| Retour

Fin de cet événement Novembre 2021 - Date du 27 octobre 2021 au 21 novembre 2021

LA FRACTURE, de Catherine Corsini

En pleine rupture de leur relation amoureuse, deux femmes se font une scène au milieu de la rue. En chutant, l’une se casse le coude d’où un transport à l’hôpital le plus proche. Mais celui-ci est saturé de blessés arrivant sans cesse : c’est un jour de manifestation des Gilets Jaunes qui affrontent les policiers laissant de nombreux éclopés sur le carreau. Le mouvement de protestation sociale, amorcé en octobre 2018, s’est arrêté brusquement avec la crise sanitaire et ses confinements.

Ce jour-là, le service des urgences a été obligé de bloquer ses portes. Tout le personnel, sous pression, est au bord de la crise de nerfs.

Allongée dans la salle d’attente, la femme qui vient d’être hospitalisé (Valeria Bruni-Tedeschi) est au comble de l’hystérie, réclamant à grands cris qu’on lui donne des soins et exigeant la présence de sa compagne (Marina Foïs). Elle agace un routier (Pio Marmaï) en chaise roulante à cause d’éclats de grenades dans ses mollets et qui craint d’être doublé dans son tour d’attente. Il traite de «  bourgeoise égoïste » cette femme venant visiblement d’un milieu privilégié. Le prolo et la bourgeoise s’affrontent avant de s’allier face à des situations de plus en plus absurdes – mais stressantes – comme un plafond qui s’écroule prouvant le manque de financement pour l’entretien des hôpitaux.

L’hôpital devient en état de siège, les manifestants, face au forces de l’ordre, veulent s’y réfugier, pour fuir, à l’extérieur, la fumée des bombes lacrymogènes et la pression des CRS derrière les portes, exigeant que le personnel leur livre des coupables. De plus en plus en colère, les soignants menacent de faire grève. Dans ce huis clos qu’est l’hôpital, la tension monte. Ca s’énerve, ça gueule, ça s’agite, et la situation atteint son comble. Tandis que, seule dans sa chambre, une patiente meurt, négligée, oubliée...

Tourné avant la pandémie du vilain virus qui sévit encore, le film avait pour but de clamer un SOS en faveur des services hospitaliers.

Copyright CHAZ Productions

Il est devenu aujourd’hui encore plus alarmant sur le manque de lits, de matériel, de personnel... Entre colère et humour, « La Fracture » dénonce une réalité évidente et le film prend parfois des allures de documentaire : caméra à l’épaule et lumière naturelle. En France, rares sont les films politiques par rapports aux pays anglo-saxons. Cependant, ici tout est dénoncé avec humour et le public ri beaucoup...

Il faut dire que « La Fracture » est superbement interprété par les trois acteurs principaux, mais aussi par le personnel hospitalier embauché pour jouer son propre rôle. Ainsi, une infirmière (Aïssatou Diallo Sagna) est particulièrement touchante de sincérité en exprimant le surmenage face aux défaillances d’un hôpital en manque de tout, au point que le public préfère en rire.
Pour cela, il est entraîné dans le sillage de comédiens, tous plus hilarants les uns que les autres, avec des mentions spéciales à Valeria Bruni-Tedeschi et à Pio Marmaï, tous deux particulièrement survoltés. Par leur jeu teinté d’une ironie distanciée qui s’ajoute à un humour féroce, ils nous font mourir de rire !

Caroline Boudet-Lefort

Photo de Une | Copyright Carole Bethuel

Artiste(s)