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« Dehors » les artistes !

A Vence, les artistes exposent jusque dans les rues. Mettre l’art à la portée de tous et tous à la portée de l’art ? C’est le pari réussi de l’association du même nom, qui œuvre depuis 1996 pour cet événement original qui ne manque pas d’air. L’art contemporain : ce facteur dynamique de développement local. Parce qu’il est toujours à la recherche de nouveaux supports et pour mieux comprendre comment une installation vient à occuper le flanc d’une église ou les branches d’un arbre, nous vous proposons une petite visite en images…

Présenter des artistes, des plasticiens, tous d’horizons différents et ce en plein cœur de la ville, au beau milieu d’un espace à la fois patrimonial et monumental : la place Godeau. Ici les installations sont suspendues aux fenêtres des habitations, les gyrophares et les sculptures flirtent avec les vieux pavés, les vidéos se cachent dans les caves ou dans des coins ombragés et les artistes papillonnent, tout sourire, de curieux en curieux.

Discussions artistiques
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L’art contemporain s’invite dans les ruelles de la vieille cité vençoise. « Dehors » c’est avant tout, des vidéastes, des photographes, des installationnistes, qui ont revisité cet espace « public » pour confronter leur travail artistique à un lieu typique cher au patrimoine de la ville.

Dialogues échanges et créations

Pendant quatre jours, l’exposition a permi au promeneurs de s’interroger, tout comme l’ont fait les artistes avant eux, sur le thème de la Mémoire Conservée. « Conservée dans les objets, dans l’environnement, dans les traces matérielles des rites, des traditions, des sons et gestes, la mémoire de l’Homme n’est que la somme des mémoires des hommes. » dixit l’artiste François Mauplot, au sujet de Dehors09. Les artistes présents ont tous joué le jeu et ont tenté, chacun à leur manière d’apporter leurs réponses et leurs regards sur le monde d’aujourd’hui, que ce soit d’un point de vue social, politique, historique ou culturel.

Un vernissage chaleureux basé sur l’échange et la singularité, la diversité mais aussi la solidarité. On y était et ça donne ça…

Simon Duclut-Rasse
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Simon Duclut-Rasse ’Subjectiles’

« Faire exister des formes, des objets, pour créer un monde autonome. Ce sont des archives. Une mémoire qui affirme sa présence d’être, unique sans convention ni prérequis. Les objets photographiés, recadrés, pointés, agissent en symbiose, tentent la symbiose avec l’espace. Les images créent leur espace-temps, le « da-sein », l’être là heideggérien dont dépendent l’éclosion de toutes choses. C’est alors une vie qui s’offre à ces objets délaissés. Ses objets « sont » en présence, on ne peux pas le nier, mais ils « sont », simplement. En détour, l’image montre donc la présence d’une éclosion de signifiant : comme un abyme qui en dévoilerait un autre. La transformation de l’objet recadré entrainant la mutation de la limite. Ainsi la dés-limitation de l’objet les projette vers l’informe, vers l’onirique. »

Jean-Lou Choquet
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Jean Loup Choquet ’Structure mobile statique de conservation (à garnir)’

« Conserver la mémoire de l’Homme transmise par les hommes et les femmes,
Oui mais quoi ?
Tout conserver ?
Continuer à commettre à crimes de restaurations ?
Le temps n’a-t-il pas un travail à faire ?
Qui sélectionne ?
Il y a urgence ?
Urgence pour décrypter les mots sans avenir de nos politiques
Urgence sur les moyens attribués à la conservation de nos patrimoines
Urgence pour le présent
Urgence pour fertilisé le terreau de l’avenir
Urgence pour dire non.
Non, nous ne sommes pas condamné, nous humain de l’instant T,
De laisser en mémoire aux siècles à venir, seulement un patrimoine fait de chiffres d’affaires,
De records de ventes ou d’affluence.
De toute façon le temps fera son œuvre ….
Mais... »

Karine Debouzie
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Karine Debouzie ’Les particules élémentaires’

« A la manière des particules élémentaires représentant les cellules les plus petites qui constituent l’ensemble de la matière de l’univers, les bocaux de l’installation Particules élémentaires se veulent la matière première de la constitution d’un esprit, par un ajout d’idées supplémentaires, indépendantes mais en interaction entre elles.
Je reviens avec le bocal à une forme de présentation utilisée pour la présentation de photos de corps adultes en position fœtale, il y a quelques années. Un des bocaux fait d’ailleurs un clin d’œil à cette première utilisation.
L’accumulation de bocaux et la présentation, en leur sein, d’objets divers qui constituent à la fois les bases de mon travail de réflexion et l’évolution de ce dernier, évoquent la collection d’artiste et le cabinet de curiosités. Le cabinet de curiosités fait partie d’un vocabulaire déjà utilisé lorsque je présentais des corps déformés ou des masques de visage en latex inclus dans de la résine pour évoquer l’inmontrable. Ici, il s’agit d’une construction par la classification, par le souvenir des formes, des matières et des sons, d’une mémoire concrète et portative. »

François Mauplot
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François Mauplot ’Le XXI siècle conservera - t-il les fragments de notre mémoire collective ?’

