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Fondation Emile Hugues : une passerelle artistique pour la ville

Édifié au XVIIe siècle au cœur de la cité médiévale de Vence, le Château de Villeneuve qui abrite la Fondation Emile Hugues est devenu l’un des phares muséaux de la Côte. Un précieux outil pour une ville aux fortes ambitions culturelles.

Zia Mirabdolbaghile, le profil d’un homme de culture cultivé ! © J-Ch Dusanter

Si l’on connaît comme le loup blanc la Fondation Maeght, il en est une autre, située à une poignée de kilomètres, plus jeune dans la carrière mais qui ne ménage pas son talent pour faire rayonner depuis 1992 le travail des grands artistes de ces cent dernières années. Car à l’instar de la Fondation Maeght, la Fondation Emile Hugues explore les liens entre l’art moderne et contemporain : « Parmi les artistes représentés près de la moitié sont encore vivants », tient à préciser Zia Mirabdolbaghi, à la barre du navire depuis bientôt vingt ans.

The right man at the right place !

Emiles Hugues devant le mur deBernard Pages ©J-Ch Dusanter

Un Conservateur dont la silhouette fine comme un trait au fusain contraste avec sa grande soif d’art et de culture sous toutes ses formes. Zia Mirabdolbaghi est lui-même le fruit de ce que l’on nomme aujourd’hui la transdisciplinarité : « Je suis né en Iran et, dans cette culture, la peinture, la poésie et la musique sont des vases communicants très évidents ». Si évidents que l’homme suit parallèlement des études musicales et les Beaux-Arts à Nice, puis à Paris, avant de prendre la Direction de la culture de Vence puis celle de la Fondation Emile Hugues en 1990.

© J-Ch Dusanter

N’ayant pas abandonné sa passion de la musique, le Conservateur est devenu également concertiste et enseigne depuis vingt ans au Conservatoire de Nice. Il fut d’ailleurs l’un des deux premiers à décrocher le Certificat d’Aptitude de musique extra-européenne créé sous Jack Lang. « Renoncer à l’une de ces activités eut été un crève-cœur et je peux vous assurer que dans le miroir de la musique, je comprends mieux celui des arts plastiques. Les passerelles existent. Matisse ne fut-il pas violoniste ? ». Un peintre majeur qui compte parmi les invités de marque de cette ancienne demeure seigneuriale rachetée par Emile Hugues, Maire de Vence et Ministre sous la IV ème République. Cet homme de culture légua en 1966 l’édifice à la municipalité, à la condition d’en faire un lieu dédié à l’art et à la jeunesse. Promesse tenue ! Le Château Musée, flanqué de son légendaire frêne immortalisé par Soutine, ouvrit ses portes en 1992 fort d’une collection bâtie autour des ténors de l’art qui séjournèrent à Vence, et, se dotant d’une politique d’acquisition tournée vers l’art contemporain.

Des dessins de Matisse aux Wall drawing de Sol Lewitt

Les couloirs de la Fondation Maeght Les couloirs de la Fondation Maeght © J-Ch Dusanter

Aujourd’hui sur trois étages et onze salles, son Conservateur a réussi le pari de relier deux époques charnières et d’organiser - à travers la collection permanente et des invitations d’artistes -, quatre expositions temporaires par an. L’exposition en cours, hommage aux donateurs (jusqu’à la fin février), permet de jauger la qualité de ce patrimoine. Les trois Wall drawing de l’américain Sol Lewitt symbolisent dans cet espace de mémoire l’aboutissement d’une ambition qui a traversé plusieurs générations vençoises. Réalisée in situ en 2003, cette installation est devenue permanente. Pas moins de huit couches croisées et un mois de travail ont été nécessaires pour obtenir ce foyer ardent de couleurs et de tangentes géométriques sous les ors. « En remerciement Sol Lewitt nous a envoyé une gouache. Un ensemble de ses œuvres a été donné à la Ville dans le cadre du mécénat d’entreprise, dont une série de planches par la firme Total. Une quinzaine de monotypes qui devrait faire prochainement l’objet d’une exposition exceptionnelle ! ». Mais Sol Lewitt également à l’origine de l’une des façades du MAMAC est un cas à part !
Car les donations sont majoritairement faites par les familles. C’est le cas du fonds Matisse nourri par les legs successifs de ses héritiers. Une série d’études consacrées à la Marquise de Pompadour, des planches préparatoires à sa chapelle vençoise, des portraits de famille, de modèles tahitiens, en tout ce sont plus de 60 gravures et dessins réalisés par Matisse durant son séjour qui occupent quatre salles du château.

© J-Ch Dusanter

Contemporain du maître et oeuvrant dans sa lignée, Claude Viallat occupe lui, une salle avec plusieurs toiles révélant la genèse de son emblématique travail. Bernard Pagès a réalisé pour sa part l’autre œuvre in situ préfaçant ses énergétiques sculptures, que côtoient des croquis. Quant à Arman il a fait don, entre autres, à la Fondation d’une sculpture de piano qui occupe le parvis du Château et doit bientôt devenir une fontaine (initialement pensée par l’artiste). Une salle entière rend hommage, elle, à l’écrivain polonais Witold Gombrowicz, l’un de ses illustres écrivains qui séjournèrent dans la cité, au travers de photos, d’affiches et d’une donation d’archives du Centre Pompidou. Robert Malaval, maquisard de l’Ecole de Nice au destin tragique et Jean Le Gac, participent à ce redéploiement de la collection que l’on visite comme si l’on était invité par un amateur d’art dans sa belle demeure.

Le Piano d’Arman, bientôt fontaine devant le chateau de Villeneuve ©J-Ch Dusanter

Mais ne nous y trompons pas ! Le Château de Villeneuve est bien au cœur d’une gestion associative regroupant la Commune, l’Etat, le Département et la Région et qui à ce titre dispose d’un dynamique pôle pédagogique à destination des plus jeunes : « C’est un pari audacieux que nous avons mené crescendo et qui participe à l’émancipation culturelle de la ville », commente Zia Mirabdolbaghi qui n’a jamais cessé de défendre les couleurs de la cité. Aujourd’hui en tant que Directeur d’art et du patrimoine de la Ville, il opère également en médiateur auprès de l’état sur de nombreux projets. Il fut membre du jury du parcours artistique du Tramway de Nice. « Grâce à cet engagement pour faire vivre Vence au sein de la communauté d’agglomération, un vrai front culturel s’est consolidé ». Et le combat continu pour ce Conservateur « multicarte » qui planche avec ses éminents confrères sur une grande fête de l’art contemporain, sorte de deuxième acte d’un événement qu’il présida « La Côte d’Azur et la modernité de 1918 à 1958 ». « La manifestation fédérera en 2011, la Villa Arson, le Musée Chagall, le MAMAC, l’Espace de l’Art Concret et notre Fondation. Chacun s’attachant à développer un courant qui a marqué historiquement notre région », explique-t-il dans son bureau qui, au dernier étage de cette tour de vigie ouvre sur les toits de l’ancienne cité et, à l’ouest, sur la ville nouvelle qui se profile.

En Savoir Plus

www.vence.fr/Chateau-de-Villeneuve-...
www.museedevence.com

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