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Chapitre 20 : Et si MADI nous était conté ? - Feuilleton à l’occasion de l’expositionMADI au Ciac de Carros - Par France Delvillle pour Art Côte d’Azur

La longue histoire du Mouvement MADI va nous occuper tout le temps de l’exposition « Conscience polygonale » : « De CarMelo ArDen QuIn à MADI contemporain » au CIAC de Carros. Histoire tellement riche que le choix des documents à articuler pour sa compréhension est embarrassant, les épisodes se succèdent, s’entrecroisent, depuis la fondation de MADI jusqu’à aujourd’hui où la multiplicité des intervenants offre un champ presque exponentiel de problématiques.

En dehors des périodes devenues historiques (de 1935 à la fin des années 90), les MADI à l’extrême pointe du contemporain ne cessent de diversifier leurs inventions, comme en témoigne la déclinaison des œuvres MADI du Centre Orion et de la Plata présentées au CIAC.

œuvres MADI du Centre Orion et des MADIS argentins
œuvres MADI du Centre Orion et des MADIS argentins

Mais la structure de l’exposition pourra servir de pilote dans l’enchaînement des époques : création par Arden Quin d’une polygonalité entraînant un premier mouvement MADI à Buenos Aires, re-création d’un mouvement MADI à Paris avec installation d’un Centre d’Etudes MADI rue Froidevaux… après un temps de latence résurrection de MADI par Alexandre de la Salle dans sa galerie de Saint-Paulet divers lieux d’Europe, essaimage de MADI dans le monde avec comme point d’ancrage un nouveau Centre d’Etudes MADI à Paris - le Centre Orion – animé par Catherine Topall…et enfin le dernier MADI, un MADI argentin regroupé autour de Sofia Arden Quin, veuve d’Arden Quin et psychanalyste à Buenos Aires.

Carmelo Arden Quin avec Alexandre de la Salle en 1999

Ce qui est miraculeux et semble unique dans l’histoire de l’art, c’est qu’un homme né en 1913 dans une famille de cow-boys, mais instruit dans plusieurs langues par des hommes cultivés, puisse se raccorder à une Europe en pleine mutation, et, passionnément, dépasser les inventions les plus audacieuses de cette Europe, et peut-être, comme il se doit, pour des raisons personnelles, même si cette version psychanalytique peut faire hurler certains.

When art jumped out of its cage

couverture de la biographie d’Arden Quin par Shelley Goodman

Shelley Goodman (qui n’est autre que le couple Shelley et Volf Roitman), dans leur merveilleuse biographie d’Arden Quin intitulée « When art jumped out of its cage », publiée par le « Madi Museum and Gallery, Dallas, Texas » font l’hypothèse que le jeune Carmelo Heriberto Alves Oyarzun (pas encore « Arden Quin », pseudonyme qu’il prendra plus tard), fou de jalousie à l’idée que sa mère, veuve de son père assassiné avant sa naissance, puisse se remarier, et donc mettant en pièces la photo d’un homme susceptible de devenir son beau-père, invente par ce geste, cet « écornement », une sortie du format orthogonal. L’interprétation est ce qu’elle est, mais la fureur est véridique, Carmelo l’a racontée devant ma caméra en 1988 à la Galerie de la Salle, et elle est présente dans l’un des deux clips qui accompagnent ce texte.

Ce qui est tout aussi miraculeux et unique dans l’histoire de l’art, c’est qu’un homme né en 1913 puisse encore avoir un effet sur des artistes travaillant en 2011, puisse être encore leur « maître ».

exposition « Le teorie del Madi », Milan

Les expositions de Madistes contemporains prolifèrent aujourd’hui, notons par exemple celle de « L’Association Arte Madi Italia », en mai 2008 à la « Galleria Scoglio di Quarto de Milan », une soixantaine d’artistes venus de France, Uruguay, Italie, Argentine, USA, Brésil, Venezuela, Japon, Hongrie, Egypte, Hollande, Slovaquie, Belgique, Suède, organisée par Reale F. Frangi, Gino Luggi, Gianfranco Nicolato, Piergiorgio Zangara, présents dans l’exposition du CIAC.