« Dans l’histoire de l’humanité, la prise de conscience de la conservation est une notion contemporaine [ il ne s’agit pas de transmettre, mais de conserver], vouloir mémoriser, enregistrer, garder. Elle participe à une nouvelle approche de la spiritualité et a une influence sociologique capitale dans la pensée des hommes. Détruire pour mieux régner fut durant des millénaires la solution envisagée. Effacer de la mémoire des hommes ce qui pouvait corrompre les philosophies absolutistes. Destruction des vestiges , élimination des savoirs par peur, par ignorance, ce n’est que récemment, parce que l’on comprend mieux que la contemporanéité de notre société repose sur les jalons de mémoire, que l’on conserve tout. Générations futures courbées sur les strates du conservatoire de l’humanité vous réécrirez peut être l’aventure des hommes.
En 2009 les jeunes chinois nées après 1989 ne savent pas …. »

Camille Mauplot
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Camille Mauplot ’Espiguette ou presque, Ce que ou presque ne suis pas’

« Ecrire une image ou bien la vivre, la perdre, puis la récupérer, humide, glacée. Ce film que vous ne voyez pas n’est pas à voir, il parle d’une image qui ne revient pas, c’est tout ce que vous avez besoin de savoir. Cette image elle m’appartient, elle ne vous appartient pas, vous, vous avez la votre d’image, et elle ne me regarde pas, elle est à vous, je ne la verrai jamais, vous non plus. Alors, pour vous, je mets en scène cette image, pour que vous ayez quelque chose à voir, que vous voyiez dans cette image disparue quelque chose d’autre que le vide. Peut-être, verrez-vous même votre image. »

Gao Shihe
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Shihe Gao ’Le phosphène 2005 Nice’ et ’Le soleil 2008 Pékin’

« Je filme le paysage que j’ai choisi. Je peins de petites choses en aquarelle et en même temps, j’essaye plusieurs méthodes, puis je choisis celle qui me paraît la meilleure et finalement je les mélange dans la vidéo au montage. Dans la vidéo, j’ai beaucoup utilisation de chose visuelles, telle que phosphène et sensation de soleil dans les yeux, pour moi c’est un sentiment, un souvenir à vie. »
Sculpture
« L’utilisation du matériau de base est, comme vous pouvez le voir, le fil de fer. La longueur des fils de fer est variable parce qu’elle me permet de mieux les assembler afin d’avoir une meilleure composition. Je tords les extrémités de l’une sur la longueur de l’autre et c’est ainsi que je traite le volume. Par ces gestes simples, j’arrive à une expansion.
À travers ces points de rencontres et ces interactions, j’essaye de mettre en forme un réseau, c’est le processus de faire quelque chose a partir d’un rien qui m’intéresse dans cette citation. »
David Wicress
« Il devrait être interdit de ne pas parler, de ne pas voir, de ne pas entendre. Le non dit ; une auto censure , un emprisonnement sur soi , une mémoire déformée , le mensonge ; miroir d’une image virtuelle, la mémoire un labyrinthe dans le passé . Les trois singes de la sagesse /Mizaru / Kikazaru / Iwazaru / (l’aveugle le sourd & le muet ) symbolisent à chacun une mémoire partielle, les trois réunis ; l’inéluctable clôture du corps humain et donc de sa mémoire ...et patati et patata... »

Laurent Lombart
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Laurent Lombart ’Tournez le dos !’

« Neuf photographies. Chaque image implique un protocole de cadrage et de point de vue. Cette série s’intègre dans la continuité de mes recherches artistiques, elle questionne d’emblée les manières dont la mémoire ou les souvenirs peuvent être exprimés et représentés. Ces recherches peuvent être définies comme une implication artistique relevant de concepts qui me sont chèrs tels que l’anachronisme, la reconstitution et la rémanence. Cette œuvre est avant tout une histoire, elle commence dans un premier temps par une photographie de mon père dans un café, de dos, face à un portrait anonyme dont je ne pouvais définir précisément ni l’origine, ni la date et encore moins l’identité. Ce fantôme coincé entre une plaque de verre et les quatre bords du cadre en bois aurait pu être mon grand père, mon grand oncle ou encore je ne sais quel parent, mais il n’est en réalité qu’une image fantôme et anonyme conservée à l’intérieur de ce café. Retenant la pensée de Christian Boltanski, cette image tirée du passé affirme une mémoire collective, comme l’évocation de souvenirs communs qu’il nous donne à ressentir avec son installation l’album de la famille D (1971). L’image atteste l’existence réelle d’un homme ou d’une chose, elle est la trace d’une vie, elle affirme un patrimoine mixte composé de morts et de vivants auquel nous nous identifions. Suite à ce premier acte photographique, j’ai décidé de poursuivre une recherche sur la multiplicité des images qui composent notre environnement, je me suis donc mis à fouiller, à chercher les lieux où pouvaient être cachées les images de nos « pères ». Pour révéler ces images, il me fallait d’abord rencontrer ceux qui les conservent, qui les collectionnent. La démarche documentaire m’a poussé à me rendre d’abord dans des lieux accessibles au public, puis très vite dans le cadre du privé, chez des anonymes qui m’ont accueilli dans leur lieu de vie familial. En effet, je prend en photographie des individus de dos, chez eux ou dans leur lieu de travail (antiquaires, librairies, maisons bourgeoises...) face à des portraits relevant du passé, souvent anonymes, et non signés. Ce que nous voyons est un jeu de miroir triangulaire, une rhétorique formelle qui propose au spectateur plusieurs durées, plusieurs temps et plusieurs points de vues. »

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