| Retour

CINEMA : Hitchcock - De Sacha Gervasi

Sortie en salles le 6 février 2013


1959, Alfred Hitchcock (Anthony Hopkins) arrive à la Paramount où il a ses bureaux. Il est accompagné de sa femme Alma (Helen Mirren) pour négocier son prochain film avec les patrons du studio qui voudraient une oeuvre dans le même esprit que La Mort aux trousses qui remplissait les salles. Certes, le réalisateur, reconnu et admiré, surnommé « le maître du suspense » est alors au sommet de sa carrière. Désirant se lancer dans un film différent de ses précédents, il s’intéresse à un tueur en série qui avait inspiré un roman incendiaire à Robert Bloch, Psycho (Psychose). Mais, ce qu’il propose semble si excentrique que les producteurs lui refusent tout investissement. De plus, il doit se confronter à la censure, ce qui l’oblige à tricher sur son scénario. Son seul soutien est Alma, sa talentueuse collaboratrice de toujours. Aussi vont-ils hypothéquer leur maison pour financer ce projet qui semble fou : un film en noir et blanc dont la seule vedette (Janet Leigh) disparaît de l’écran au premier tiers du récit et avec un jeune premier romantique pour le rôle du tueur fou, Anthony Perkins alors pratiquement inconnu. Mais Hitchcock veut son indépendance pour inventer ses propres règles d’une méticulosité maniaque. Grand manipulateur, il jouera au chat et à la souris avec le spectateur, mettant en place des mécaniques, des leurres, afin de conduire son public où il le désire. Une manipulation d’ailleurs souvent jugée perverse.


Hitchcock venait de réaliser sa grande série de films Paramount aux couleurs chatoyantes qui avait culminé avec Vertigo. Il prend donc un gros risque, le projet était casse-gueule sans certitude que « ça marche ». Hitchcock (le film) raconte cette période et le tournage du célèbre Psychose dont on retrouve le casting : Scarlett Johansson joue le personnage incarné par Janet Leigh et James d’Arcy sait fort bien imiter Anthony Perkins. Cependant le film donne la part belle au fameux couple du réalisateur et de sa femme : tous deux jonglent avec
l’humour comme on sait qu’ils le faisaient, mais aussi avec la possessivité et la jalousie, peut-être davantage imaginées pour corser un scénario qui flirte beaucoup avec la banalité. Il est connu que Hitchcock s’intéressait à la psychanalyse – ses films sont truffés de références freudiennes - rien n’en est dit dans cette tranche de vie du réalisateur, et pourtant Psychose est riche sur ce point, bien évidemment, en ce qui concerne les personnages, mais aussi très probablement en ce qui concerne Hitchcock lui-même : la mère, vivante ou morte, a toujours une présence dominante. Aborder la vie du réalisateur sous cet angle n’était sans doute pas l’intention de ce « film tout public » qui se contente de grimer Anthony Hopkins de la silhouette ventrue du réalisateur. Cette célèbre silhouette apparaît fugitivement dans chacun de ses films. Le comédien n’a en rien cherché à l’imiter, il a simplement incarné l’homme despotique, très amoureux de sa femme, qui faisait elle-même le choix de ses froides comédiennes blondes. S’il n’est pas un chef d’oeuvre, Hitchcock n’a rien d’ennuyeux et le rire fuse souvent. On peut même prendre un certain plaisir à pénétrer l’univers du cinéma et à regarder ces véritables numéros d’acteurs (parfois cabotins).

Artiste(s)