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Forum Jacques Prévert - faire du théâtre un acte citoyen

Présent depuis plus de vingt ans à Carros, le Forum Jacques Prévert propose la pratique en amateur du spectacle vivant et programme en moyenne 25 spectacles dans sa saison, entre septembre et juin, dans la salle Juliette Gréco. Du loisir, oui, mais surtout un propos qui s’inscrit dans une démarche sociale et citoyenne.

Avec 1 200 adhérents pour une ville qui compte 10 000 habitants, le Forum Jacques Prévert peut se targuer d’être l’association la plus importante de la commune de Carros. 500 d’entre eux pratiquent la danse en amateurs. Tout au long de la saison à venir, les compagnies Ouragance et Voix Public vont animer des stages et ateliers, avec les familles et des professionnels de la petite enfance. Car l’un des axes sur lesquels le Forum a décidé de mettre l’accent cette année, c’est l’enfance et le théâtre. « Le spectacle vivant sert à la construction des individus, estime Sylvie Guigo Lecomte, directrice du Forum, et cela commence dans l’enfance. Nous proposons donc beaucoup de spectacles tous publics. » Cette dernière estime que l’on peut parler de tout aux enfants, mais pas n’importe comment. « Pas de niaiserie, chez nous ! Un spectacle peut bien sûr être interactif et festif, mais on ne doit jamais prendre les enfants pour des idiots. Quand on discute avec eux, on se rend vite compte qu’ils sont capables de comprendre et de ressentir le même théâtre que les adultes qui, comme les contes, peut comporter plusieurs entrées de lecture. Il suffit donc de le mettre à leur
portée. » Une démarche qui se poursuit à l’âge adulte, avec l’Ecole du Spectateur : par le biais de stages et d’ateliers, on y apprend le
vocabulaire spécifique du théâtre, la façon dont on met en place les lumières, les sons… tout pour faire comprendre aux gens ce qu’est une vraie démarche artistique, et le travail qu’elle induit. « Notre objectif principal est d’offrir à des publics non initiés un accès facile à la culture », précise Sylvie Guigo Lecomte. Dans ce même cadre, le Forum mettra cette année l’accent sur la création, via Le Laboratoire,
en mars prochain. Le chorégraphe Hamid Skif, en plus de
son spectacle La géographie du danger, sera une semaine en résidence
au Forum et accueillera, chaque jour, des artistes locaux afin de travailler avec eux sur des improvisations. Ces répétitions seront ouvertes au public et, chaque soir, la restitution du travail
sera présentée. L’occasion d’une rencontre interdisciplinaire…

...Entre amateurs et professionnels

Le Forum Jacques Prévert était à l’origine une MJC offrant la possibilité
de pratiquer en amateur le théâtre, la danse, la musique… Mais il programme aussi des spectacles professionnels, à raison de trois dates par mois en moyenne sur la saison. « Il y a sept ans, au moment de la construction de la salle Juliette Gréco, d’une capacité de 300 places, nous nous sommes demandé s’il ne serait pas judicieux de scinder les deux activités, indique Sylvie Guigo Lecomte. Ce sont en effet deux métiers différents. » La salle du Forum a donc été transformée en studio de danse, « le plus beau du département ! »
La programmation de spectacles au Forum avait, à l’époque, commencé
en chanson, avec des artistes comme Léo Ferré ou Mouloudji, ce qui en avait fait sa notoriété. « Oui, il y a une vie culturelle à Carros !, s’exclame Sylvie Guigo Lecomte. Et une vraie volonté politique de l’entretenir et la développer. » Si le répertoire est aujourd’hui principalement contemporain, Sylvie Guigo Lecomte veille à ce que
la programmation soit toujours accessible. D’autant qu’elle doit naviguer
entre son propre projet associatif et les directives des collectivités qui subventionnent le Forum. En outre, elle met en avant le rôle social du spectacle vivant, notamment en travaillant avec l’association Cultures du Coeur, issue des Restos du Coeur. « Pourquoi les personnes défavorisées n’auraient-elles pas elles aussi le droit d’aller au théâtre ? Cela peut en plus être un déclic pour eux, pour rebondir vers autre chose et retrouver l’envie, estime-t-elle. Au théâtre,on peut se forger un point de vue, un jugement. C’est un espace qui se veut citoyen. Nous souhaitons que chacun se sente bien au théâtre, en pressente la nécessité. » La programmation du Forum intègre donc cette idée. « Le théâtre, c’est du loisir, oui, mais il doit aussi apporter de la réflexion, de la surprise et des émotions diverses. »

Cie Onstap © Thierry Gazzera

Des têtes d’affiche, mais pas seulement

Une envie parfois difficile à mettre en œuvre, quand on prend le parti
de ne pas programmer uniquement des têtes d’affiche. « Ces dernières
peuvent attirer le public local une fois, mais ce n’est pas cela qui fidélise les spectateurs. » La directrice estime également qu’une programmation, même si une équipe entière y travaille (en l’occurrence,
sept permanents), doit être au final décidée par une seule personne. « Elle doit avoir une âme et, pour cela, correspondre à la sensibilité d’un seul être, dans laquelle le public se retrouve. Sans ce fil conducteur, il ne peut pas y avoir de progression linéaire. » Cette professionnelle du spectacle, ancienne administratrice de compagnies de danse et de théâtre, a également travaillé longtemps dans le milieu de la brocante. Elle se sert de cette expérience pour « faire son marché » sur les festivals. « Il peut m’arriver de programmer des choses qui ne me plaisent pas mais dont je reconnais la dimension professionnelle et artistique, souligne-t-elle. Je me dis alors « ça, ça va marcher à Carros ! ». Chaque année depuis 14 ans, un festival de théâtre de rue conclut
la saison des spectacles : les Siacreries. Une manifestation née au
moment où l’association n’avait pas de locaux, entre travaux et
construction de la salle Juliette Gréco. « Nous avons donc naïvement
investi la rue, alors qu’il s’agit de façons de travailler très différentes,
précise Sylvie Guigo Lecomte. Dans la rue, le public n’est pas
captif et on peut rencontrer de nombreux imprévus. » Toutefois, une
fois le pli pris, le festival s’est maintenu. Il programme aujourd’hui
20 compagnies et attire 3 000 spectateurs chaque année. « Le public
de Carros n’étant pas habitué à aller au spectacle, est facile à
surprendre, constate la directrice. Et, surtout, il joue très bien le
jeu. » Elle se souvient ainsi de la compagnie Délices Dada qui avait
organisé une « revisite » de la ville pour ses habitants, en inventant
une nouvelle histoire pour chaque lieu. « Douze ans après, on m’en
parle encore… »

Date à venir :

26 février - Richard Bohringer, dans son spectacle Traîne pas trop sous la pluie

Informations pratiques :

www.forumcarros.com

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