Whole in the wall new York Graffiti Art 60’s - 90’s

En 1971, un article du New York Times relate l’histoire d’un jeune de 17 ans inscrivant dans le métro « Taki 183 » (son nom et le n° de sa rue). Très vite, les rames sont couvertes d’autres noms : Tracy 168, High 149, etc.

Des tags devenus signatures puis lettrages

Crash dance of the weary

De simples tags, ces inscriptions sont devenues signatures puis lettrages géants symptomatiques d’une soif de reconnaissance à laquelle s’est rapidement greffée une intention esthétique dont se sont fait l’écho les artistes exposés ici. Les lettres ordinaires devinrent complexes, de couleurs vives, elles s’ornèrent de motifs, de reliefs, de profondeur, d’ombres, de flèches.
 Disséquées, liquéfiées, dilatées, courbées, coulées elles tombèrent et se désintégrèrent. Toujours plus monumentales, elles participèrent à une colonisation inversée, opérée par ces voyageurs invisibles jusqu’alors limités à leur statut social de « black » ou de « latino ». Ils avaient désormais un nom, écrit en lettres de feu, avec des gouttes de sang ou parsemé d’étoiles filantes.

ancient scribble

Plus encore, les artistes exposés ici ont su abolir la frontière séparant l’écrit du pictural, progressant et affinant leur style au fil des années. Du graffiti, ils gardent la spontanéité, la répétition du geste, l’engagement du corps, la saturation de l’espace pour redonner sa force à l’écriture, sa puissance d’image. À l’identité fixe d’un nom, jadis écrit sur les murs dans une soif de reconnaissance, se sont substitués de nouveaux langages, de nouvelles armes par la multiplication, les devenirs, inlassablement troués, entrelacés, altérés.

Tag Jonone

Du mur à la toile

Jonone Peinture

 Pourtant, du mur à la toile, il y a le passage de la rue subversive aux salons immaculés des galeries. Multipliant les supports, allant de cartons récupérés à des meubles d’antiquaires, les artistes exposés ici questionnent l’art lui-même, ce monde tiraillé entre reconnaissance des sphères élitistes et rage créatrice.

 Si désormais la toile remplace les wagons de train et le style se fait plus épuré et plus précis, le travail de ces artistes prend forme d’allégorie de la jungle urbaine dont les œuvres anonymes fleurissant ça et là peinent toujours à acquérir la reconnaissance qui leur est due. Ce mouvement d’une rame de métro, de l’écrit au pictural, de la rue aux galeries, de la rage créatrice aux enchères – où les œuvres des artistes exposés ici atteignent des sommets – est aujourd’hui leur force.

Blade - Brightness is alive

 Autrefois confiné dans le secret et exécuté sous la menace constante de la violence, le graffiti devient une ornementation publique destinée à la consommation de la haute société. Alors que celle-ci se charge de récupérer leur travail passé se focalisant sur les tags et les graffs plutôt que sur leurs travaux de peintres, les artistes exposés ici par la galerie Helenbeck prennent acte de leur expérience tout en la dépassant. C’est précisément ce qui fait d’eux les membres d’un vrai mouvement et non d’une école, toujours à l’affût de devenirs nouveaux, pour affirmer leur identité et construite au fil des années une œuvre qui fera date.
D.L.

Informations pratiques :

Old School Train

WHOLE IN THE WALL - NEW YORK GRAFFITI ART 60’S - 90’S
 à Nice du 25 novembre au 15 février (vernissage le 25 novembre à 18h). Galerie Helenbeck, 6 rue Defly 06300 Nice.
 Et à Paris du 21 novembre au 15 février (vernissage le 20 novembre). Galerie Helenbeck, 17, rue des Beaux -Arts, 75006 Paris.
 du 20 novembre au 15 février (vernissage le 19 novembre). La Galerie Gismondi reçoit la Galerie Helenbeck, 20 rue Royale 75008 Paris.