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Un village-musée à ciel ouvert

« Dans un monde difficile, la culture est une nécessité : les grandes initiatives culturelles du Conseil Général - soirées estivales, 06 en scène, création du musée des arts asiatiques (qui connait un grand succès) … - c’est moi ! ». A 74 ans, le « docteur Frère » semble heureux de vivre et content de son sort. Maire depuis 1983, vice-président du conseil général chargé de la culture depuis 15 ans, il a une personnalité généreuse et passionnée qui « aime faire plaisir aux gens, donner du bonheur ».

C’est dans ce but qu’il « travaille comme un fou », pour faire de Tourrette Levens une »ville culturelle ». Car pour lui, la culture prime sur tout.
La preuve, il a embauché récemment une attachée culturelle en la personne de Claire Japhet … Ce qui est en effet exceptionnel pour une population de moins de 5000 habitants.
Sans négliger le riche patrimoine existant - vieux village perché médiéval, château et chapelle du 11ème, église du 12ème, musée des métiers traditionnels (6000 outils anciens) et même musée d’histoire naturelle (4000 papillons et insectes du monde entier) - Alain Frère a tenu à se tourner aussi vers l’art d’aujourd’hui : « je suis l’ami des artistes et ils me le rendent bien … »
En offrant des oeuvres à la commune, comme Max Cartier, résident tourrettan, avec son « homme de pierre » qui trône sur un rond-point à l’entrée du village.

Alain Frère devant une oeuvre de Ben "Et surtout n’oubliez pas de vous aimer...", salle culturelle des mariages de la Mairie- photo © jch dusanter

La ville peut s’enorgueillir également de sculptures de Jean-Alexandre Delattre (« le jongleur au chapeau) et de Jean-Pierre Augier (« la marchande de fraises »).
Sans oublier le portique de 4 mètres de haut signé Chubac, érigé peu après sa mort en mai 2008 : lié à Tourrette Levens par son amitié avec le docteur Frère, qui était son médecin de famille, le peintre et sculpteur abstrait Albert Chubac est à l’honneur dans la maternelle du village, dont les murs, repeints à ses couleurs, sont ornés de nombres de ses oeuvres. Si l’école ne se visite pas, il existe depuis 2001 un espace Chubac qui présente chaque été de belles expositions : cette année, « le « wild west show » de Buffalo Bill, à la conquête de l’ouest, à partir de la collection personnelle du docteur Frère.
Grand collectionneur devant l’éternel, le docteur sait tout sur l’histoire de Bill Cody, et en particulier que son célèbre « show » s’est arrêté à Nice en 1906, à l’emplacement actuel du stade Jean Bouin.
Il aime aussi à faire visiter sa salle « culturelle » des mariages, inaugurée en 2007, où sont présents sur les murs Franta, James Coignard, Brazillier, Gilli, Chubac, Ernest Pignon-Ernest et Ben avec un « et surtout, n’oubliez pas de vous aimer ».
Mais ce n’est pas tout. Le maire a récemment demandé au grand artiste Ernest Pignon-Ernest une « fresque » pour le collège René Cassin, sur le thème des droits de l’homme, qui a été installée en janvier 2009.
Et a lancé depuis trois ans une grande fête médiévale qui a lieu en mai, à laquelle toute la population participe avec bals masqués, troubadours, concerts … Avec l’ambition de faire de Tourrette Levens un "village-musée à ciel ouvert".

« Je suis un extra-terrestre mais faut pas le dire ! »

Alain Frère devant l’Affiche de Buffalo Bill- photo © jch dusanter

Né au Creusot en 1935, et malgré un père mort à la guerre en 1940, Alain Frère fut « un enfant gâté, très heureux », élevé par une mère et une grand-mère (corses !) toutes deux très possessives mais aimantes.
Grâce à un oncle qui l’emmène dans les musées et une mère qui lui donne « le virus du théâtre », il se prend de passion dès l’âge de 4 ans pour le spectacle, en découvrant le cirque Medrano : « mon rêve aurait été de devenir un trapéziste volant mais le cirque était à l’époque un monde fermé. »
Il se rattrapera plus tard en devenant le médecin des familles Medrano et Bouglione, car il a aussi une « passion pour la médecine ».
Après des études à Marseille, il est un temps interne à l’hopital de Monaco, ce qui lui permet de rencontrer le prince Rainier, rapprochés par leur passion commune pour le cirque.
C’est ainsi qu’en 1974, pour fêter le 25ème anniversaire du règne de Rainier, ils décident de créer le festival international du cirque, Alain Frère à titre de conseiller artistique d’un festival qu’il « accompagne depuis 33 ans ».
Entretemps, il choisit Tourrette Levens pour s’installer, et devient médecin de campagne : « c’était ma vocation, je me levais toutes les nuits, je travaillais samedi et dimanche, vous comprenez … »
Sur le tard, il se découvre une nouvelle vocation, la politique : il devient maire à 48 ans et sera constamment réélu depuis, avant de trouver sa juste place de chargé de la culture au Conseil général. Car c’est en « homme de spectacle », pour son plaisir, qu’il « voit tous les spectacles », prêt pour ça à dormir dans sa voiture. Non seulement le cirque mais aussi les soirées estivales et autres « 06 en scène » qu’il a initié : « il y a 420 spectacles par an, je les vois tous, je les vis ».
Et quand il rentre chez lui, que fait-il ? Il descend dans le sous-sol de sa maison aménagé en musée du cirque, dans son « antre », où tout est méticuleusement classé et répertorié.
Alors, quand il vous affirme qu’il possède « la plus grande collection privée au monde sur le thème du cirque », on ne se dit plus qu’il embellit la réalité : on le croit !

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