sur le mur : « La vie existe, je l’ai vue, j’y étais ». Dans l’interview que je lui avais faite en 2009 il avait, à un moment, déclaré : « La mort et moi, nous n’avons pas les mêmes valeurs ». Cet homme était perclus d’humour. L’humour, c’est plus que sérieux, bien sûr. Il va nous manquer, il nous manque déjà cruellement. Né en 1951, il nous a donc quittés peu avant sa somptueuse exposition du CIAC, après l’avoir conçue avec l’équipe.

Vernissage de l’exposition Bernard Reyboz au Ciac 3 mars 2012
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La même équipe qui annonce ainsi l’exposition : « Dans la rigueur du noir et du blanc, dans l’exubérance des mondes parallèles et nouveaux imaginés par l’artiste, dans la plénitude des formes et des matières, cette présentation à grande échelle des œuvres de Bernard Reyboz dépasse par sa signification toute approche analytique ou descriptive, forcément restrictive. « Sans titre », ainsi qu’il désignait lui-même nombre de ses créations, nous a donc semblé une dénomination adaptée à ce projet. Sans titre également parce que les circonstances particulières dans lesquelles est intervenue sa réalisation nous ont tous un peu laissés sans voix…

Vernissage
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Bernard nous a quittés le 4 Janvier dans son atelier d’Antibes. Il travaillait sur la conception et le contenu de cette exposition, événement dont il mesurait l’importance et pour lequel il avait opéré des choix précis, installant un dialogue unique entre les œuvres ou les séquences de travail sélectionnées et le centre d’art qu’il connaissait bien. Sans titre et sans voix, mais avec toute la force de l’admiration et l’enthousiasme que procurent les grandes aventures, nous sommes heureux de pouvoir aujourd’hui mettre en lumière, dans les espaces du château de Carros, ce qui restera sans doute dans l’histoire des rapports entre l’œil et le réel comme l’une des plus prodigieuses épopées de la forme menées au cours des dernières décennies. Le travail de Bernard Reyboz force à appréhender le monde autrement. Formes souvent très simples, ses objets rappellent sans cesse l’origine tellurique de la matière et sa puissance évocatrice. Chaque période de son travail porte en elle l’histoire de la précédente, installant une sorte de filiation imaginaire entre chaque objet. Des Textures aux Champs de percussion, des Chrysalides aux Tripodes, des Galets et autres Monolithes jusqu’aux Magmas et aux Mouvants, l’univers de Bernard Reyboz offre au regardeur un chaos qui parle d’harmonie. Le mouvement, thème subtilement abordé dans les travaux jouant d’effets visuels, devient central dans les dernières œuvres de l’artiste. Véritable démonstration du vivant, la série des Mouvants met en scène le mystère de la création et inscrit encore davantage les œuvres de Reyboz dans le temps. »

Vernissage
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Et dans la plaquette (réalisée par stArt), Frédérik Brandi, directeur du CIAC, signe ce texte : « Cette présentation à grande échelle des œuvres de Bernard Reyboz (1951 2012) a été conçue en étroite collaboration avec l’artiste, peu avant sa disparition. Pour cette exposition il avait opéré des choix précis, installant un dialogue unique entre les œuvres ou les séquences de travail sélectionnées et ce lieu qu’il connaissait bien. Dans les espaces du château de Carros se déploie aujourd’hui ce qui restera sans doute, dans l’histoire des rapports entre l’œil et le réel, comme l’une des plus prodigieuses épopées de la forme menées au cours des dernières décennies. Dans la rigueur du noir et du blanc, dans l’exubérance des mondes parallèles et nouveaux imaginés par l’artiste, dans la plénitude des formes et des matières, le travail de Bernard Reyboz force à appréhender le monde autrement. Formes souvent très simples, ses objets rappellent sans cesse l’origine tellurique de la matière et sa puissance évocatrice. Chaque période de son travail porte en elle l’histoire de la précédente, installant une sorte de filiation imaginaire entre chaque objet. Des Textures aux Champs de percussions, des Chrysalides aux Tripodes, des Galets et autres Monolithes jusqu’aux Magmas et aux Mouvants, l’univers de Bernard Reyboz offre au regardeur « un chaos qui parle d’harmonie ». (Frédérik Brandi)

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Bernard Reyboz est né à Lyon en 1951. Après des études aux Beaux-arts de Besançon puis aux Arts déco de Nice (Villa Arson), il lance sa carrière professionnelle dans l’univers de l’illustration, de la publicité et de l’édition, collaborant notamment à Fluide glacial. À partir des années 80 il décide de se consacrer principalement à son travail de création artistique. Il expose alors à Nice, Tokyo, Paris, Pusan, tout en poursuivant ses recherches personnelles. Les séquences qu’il élabore sont autant d’univers singuliers, reliées entre elles par des préoccupations essentielles, exploration de la matière, invention de formes, jeux visuels et exaltation de la vie. En 2009 paraît le monumental « Catalogue raisonné » (collection artstoarts) documentant les vingt dernières années de production et de création. À l’aube d’une gloire annoncée, Bernard Reyboz est mort le 4 janvier 2012 à Antibes, où il avait installé son atelier. Il venait d’avoir 60 ans. (Biographie établie par le CIAC)

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L’œuvre de Bernard Reyboz témoigne d’une vision plastique très intense des choses du monde, de leurs liens, de leurs valeurs, de leurs jeux, et servie par une rare virtuosité. Les matières sont associées en de nouveaux objets à la fois énigmatiques et révélateurs. Œuvre de vie, œuvre sur la vie, son œuvre est vraiment une véritable démonstration du vivant. Oui, « la vie existe, il l’a vue, il y était », et il était bien présent dans l’exposition, grâce aussi à sa parole, inscrite sur les murs, sous la forme de quelques-uns de ses textes, que voici :

Accompagnant les Textures :

Ma première tâche fut de mettre au point une technique qui me permettait de produire cette matière virtuelle. Le papier et le métal en feuilles se prêtèrent à cette réalisation. J’inscrivis sur ces feuilles des signes et autres graphismes que je découpais, assemblais et superposais à d’autres feuilles habillées des mêmes signes jusqu’à obtenir une trame homogène, une surface de pleins et de vides confondus dans la même vibration graphique. Ma « matière » prenait corps, le résultat et la technique adoptée me donnant satisfaction, je pouvais alors opérer avec cette « matière » de nouvelles situations. Soit l’exalter, soit la ramener à un minimum d’existence pour ne conserver d’elle que sa pénétrabilité, une pénétrabilité suffisante pour que je puisse couler en elle d’autres signes.

A suivre…

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