« Diagonale des carrés », 1935

Et donc, pour raconter l’histoire de ce qu’un homme a lancé, seul, en 1935, en écornant la fenêtre orthogonale de la peinture occidentale par l’entremise d’une « Diagonale des Carrés », puis avec d’autres à partir de ce moment-là en créant (1944) une Revue Arturo pleine de préceptes pour une révolution artistique tous champs confondus, en lançant ensuite des Manifestes (1945) chez le psychanalyste Enrique Pichon-Rivière et la photographe Grete Stern, et, définitivement, en créant officiellement un Mouvement MADI (1946) à l’Institut français des Hautes Etudes de Buenos Aires, il faudra d’abord épuiser les linéaments de cette fondation par Carmelo Arden Quin lui-même, car ce sont eux qui donnent le ton pour toujours à une fécondité dont on ne peut savoir quand adviendra son entropie.

Arden Quin, donc, incontournable, et c’est pourquoi ce samedi 2 avril à 15h, l’Association des « Amis du Centre International d’art contemporain de Carros », invitant à la poursuite des
« Samedis de Carros » avec une rencontre autour de l’exposition « Conscience polygonale », projettera une interview de Carmelo Arden Quin réalisée en 1988 à la Galerie Alexandre de la Salle où il raconte des moments fondateurs de son existence. L’exposition sera ensuite visitée en compagnie d’Alexandre de la Salle et Catherine Topall, les deux commissaires de l’exposition et principaux galeristes d’Arden Quin, en compagnie également d’artistes MADI contemporains.

Alexandre de la Salle et Alberte Garibbo, l’une des exposantes, visitant l’exposition

Comme dans le Petit Poucet


L’existence d’Arden Quin est si originale qu’elle est devenue mythique, et les deux ouvrages abondamment illustrés que sont la biographie de Shelley Goodman et le Catalogue Raisonné d’Arden Quin en témoignent à chaque page, Catalogue Raisonné qui sera présenté le 2 avril au CIAC. Le catalogue raisonné est lui aussi muni d’une biographie, qui débute ainsi :
« Mais il faut reprendre l’histoire d’Arden Quin à sa naissance, et même, le 29 mars 1912, lorsqu’à Rivera, moitié uruguayenne d’une ville où passe une frontière matérialisée par un trait au milieu de la rue, l’autre moitié, brésilienne, étant Sant’Ana do Livramento, se marient ses parents, Carmelo Jeronimo Alves do Estreito - éleveur, né à Sant’Ana le 26 juillet 1979, fils de Francisco Alves do Estreito, brésilien, et de Estanislada Cimaro, brésilienne - et Juana Francisca Oyarzun, née le 22 octobre 1888 à Sant’Ana, du second mariage de Maria Pedrosa da Trinidade, brésilienne qui possède une ferme sur la ligne de démarcation, avec José Oyarzun, espagnol. Carmelo Jeronimo meurt après six mois de mariage, des suites d’une blessure provoquée par une arme à feu, son épouse étant enceinte, du futur Carmelo. Bien que né en Uruguay, le père d’Arden Quin se revendiquait aussi brésilien, et, par sa mère, les ascendants d’Arden Quin étaient des immigrés venus, dans les années 1880, du petit village de Beunsa, près de Pampelone au pays Basque espagnol. Shelley Goodman, l’excellente biographe d’Arden Quin, note que la revue « Ailleurs » qu’il fondera en 1963, recevra de lui une titre logique de la part d’un homme des frontières, comme si à partir de ce moment-là l’horizon seul devenait pour lui désirable. Et lorsque naît Carmelo dans la maison de sa tante à Rivera, en Europe la guerre mondiale se prépare, tandis que l’Uruguay connait une exceptionnelle période de stabilité et de réforme économique, politique et sociale, due au projet de son président, José Battle y Ordoñez, catalan d’origine, bien décidé à établir les principes démocratiques qu’il a étudiés en Europe, particulièrement en Suisse. Légalité, liberté de la presse, régulation du travail, sécurité sociale, école libre, suffrage universel même pour les femmes, pour un Uruguay « Suisse de l’Amérique du Sud » cependant sous le pouvoir économique des anglais, sous le pouvoir culturel des français.

