| Retour

Anish Kapoor à Venise : Impressionnantes expositions !

Anish Kapoor a donné toute la mesure de ses talents. Il a déployé ses œuvres dans deux lieux immenses : une aile de L’Accademia et un grand Palais décati à Cannaregio qu’il a récemment acheté et commencé à réhabiliter.

Dans de grandes salles, les dégueulis de mélasses rouge sang crachés par des canons mécaniques recouvrent les sols

Dans d’autres, ce sont les amas visqueux de tonnes de peintures rouge, blanches et noires qui ont été déversés sur des structures métalliques. On sent que l’artiste s’est éclaté comme jamais, qu’il a donné libre mesure à sa jouissance excessive, excrémentielle, de matières étalées ou entassées sur des centaines de mètres carrés de sols ou de murs.

Heureusement, il y a en contrepoint des moments zen, calmes dans ses noirs profonds

Son vantablack, le noir le plus noir du monde, qui absorbe 99,6 % de la lumière visible (il en a acheté la licence), rend indiscernables les reliefs des formes (carrés, ronds, cubes, ellipses, etc.) qui disparaissent si on se met devant et réapparaissent quand on les voit de profil — c’est bluffant et cela amuse les visiteurs. Évidemment en photo, cela ne rend pas, seuls les yeux peuvent s’y perdre. Il s’est aussi déployé en nous offrant une multitude de tas de pigments mis en forme avec cette obsession sexuelle du trou noir d’où l’on est sorti un jour, un trou hypnotisant en forme de lèvres.
Car les œuvres de Kapoor, pour conceptuelles et matiéristes qu’elles paraissent, sont en fait fortement sexualisées. Ses grandes et très belles peintures où le rouge et le noir dominent, sont construites et composées autour de vulves. Le sang menstruel ou artériel et les sombres profondeurs indiscernables sont à la base de son œuvre.

Né à Bombay d’un père hydrographe d’une grande famille hindoue et d’une mère juive de Bagdad, il vit à Londres depuis qu’il a seize ans

Par sa généalogie complexe et ses influences (Yves Klein, Beuys, Barnett Neumann), son intérêt s’est porté sur des absolus (la couleur pure), des formes simples (les cavités, les creux), les matières pures (les pigments). Il a exploré aussi les miroirs, en a réalisé de gigantesques pour refléter le ciel ou les visiteurs qui s’amusent à se voir déformés et renversés.. Il s’est fait très tôt reconnaître et a pu produire des œuvres gigantesques à la Tate de Londres, en Norvège, à Paris, etc.

À Venise, c’est une rétrospective grandiose à laquelle il nous convie.

Toutes photos de l’article ©A.AMIEL

Artiste(s)