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CHRONIQUE CINEMA : Pieds nus sur les limaces de Fabienne Berthaud - Par Robert Ceresola pour Art Côte d’Azur

Film de clôture de la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes 2010, "Pieds nus sur les limaces" fut malgré son titre à la fois excitant et répulsif, une bonne surprise de cette sélection.

Le feu follet

Porté avec brio par ses deux interprètes féminines, Diane Kruger et Ludivine Sagnier, l’histoire est celle de deux soeurs, que tout oppose en apparence et qui cohabitent dans la même maison à la mort de leur mère.

Clara (Diane Kruger) incarne la raison, la mesure et le bon goût. Mariée à un avocat et totalement socialisée, elle doit "prendre en charge" sa jeune soeur de dix huit ans Lily (Ludivine Sagnier), personnage enfantin, désinhibé, impudique et débile légère, pour la protéger d’elle même.

Totalement imprévisible, parfois coiffée d’un poulpe et jouant sur la route avec un lapin mort, Lily (Ludivine) campe le portrait attachant et crédible d’une adolescente attardée aux moeurs rustiques proche de la nature et des animaux en vivant avec eux dans une intimité dérangeante pour tout citadin éduqué.

Scénario tiré du propre roman de la cinéaste Fabienne Berthaud, on suit d’abord perplexe et ensuite le plus souvent sidéré, les pérégrinations de cette jeune fille qui remplit le congélateur de cadavres de taupes, embrasse les arbres, se promène à moitié nue, couche par jeu avec qui elle veut et insulte tout le monde.

Lointain avatar sympathique de la jeune fille possédée par le démon dans le film "L’Exorciste", Lily passe pour une dangereuse doux-dingue dont le gros grain de folie va s’avérer furieusement contagieux.
Sa propre soeur d’abord va voir son monde raisonnable et BCBG basculer sous les coups de boutoir de la lucidité effrayante et cathartique de son alter ego.

Le spectateur est ensuite gagné par la sincérité et l’authenticité du personnage de Lily qui sous ses excès morbides et baroques, fait exploser le vernis des conventions sociales aussi inutile et ridicule que celui dont elle recouvre les ongles de son dindon.

Un film à voir surtout pour la merveilleuse performance d’acteur de Ludivine Sagnier qui dans le rôle rafraîchissant d’une femme-enfant sauvage et border line, nous donne à penser, en nous divertissant, aux relations ambiguës et conflictuelles qu’on toujours entretenu la folie et la bien pensance.

Quinzaine des Réalisateurs Cannes 2010

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