Ce qui rendra le jeune Carmelo familier des écrivains et philosophes français et espagnols, pratiqués et admirés autour de lui. Le Brésil restera au contraire un lieu du deuil, qui ne sera jamais « incorporé ». A l’âge de 3 ans, Carmelo quitte Rivera pour Masoller, sa jeunesse est bercée par les chevaux, carrioles, trains. Vie campagnarde, pas d’eau courante, mais liberté pour le petit garçon qui un jour s’endort dans la forêt, tout le monde le cherche, le croyant enlevé par des gitans. « C’était comme dans le Petit Poucet », se souvient-il encore. Trois ans c’est la mort de sa grand-mère Maria Pedrosa, mère de 17 enfants, qu’il aime tant, et aussi l’époque où il peut réciter de mémoire les vers que lui lit sa mère. Plus tard certains d’entre nous auront la chance de le voir se livrer à des joutes poétiques avec des amis, Salvador Presta par exemple, Arden Quin étant une vraie bibliothèque. Sa mère si belle et paraissant si jeune, il l’admire pour son courage et sa créativité, pour vivre elle crée des pépinières d’eucalyptus, une fabrique de confitures, de briques, de charbon, plus tard, une maison de couture dans laquelle elle reproduit des modèles parisiens. Elle mourra de tuberculose, ce qui affectera beaucoup son fils. Mais l’oncle maternel préféré, José Belarmino da Silva dit « Zeca », veille, c’est un homme doux dont la passion est de lire et d’écrire, et nul doute qu’il initie son neveu à ces activités qui resteront familières à Arden Quin. L’oncle Miguel, homme d’affaires, est aussi un inventeur, Carmelo est témoin de la confection d’objets bizarres. L’une de ses sculptures se trouve toujours à Rivera. Instruit par les Frères Maristes de l’école jésuite de Sant’Ana de Livramento, dès l’âge de 12 ans Carmelo découvre qu’il peut dessiner, réaliser, et vendre des cerf-volants tout à fait opérationnels. A l’âge de 14 ans il reçoit d’Oncle Zeca un Smith and Wesson, son père a peut-être été assassiné, il vaut mieux se prémunir. « Tout le monde était armé », explique Carmelo, « et nous nous exercions dans la campagne ».

Le western continue ainsi sur des dizaines de pages, avant de jeter le jeune homme dans une réflexion effrénée et définitive sur la peinture et la littérature, ses deux chevaux de bataille.

Et si des générations d’artistes ont pu puiser dans des hypothèses de travail « madistes », c’est bien que Carmelo Arden Quin en a fixées un certain nombre, de ces hypothèses, pour l’éternité.

Madi et l’Italie

Et si le Mouvement MADI italien est si vivace, c’est peut-être qu’il a eu droit à des textes particuliers de la part de « l’initiateur » : celui du catalogue de l’exposition « De Madi à Madi (1946-1999) » à la Galerie Municipale d’Art Moderne de Gallarate (17 octobre-14 novembre 1999)

« De Madi à Madi (1946-1999) »

« Le second millénaire se termine pour MADI par trois expositions internationales, en Italie et en France. En Italie, je dois signaler la grande exposition organisée par la Galerie Municipale d’Art Moderne de Gallarate. Nous devons l’exposition aux efforts conjoints du professeur Silvio Zanella et de ses collaborateurs, du groupe italien MADI et de sa secrétaire Anna Canali et, surtout, à l’enthousiasme et à la détermination de l’historienne d’art Emma Zanella Manara, qui est l’auteur du catalogue accompagnant cette exposition. Ces dernières années ont été très actives pour notre Mouvement, tant en Italie qu’en Espagne, Hongrie et France. MADI est intervenu partout avec rigueur et cohérence, et ses manifestations ont été accueillies avec beaucoup de sympathie et d’intérêt. Chaque exposition a pu montrer un progrès constant dans la composition, l’utilisation de nouveaux matériaux, avec des formes nouvelles et originales, revêtues de tous les aspects d’un chromatisme inédit. Pour nous ceci signifie que le « concept de polygonalité » recherché par MADI est valable, pourvu que l’expérience le démontre, et que déjà lui seul constitue un événement extraordinaire dans la peinture construite ; lui seul qui peut au jour d’aujourd’hui rénover en profondeur l’art géométrique. MADI donne sa vraie place à la dimension picturale, c’est-à-dire à la superficie, avec l’élaboration à l’infini de polygones plats, sans compter la variété des reliefs et le traitement du monochrome, qui trouve dans la forme MADI sa vraie essence esthétique ; sans oublier les coplanals.

