Dans « Les linceuls », un veuf inconsolable invente un moyen, pour les vivants, de garder un contact avec les proches disparus, déjà dans leurs linceuls. Ainsi une caméra permet de visualiser la chère dépouille de sa femme et de rester en contact avec elle jusque dans sa tombe, de maintenir ainsi une sorte de relation.
Devenu un entrepreneur à succès, il développe son invention dans les cimetières du monde entier. Mais, le jour où plusieurs tombes sont profanées par des vandales, il recherche les coupables avec acharnement.
Vincent Cassel interprète cet homme, accompagné par Diane Kruger (parfaite en femme disparue)
S’il maintient en vie sa femme, c’est pour lui-même, pour survivre à sa mort. Le deuil est une souffrance sans issue que seule la distance du temps peut plus ou moins rendre supportable.
Ainsi en romantique du XXIe siècle, le réalisateur de « Crash » propose un regard novateur sur le deuil, sans cependant négliger l’ironie. Il ose entremêler les légendes anciennes aux techniques d’aujourd’hui, utilisées couramment (ordinateurs, téléphones portables, …).
La musique, signée Howard Shore, apporte un précieux éventail de nuances à cet imaginaire sans limites. Il s’agit ici d’aimer autant le passé commun que la personne qu’on a adorée qui est devenue un cadavre et que, cependant, on aime encore, malgré sa mort. Cette disparition ne fait rien à l’affaire, il reste les souvenirs, la mémoire du temps passé. Le corps n’est qu’une enveloppe, mais pour Cronenberg elle est importante.
Il s’agit pour lui de chérir son devenir cadavre autant que le passé de l’être aimé. Et de l’aimer encore de façon tangible au delà du trépas. Pour cela, son héros veut voir la décomposition du corps de la femme aimée, l’accompagner au-delà de la mort et poursuivre ainsi une forme de relation avec elle quoique morte. Cela l’aide finalement à rendre le deuil supportable, quoique la douleur soit constante.
Présenté au dernier Festival de Cannes, « Les linceuls » ne figurait pas au Palmarès.
Caroline Boudet-Lefort