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Fin de cet événement Décembre 2017 - Date du 15 novembre 2017 au 31 décembre 2017

Le Musée des merveilles de Todd Haynes

Adaptation d’un livre pour la jeunesse de Brian Selznick, « Wonderstruck », traduit en français par « Black Out » (!), qui entraîne le spectateur dans un univers fabuleux en déployant sur deux époques les fugues entêtées de deux enfants sourds en quête d’étoiles.

Rose recherche sa mère, une star du cinéma muet dans les années 20, tandis que Ben veut connaître son père astronaute dans les années 70. Fuguant vers Manhattan, leurs trajets sont étrangement semblables à cinquante ans d’écart.

Sous le titre « Le Musée des merveilles », le film délire dans une fiction se déroulant dans deux époques différentes.

Leurs histoires parallèles vont permettre à deux enfants, qui réussissent à transformer leurs rêves en réalité, de se rejoindre dans des temps éloignés. D’une part, Rose, fillette sourde et solitaire, qui grandit en 1927 loin de sa mère, actrice de théâtre à Broadway, et, d’autre part, Ben dont la mère vient de mourir dans un accident de voiture et qui, confié à une tante en 1977, rêve de rejoindre son père inconnu. Il est devenu sourd, lui aussi, suite à un terrible orage, mais découvrant dans un livre un signet qui lui fait signe en signalant l’adresse d’une librairie à New York, il part à sa recherche !
Les situations des deux enfants, envahis autant de peurs que d’espoirs, se répondent en hasards qui les conduisent ensemble – malgré l’écart de temps - dans les galeries du Musée d’histoire naturelle, caverne de rêves où se trouve une gigantesque maquette de New York. Ben y rencontre un ami qui l’aidera dans sa recherche.

On ne peut pas éviter de penser à une adaptation, également très réussie, d’un autre livre pour enfants de Brian Selznick, « L’invention d’Hugo Cabret » qui a inspiré Martin Scorcese pour rendre hommage à Méliès, génial réalisateur du temps du cinématographe.

Copyright Metropolitan FilmExport

Comme dans l’histoire de l’orphelin Hugo Cabret logé dans l’horloge d’une gare, on y retrouve des cachettes incongrues, des enfants esseulés qui doivent fuir les adultes, des mystères, le cinéma au temps du muet, l’abandon des enfants qui doivent prendre en main leur sort, un père ou une mère qui n’en finissent pas de hanter... Le souvenir et le songe s’emmêlent, mais sont-ils rêve ou réalité ?
Le livre est une oeuvre magnifique où Selznick joue sur les perceptions. D’une part, l’histoire de Ben est racontée en prose avec des dessins en couleurs, tandis que celle de Rose est transmise en magnifiques images en noir et blanc comme le cinéma d’antan, sans bulle puisqu’elle est sourde. L’alternance incite le lecteur à combler les vides et à sentir le silence. Un silence assourdissant.

Comme dans le livre, le spectateur du film ne sait ce qui appartient à la réalité ou au domaine du rêve, les jeunes héros vivent dans des mondes parallèles à l’abri du temps, mais les deux niveaux du récit se réfléchissent l’un sur l’autre.

Copyright Metropolitan FilmExport

Todd Haynes a toujours eu une attention fétichiste pour les reconstitutions. Ici, il mêle, sans brèches temporelles, les deux destins et les deux époques, l’une à la fin des années 1920 et l’autre cinquante ans plus tard dans de formidables reconstitutions d’époques différentes : le New York d’autrefois et celui plus récent des années 70 où la ville était particulièrement mal entretenue. L’onirisme du scénario est renforcé par la musique de Carter Burwell et par le jeu des jeunes interprètes qui sont excellents : Oakes Fegley et Millicent Simmonds, auxquels il faut ajouter l’actrice fétiche du réalisateur, Julianne Moore dans un double rôle à découvrir.

De film en film, l’oeuvre de Todd Haynes s’impose comme essentielle. On a admiré « Velvet Golmine », « Loin du Paradis » « I am not there » et « Carol ». Cette fois il réalise un film hypersensible sur l’enfant plutôt qu’un film pour enfants, même si les jeunes spectateurs devraient l’adorer et être aussi émus que les adultes.
Caroline Boudet-Lefort

Photo de Une : Copyright Metropolitan FilmExport avec Jaden Michael, Julianne Moore, Oakes Fegley.

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