Rappelons que MADI appartient en art à ce courant révolutionnaire, cette tradition de recherche formelle qui, à travers des luttes mémorables, changea le monde culturel de ce siècle : en dessin, arts plastiques, musique, poésie, littérature, architecture, urbanisme. Nous avons des précurseurs, ce qui doit être crédité en notre faveur. Une de nos sources se trouve précisément en Italie. MADI, tel un coureur olympique, reprend la flamme de la main de l’athlète qui, ayant achevé son parcours, la tend, lumière éternelle, à son successeur. Occasion d’affirmer notre admiration pour le prodigieux Manifeste « Reconstruction futuriste de l’Univers » de Giacomo Balla et Fortunato Depero de mars 1915, qui fut une vraie déclaration pré-Madi.
Au troisième millénaire, nous multiplierons nos activités, avec une organisation encore plus serrée, soutenue par des revues et éditions MADI dans lesquelles nous exposerons et confronterons nos idées, pas seulement à travers la théorie mais aussi à travers des images qui attesteront des travaux des adhérents à de MADI ; nous propagerons le LIVRE MADI dans sa forme et son contenu. Nous créerons les moyens de fortifier encore davantage notre collaboration.
Le prochain Millénaire sera MADI. Signé : Mouvement International Madi France, Carmelo Arden Quin ».

« Pré manifesto di napoli »

Le second est le « Pré manifesto di napoli » dans le catalogue de l’exposition « Madi », du 27 avril/20 mai 2001, Villa Bruno, à San Giorgio a Cremano sous l’égide de Arte Struktura. :
« Il faut s’interroger sur la situation dans laquelle se trouvent les arts plastiques aujourd’hui. Cela vaut-il la peine de nous limiter à la pauvreté figurative d’aujourd’hui, et à son manque d’événement, en comparaison avec les grandes œuvres de l’expressionnisme, cubisme, futurisme, dadaïsme, surréalisme ? Je ne crois pas. Par contre parler de la géométrie dans la peinture contemporaine nous semble obligatoire (même de façon synthétique), de par notre situation dans l’espace et dans le temps, et par le devoir qui est le nôtre de créer un espace et un temps nouveaux transformés en œuvres d’art, pour accompagner l’Histoire. En suivant pas à pas l’Histoire dans ses phases esthétiques. L’œuvre d’art survit, et subsiste, si elle est historiquement nécessaire. La plastique géométrique a été, est, parce qu’avec elle nous voyons surgir une réalité distincte et neuve créé par l’artiste avec les seuls éléments que nous offre la nature : la dimension et la couleur. Et dans ceci l’art plastique se met au niveau de la pureté musicale, de l’harmonie des plans et des volumes dans leurs dimensions respectives, qui sont les dimensions bidimensionnelle et tridimensionnelle. Comme par exemple dans le néoplasticisme, qui est, dans une construction orthogonale, un compromis entre la juxtaposition et la superposition. Les lignes noires structurent l’ensemble, font fusionner les plans blancs et de couleurs primaires, et ferment le complexe pictural. Chez Malevitch au contraire, les carrés et les autres plans s’inscrivent sur la surface. Le fond soutient mais n’intègre pas la composition, ainsi dans son œuvre emblématique « Blanc sur blanc ». Une approche similaire se produit chez Kandinsky et autres maîtres de l’art construit. En 1910 apparaissent les œuvres uniques et essentielles de Giacomo Balla, avec lesquelles pour la première fois nous voyons la sérialité géométrique pure, qui ne peut se réaliser que s’il y a une juxtaposition systématique. Balla est le grand précurseur du cinétisme. Et bien toute cette immense révolution picturale se produisit à l’intérieur du rectangle, entité formelle absolue. Laissons l’aspect historique de l’art construit, qui nécessite les longues et rigoureuses études du spécialiste, ici ce n’est pas le cas, nous parlons, même si c’est de façon limitée, de MADI. MADI est un événement, et comme tous les mouvements esthétiques, se fonde sur des concepts. Dans notre cas, concepts vieux comme le monde, mais qui furent laissés de côté ou oubliés. Un de ceux-ci est le concept de « polygonalité », et également de géométrie : jamais on ne l’a étudié consciencieusement, comme on aurait dû. On l’a utilisé, et on l’utilise, sans que tout ceci soit toujours présent. La géométrie, science de l’espace. Voilà ce qui nous différencie de nos prédécesseurs, auxquels, soit dit entre parenthèses, nous envoyons un gros salut pour ce qu’ils nous ont appris. La différence est qu’ils ne dépassèrent pas… ou ne purent, par blocage psychologique, se libérer de - la prison du rectangle. Ils restèrent otages du rectangle, et, sûrement, dans celui-ci inscrivirent de beaux discours plastiques, mais ils ne virent pas, en peinture, la planéité briller dans toute sa magnifique identité. Ils ne créèrent pas le coplanal et sa puissance de jeu, ils ne systématisèrent pas l’articulation et le mouvement des éléments en les intégrant dans la composition, n’introduisant pas de cette façon l’art ludique, un des concepts les plus importants de MADI Madi réalise tout ceci. MADI libère aussi, et donne un autre cours, à la plastique chromatique : il crée des monochromes formels, les seuls qui aient une vraie signification, parce qu’insérés dans un polygone inventé ; il utilise le blanc et le noir, reproduit les structures des couleurs primaires ; il peut créer aussi, pourquoi pas, avec les complémentaires, avec les valeurs, avec les couleurs vives, avec les terres, déclinant ainsi toute la gamme chromatique, ce qui laisse à chaque créateur une liberté absolue d’invention. Nos lois sont : la géométrie, les polygones réguliers et irréguliers, libres dans l’espace, qui réalisent formes planes, limpidité des couleurs et jeu esthétique, dynamisme et articulation. MADI est simple, logique, nécessaire. Il n’est pas facile de rester calme face au déversement de la laideur et de la médiocrité des arts plastiques officiels de nos jours, mais laissons à d’autres le soin d’en juger. Nous, poursuivons notre marche vers le futur, nous, peintres, sculpteurs, musiciens, architectes, poètes, MADI, tournons-nous vers le plaisir de créer de la beauté. Regardons vers l’an 2000, qui sera notre siècle, aucun doute là-dessus » (Carmelo Arden Quin).

