« Mon crime » a été un grand succès de théâtre de boulevard des années 1930 qui n’étaient guère tendre avec les femmes. Mais François Ozon sait jouer de tout ! Deux amies, qui partagent une piaule minable (et le même lit par la force des choses), veulent réussir à tout prix. L’une, Madeleine, est une comédienne sans rôle et l’autre, Pauline, une avocate sans plaidoirie.
La chance de leur vie va se présenter sous forme du meurtre d’un producteur, commis juste après un rendez-vous avec Madeleine qui accepte d’en être l’accusée.
Durant le procès, elle va si bien jouer ce « rôle » que leur chambrette est envahie de gerbes de fleurs et que le succès sur scène arrive. Tandis que la renommée de Pauline au barreau augmente après avoir pris en charge la défense de son amie et réussit à obtenir son acquittement dans un procès très médiatisé.
Dans cette relecture féministe de ces affaires criminelles et misogynes, évidemment toutes les problématiques, soulevées dans notre époque #Me Too, sont soulignées en dénonçant la domination masculine, le manque de parité et d’égalité des droits, le mépris du potentiel féminin,.... Le film pourrait prouver que le meurtre serait la seule protection possible des femmes – épouses ou non – vis-à-vis des hommes !
La complicité des deux amies est largement soulignée, alors que si souvent le cinéma montre les femmes rivales ou jalouses entre elles. Même quand l’insolite Isabelle Huppert arrive en « has been de la scène », elle n’est pas rejetée par les deux jeunes femmes qui font en sorte qu’elle obtienne ce qu’elle demande.
Avec une ironie jubilatoire, Fabrice Luchini, dans le rôle d’un juge réac dit « Il ne s’agit pas d’être juste, mais de rendre la justice ».
Il est alors face à Isabelle Huppert qui revendique « son » crime, mais le juge lui dit que l’affaire est classée et qu’elle doit trouver, parmi toutes les affaires en cours, un crime qui serait disponible !
Les joutes verbales se multiplient et les comédiens se régalent visiblement, chacun dans son rôle : de Fabrice Luchini à André Dussollier en passant par Dany Boon, méconnaissable, et par Isabelle Huppert, dans un numéro époustouflant d’ancienne star du muet !
Mais les deux « stars » du film sont des étoiles montantes, nommées aux César comme « meilleurs espoirs féminins » : Nadia Tereszkiewicz et Rebecca Marder. Si l’une d’elles l’a obtenu, l’autre le méritait tout autant ! On leur souhaite « Bon vent » !
Caroline Boudet-Lefort