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Kenavo Brest (au revoir Brest) !

Brest est une ville étonnante. Sous une pluie presque incessante, nous n’avons pas eu besoin de prendre un bateau pour nous faire constamment gifler par des rafales de vent glacé.

La ville qui encadre la Penfeld, son fleuve, est un mélange de bâtiments médiévaux (le château, les murailles, la Tour Tangui) et d’architecture brutaliste de béton – il a fallu vite rebâtir la ville après la guerre, trop vite, à coups de grandes avenues qui se croisent perpendiculairement et d’immeubles alignés genre « soviétiques ». De temps en temps, un coin de ciel bleu et un rayon de soleil oblique arrive à percer la mer de nuages éclaire les rues. On découvre que le port, du coup, a un certain charme. Les anciens bâtiments industriels immenses qui le bordent ont été pour certains, réhabilités et consacrés aux loisirs, à la culture, au cinéma, à l’escalade et bien sûr à l’art. Ici, les artistes ont des lieux immenses pour s’exprimer.
« Les Capucins » où sont encore présentes d’impressionnantes machines industrielles font bon ménage avec le bateau de l’Empereur, les starts-up, les gens circulent en patin à roulette ou promènent leurs enfants (au chaud).

Venus pour la présentation film Bacon/Ernest, nous avons profité pour faire une petite visite à Brest de deux lieux consacrés à l’art contemporain.

Le Comoedia

L’exposition actuelle est consacrée à dix femmes streetartistes.

À commencer par la regrettée Miss Tic, la pionnière française avec son œuvre : « Séduire : la passion de jouer et d’être jouée  ». Elle a influencé nombre de jeunes femmes qui grâce à elles, se sont autorisés à s’exprimer avec force dans la rue.

Les textes décalés et les aphorismes de Petite Poissonne lui doivent sûrement quelque chose. C’est de ses carnets que sont extraites les phrases qu’elle colle sur les murs ou sur des objets du quotidien (assiettes, photos anciennes, montres, journaux) : « Aucun sujet n’est prémédité, j’écris et dessine sur les choses qui me touchent : peu importe donc au départ qu’elles soient personnelles, amoureuses, politiques, indignées, légères ou engagées.  » Il y a beaucoup de liberté, d’humour et d’intelligence dans son travail.

Autres découvertes intéressantes : Foufounart qui réalise de jolies vulves avec perle encadrées (en céramique), Lady K., qui tague à toute vitesse et au vu de tous, son nom et le chiffre 156 dans les rues (Pourquoi 156 ?), les bustes en raku de Mélanie Bourget, les grandes peintures mêlant figuratif et abstrait de Sêma Lao, l’abstraction très graphique de Lady M, les murs colorés de Caroline Derveaux (très colorés) et ceux de Julia Forma (grands formats en référence aux formes féminines) et enfin les sculptures hyperréalistes de Stéphanie Kilgast. Chacune d’entre elles mériterait un plus long développement, mais vous les trouverez aisément sur Internet (elles sont toutes déjà connues).

Quelques oeuvres en céramique de Foufounart ©A.A

Originalité : les œuvres de ces dix artistes (et d’autres) sont proposées à la vente (à des prix tout à fait abordables).

Superbe espace d’exposition Le Comoedia ©A.A

La Passerelle, centre d’art contemporain

Autre lieu, un ancien site industriel de 4 000 m² en plein cœur de Brest. Ouvert à la création actuelle, plusieurs expositions y sont présentées tout au long de l’année, ainsi que des performances (le samedi). À la marge des institutions, La Passerelle été créée par un groupe d’artistes désirant montrer la création en cours dans des espaces où la plus grande liberté artistique est possible.

Deux expositions étaient en cours, très différentes :

« The other square with no corners » de Rafael Domenech, un cubain vivant à Miami, passionné par l’esthétique relationnelle.

En acceptant l’invitation, il a cherché un dialogue qui restait à définir. Lors de balades dans la ville, marqué par la profusion de messages engagés dans le quartier Saint Martin où se situe Passerelle, il a tenté un dialogue entre ces formes liées à la rue et les livres qu’il collectionne. Avec ses Totems de papiers, ses œuvres murales, ses livres découpés, l’exposition se décline en plusieurs chapitres, visant à partager une expérience à la fois intime et touchant au social.

Autre exposition intéressante (dans le cadre de la saison france-portugal 2022)

Les Chasseurs de Tempêtes de Paulo Arraiano, Rebecca Brueder, Josèfa Ntjam, Pedro Valdez Cardoso (commissaire de l’exposition : Alice Bonnot)

Cette exposition nous alerte sur les milliers de tonnes de pétrole transportées par d’immenses navires au large des côtes d’Ouessant, en Bretagne, « là où les courants turbulents de l’Atlantique rencontrent ceux de la Manche — un endroit connu des marins comme étant la route maritime la plus fréquentée ». Pour que ne se produisent plus les catastrophes comme celle de l’Amoco Cadiz, les Chasseurs de Tempêtes sont les courageux marins qui naviguent sur les eaux tumultueuses de l’océan pour prévenir les catastrophes humaines et écologiques.

La Passerelle, autre très bel écrin pour l’art contemporain à Brest ©A.A

Toutes photos de l’article DR Alain Amiel

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