« Pré-manifeste de Milan »

Et troisièmement le « Pré-manifeste de Milan », écrit à Paris le 18 avril 2002 et paru dans le catalogue de l’exposition (mai-juillet 2002) au Musée d’Art Contemporain de Pieve di Cento, en collaboration avec le Centre d’art contemporain de Brescia, Arte Struktura :
« Pourquoi Madi est de permanente actualité ? C’est parce que d’abord il s’est attaché à se libérer du carcan de la dimen¬sion orthogonale où l’or inscrivait les couleurs pour faire un objet de beauté en peinture. C’est aller plus loin que le rectangle et donner ainsi un coup d’arrêt à un support plus que périmé dans ses possibilités. Finie la domination des seuls quatre angles.
La seconde grande « permanence » de Madi, c’est de proposer des solu¬tions aux problèmes où s’était empêtré l’art géométrique classique, c’est à dire l’immobilité. L’art constructiviste, l’art concret, etc., enfermés dans leur rectangle, n’ont jamais bougé, n’ont jamais connu la beauté du mou¬vement. En cela aussi, Madi a libéré la composition et donné indépendance et liberté totales aux couleurs primaires, aux couleurs secondaires, aux couleurs simultanées, au blanc et noir et au monochrome, structurés dans une « forme en soi » au lieu de se diluer à l’intérieur du rectangle ; Madi s’est employé à systématiser des matériaux nouveaux : le plastique, l’acier chromé, le verre et le plexiglas ; et comme essence la profusion des angles et le mouvement réel dans des objets et « coplanals » ; immobilisme et jeu esthétique ; transparences mobiles et lumineuses. Madi doit systématiser tout cela. Madi est toujours au commencement du nouveau. Il est en révolution permanente de création plastique.

Madi a sa « constante ». Cette constante est la polygonalité au delà des quatre angles

Ce n’est pas du spirituel pris par ses cheveux pleins de parasites. C’est une chose simple et rigoureuse en sa forme et son contenu, sans aucune prétention d’un au delà faussement mystique. Madi est Lucidité et Pluralité. Une présence continue de simple beauté. Madi construit continuellement le futur. Et ceci, en dépit de tous les opportunismes et compromissions de tout acabit. Madi se veut le mouvement esthétique de notre siècle. En vérité, Madi n’a pas d’histoire, il fait en permanence l’Histoire, il fait en permanence le présent et l’avenir. Je fais appel à nos camarades du Madi Italien, qui luttent et créent en ce sens, pour qu’ils ne se laissent abuser par des fourbes sans vergogne et des menteurs arrogants, qui ne font que démoraliser en vue de la liquidation de cette merveilleuse aventure qu’est le Madi.

Mettez à la porte ces gens là.
En avant ! Et bonne route aux madistes italiens.
(Paris, 18 Avril 2002, Carmelo Arden Quin)

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