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Picasso revient à Antibes

Le château-musée Grimaldi est devenu le symbole du Vieil Antibes. Un site magique et tellement méditerranéen … Pas étonnant que Picasso ait pu s’y sentir comme chez lui. Il serait heureux aujourd’hui de voir le magnifique espace inauguré pour lui au deuxième étage le 19 juillet 2008. Visite guidée.

C’est une énorme bâtisse carrée en pierre de taille surmontée d’une tour médiévale devenue le symbole du Vieil Antibes. De la terrasse qui domine les remparts, la vue est éblouissante sur la mer. Un site magique et tellement méditerranéen … Sur lequel fut élevé dans l’Antiquité une acropole grecque, puis un castrum romain.

7 - Pablo Picasso
Satyre, faune et centaure au trident,1946
Ripolin et fusain sur fibrociment
250 x 360 cm
Musée Picasso, Antibes
© Succession Picasso, 2008
Photo © imageArt, Antibes, Claude Germain

Avant de devenir la résidence des évêques durant près de dix siècles, puis d’être achetée par une branche génoise de la famille Grimaldi en 1385. A cette date, Luc et Marc de Grimaldi, capitaines d’arbalétriers, étaient au service de la reine Jeanne. Trois siècles plus tard, c’est le Roi Henri IV qui en fait la demeure du gouverneur de la ville, jusqu’à la Révolution où le « château Grimaldi » se transforme en hôtel de ville. Pour finir en caserne à l’époque (1820) où Antibes était une ville frontière fortifiée italienne, avant son rattachement à la France en 1860.
Ensuite, le château est laissé à l’abandon … jusqu’à ce qu’un professeur de français, Romuald Dor de la Souchère ne s’y intéresse. Nous sommes dans les années 1920, il est féru d’histoire antique, et convainc la ville de le racheter pour en faire un musée d’archéologie, allant jusqu’à lancer une souscription pour trouver les fonds.
En 1925, le château devient le Musée Grimaldi avec pour premier Conservateur … juste récompense, Romuald Dor de la Souchère ! Trois ans plus tard, le bâtiment est classé monument historique.

6 - Picasso devant sa table chargée de bouteilles, 1946
Photographie noir et blanc
18 x 24,4 cm
Musée Picasso, Antibes
Photo © Michel Sima / Rue des Archives © Succession Picasso, 2008.
© imageArt, Antibes, Claude Germain

Et Picasso entra au château …

Le 17 septembre 1946, le Maître entre au château Grimaldi, reçu par le Conservateur. Il est venu pour une petite visite en voisin, depuis la villa qu’il loue à Golfe-Juan avec sa jeune compagne Françoise Gilot. Voyant que le lieu l’enchante, Dor de la Souchère propose de mettre à sa disposition une salle du deuxième étage. Aussitôt, Picasso enthousiaste se met au travail, commençant par dessiner sur les murs trois têtes de faunes qu’il intitule « Les Clés d’Antibes ».
« Je ne vais pas seulement peindre pour moi ici. Je vais vous décorer le musée ».
Le 10 novembre, il repart pour Paris : l’aventure aura duré deux mois à peine, pendant lesquels le génie du XXème siècle a réalisé 23 peintures et 44 dessins qu’il laisse en dépôt, parmi lesquels son chef d’œuvre « La Joie de vivre », gigantesque bacchanale au bord de la mer. Citons parmi les autres peintures les plus célèbres, le Nu assis sur fond vert, Satyre, Faune et Centaure au trident, La Femme aux oursins, Nature morte à la chouette et aux trois oursins, La Chèvre… Picasso revient un an plus tard peindre « Ulysse et les sirènes », juste avant l’inauguration officielle de la salle Picasso au premier étage. Peu après, Picasso lègue au musée 78 céramiques, pièces originales qu’il vient de réaliser dans l’atelier Madoura de Vallauris : Taureau debout, Chouette ovoïde, Échassier, Condor, Cabri couché …
Le 27 décembre 1966, le château Grimaldi devient officiellement le Musée Picasso. A ce jour, le musée conserve 275 œuvres de l’artiste.

1 - Pablo Picasso
La Joie de vivre, 1946
Ripolin sur fibrociment
120 x 250 cm
Musée Picasso, Antibes
© Succession Picasso, 2008,
Photo imageArt, Antibes, Claude Germain

Aujourd’hui, il retrouve son atelier

Béton brut et bois blond pour les matériaux, séparation du circuit d’entrée et de sortie, climatisation flambant neuve, réfection de l’accueil, vestiaires, sanitaires, librairie, mobilier, éclairage … Fermé depuis mars 2006, le Musée Picasso ouvre à nouveau ses portes, après une profonde rénovation. Dans ce lieu qui n’était pas destiné à être un musée, et qui reçoit quelques 200.000 visiteurs par an, il a fallu repenser la muséographie, explique Jean Louis Andral, son conservateur depuis 2001.

D’où l’idée de réserver les deux salles voûtées du rez-de-chaussée à la donation récente de la Fondation Hartung, le premier étage aux expositions temporaires ainsi qu’à l’importante collection Nicolas de Staël et le second étage à Picasso.
Trente ans après sa disparition, Picasso retrouve son atelier, dans la grande salle toute blanche qui a retrouvé ses dimensions d’origine. Un espace idéal pour accueillir les grands formats, comme le triptyque intitulé « Ulysse et les sirènes » (360cm de long).

2 - Pablo Picasso
Nu assis sur fond vert, 1946
Ripolin sur bois (okoumé)
100 x 210 cm
Musée Picasso, Antibes
© Succession Picasso, 2008
Photo © imageArt, Antibes, Claude Germain

Le musée possède également une collection d’art moderne, commencée en 1951 par Dor de La Souchère et poursuivi par les conservateurs qui lui ont succédé, Danièle Giraudy et Maurice Fréchuret : Modigliani, Calder, Miro ou Picabia ainsi que les Nouveaux Réalistes et le groupe Supports/Surfaces … Sans oublier Nicolas de Staël, dont les oeuvres témoignent de son séjour à Antibes en 1954-55. Picasso au Château Grimaldi, un monument de l’histoire de l’art dans un monument historique : une visite s’impose !

Travaux pratiques

Les travaux de rénovation ont été supervisés par Pierre-Antoine Gatier, l’architecte des monuments historiques, avec Lætitia Morand, architecte. Coût : 2,60 M€ pour l’intérieur du château, 4 M€ pour l’ensemble du projet.
Christine Albanel, ministre de la Culture et de la Communication, a inauguré le nouveau musée Picasso à Antibes, le samedi 19 juillet 2008.
Visites : château Grimaldi, 06600 Antibes. Tél : 04 92 90 54 20.www.antibes-juanlespins.com
Lire : Musée Picasso, sous la direction de Jean-Louis Andral, 192 pages, 15 €.

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