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Chronique 28 : Chubac pour mémoire (Part II)

Dans “Chubac” (Z’éditions, 1989)

Villanelle d’Albert Chubac
Dans le « Chubac » de Z’éditions, Raphaël Monticelli avait déjà écrit un poème à la gloire d’Albert Chubac, sous forme de « Villanelle », ce qui lui va très bien, et Raphaël évoque très bien aussi la sensation qui peut nous traverser face aux surfaces lisses d’Albert, des sortes des lacs de glisses…

Villanelle d’Albert Chubac
en forme de salut à la naissance du jour

Couleur qui ne masque pas elle est
zone durcie par la lumière
poussée par les regards les regards des regards

onde ultime d’un monde mouvant comme
dialogues de silences
couleur qui ne masque pas elle est

Rien ne s’équilibre tout se pose
dans le chant de l’air et du vent
poussé par les regards les regards des regards

l’à plat est voile et bateau
navigateur des étendues calmes
couleur qui ne masque pas elle est

yeux nageurs ils ne se posent pas
marcheurs promeneurs ils errent
poussés par les regards les regards des regards

guetteur des naissances du jour
quand le monde se désestompe
ta couleur y masque pas elle est
poussée par les regards les regards des regards

Raphaël Monticelli

Dans “Chubac” (Z’éditions, 1989)

Rouge jaune bleu
Cette forme poétique adressée à Albert Chubac m’évoque ces trois haï-kaï de Hugo Caral, qui l’a bien connu :

16/5/2001
A Chubac...
Rouge jaune bleu
toutes formes en trois couleurs
un monde naît-là

11/6/2002
Albert Chubac
Ses herbes son chat
Albert féroce innocent
mord sur le savoir

20/7/2002
Pour Chubac...
Manger les unit
huiles et herbes de Provence
un parasol bleu

Sculpture d’Albert Chubac, Galerie Alexandre de la Salle, années 80 (Photo France Delville)

Un univers, par Alain Amiel
Toujours aux Z’éditions, court portrait, et vif, de Chubac par Alain Amiel lui-même, l’éditeur qui a produit tant de livres lourds de réflexion philosophique, psychanalytique, artistique…

Retour au carton et au bois... Ses éléments dans l’espace, ses sculptures en bois sont toujours colorées.

« Je fais du géométrique par simplicité,
on n’est pas pris par les formes mais par l’esprit...
Ce qui se dégage des couleurs, des mobiles.
Toujours un décalage.
L’évolution de mon travail n’a rien à voir avec Mondrian.
Je suis venu au constructivisme par mon travail,
pas par intention directe.
Très vite j’ai eu le désir de faire avec
le minimum de moyens.
La vie modeste que j’ai menée on la retrouve
dans la simplicité de mon travail.
Ce qui m’intéresse, c’est de faire au plus simple. »

Très ouvert, très sociable, Chubac a besoin de communiquer, de parler.

Unité de la personne, de son œuvre et de son cadre de vie. Joie sereine, pureté ; un travail qui semble contraire à la nature mais qui est en vraie harmonie en contrepoint. Une satisfaction du minimum. Un Univers. (A.A.)

Œuvres d’Albert Chubac, Galerie Alexandre de la Salle, années 90 (Photo France Delville)

Aller à Nice, c’est voir Chubac
Et Robert Pinget, un autre des amis intimes, a écrit, en 1965 :
Albert Chubac a une vie d’une intensité peu commune. Volontairement exilé dans les Alpes- Maritimes, il s’y adonne au travail depuis une vingtaine d’années. Ses passages à Paris, quelques jours par an, sont l’occasion pour lui de confronter son art à celui du monde entier. Il découvre chaque fois qu’un artiste, plus il s’isole, plus ses aspirations relèvent d’un mouvement général de l’art à une époque donnée. Aller à Nice, c’est un peu pour moi, voir Chubac. Et chaque été son travail me réserve une surprise. Il est passé progressivement d’une peinture figurative, quoique déjà fort transposée, à une abstraction plus pure, plus élémentaire. Il nous propose aujourd’hui, après un travail acharné de plusieurs saisons de solitude, des objets colorés qui refusent de se laisser peindre. Chubac a dû renoncer à la toile et poursuivre dans le bois, dans le métal et dans le plastique, ces formes exigeantes. Qu’on ne les imagine pas contournées ou barbares, elles sont simples comme la lumière du midi et, comme elle, aiguës. Et je ne m’étonne plus que le soleil ne se satisfasse pas d’une surface plane, il lui faut des volumes à animer. C’est lui en définitive qui a triomphé de la peinture. (Robert Pinget, Paris, 1965)

Albert Chubac, Galerie Alexandre de la Salle (Place Godeau, Vence, été 1966, vernissage de Robert Malaval « L’Aliment blanc », photo J.J. Strauch)

(A suivre)

Retrouvez la partie I, III, IV et V de la chronique 28 :
Chronique 28 : Chubac pour mémoire (Part I)
Chronique 28 : Chubac pour mémoire (Part III)
Chronique 28 : Chubac pour mémoire (Part IV)
Chronique 28 : Chubac pour mémoire (Part V)

Photo de Une : Dans “Chubac” (Z’éditions, 1989)

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