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FESTIVAL FILM : Festival du Film américain de Deauville 2011 : un bon début ! - Par Rolla Tina pour Art Côte d’Azur

A l’image du 37e Festival du film américain de Deauville, véritable vitrine du Cinéma indépendant,
les spectateurs, ces premiers jours, ont été marqués par des films loin des blockbusters, qui reflètent les problèmes d’aujourd’hui des américains, d’une jeunesse à la sensibilité très présente aux prises avec la crise.

Pour exemple, le premier long métrage d’un réalisateur de 26 ans, Sam Levinson
“Another happy day”.Très empreint de psychologie (le réalisateur a été marqué par le cinéma français dans sa jeunesse), le film dépeint un cercle de famille bourgeoise aux comportements pour le moins surprenants.

"Another happy day", réalisateur Sam Levinson

On n’est pas au bout des découvertes : l’arrivée de Lynn chez ses vieux parents, venue marier son fils aîné, va être à l’origine de réactions en chaîne. Surtout que flanquée de ses deux plus jeunes fils dont Elliot, un enfant très lucide sur son entourage familial, qui a déjà goûté aux drogues et à l’alcool. Tout n’est pas rose dans la communication entre des tantes pas toujours bien intentionnées et des cousins très puérils. Au surplus, la confrontation entre Lynn et la nouvelle femme de son premier époux tourne au tableau épique dans une ambiance à couteaux tirés mais non exempte d’humour. Ce sont des personnages à la fois singuliers et dont la portée peut être universelle. Par l’intermédiaire du personnage d’Elliot qui ne cesse, dans toutes les situations, de filmer et de commenter les agissements des siens tel un reporter ou réalisateur dans la réalisation, par une sorte de mise en abîme, le cinéaste souligne les inquiétudes que provoquent à chaque fois les infarctus du grand-père ou le tumulte des conflits de pouvoir entre les deux épouses. La brune, la plus coriace est interprétée par Demi Moore comme insensible aux attaques. Comment expliquer ces violences ?

Peut-être faut-il remonter au passé ou à l’enfance ! Lynn, interprétée avec sincérité par Ellen Barkin, en détresse, effacée et fragile, a été perdue dans un centre commercial quand elle était petite. Voir cette femme de cinquante ans venir séjourner chez ses propres parents lui rappelle les difficultés qu’elle a à élever ses enfants .Elle est sur une position défensive de quelqu’un qui se confie trop, que l’on se doit d’encourager même si son sempiternel apitoiement sur elle-même peut lasser, ce qui donne bien sûr de l’épaisseur à ce rôle auquel elle a longuement réfléchi avec le réalisateur puisque elle fait partie de la production du film.
Avec ce film, on vit les séquences dans l’instant et il n’est pas donné de jugement sur l’un ou l’autre des personnages. On est pris dans cette sorte de roman familial proche d’un Tchékov donnant à voir tous les enjeux de la maisonnée. Prix du scénario du Festival du Film indépendant de Sundance, “Another happy day “ sortira le 25 janvier prochain en France.

"Another Happy Day", réalisateur Sam Levinson

A noter deux films hors compétition dont la sortie est imminente : “Fright night” de Craig Gillespie, en 3 D : une production à la fois délirante et comique autour d’un vampire qui prend les traits d’un jeune voisin plutôt sympathique interprété par Colin Farell soupçonné au départ par une seule personne, son voisin, l’élève doué de Terminale à qui tout réussit, Charley Brewster ( Anton Yelchin). Ce dernier mettra tout en œuvre pour sauver les proies de ce monstre encore plus cruel que les vampires habituels et s’enquérir de toutes les informations propres à en venir à bout d’où sa visite au plus déjanté des magiciens, Peter Vincent (David Tenant). Le rythme est haletant. On passe d’une problématique de scénario à l’autre et le vampire est à l’équilibre entre son côté malsain et sa nature humoristique. Effets spéciaux garantis pour ce remake très modernisé de “ Vampire vous avez dit Vampire”. Sortie le 14 septembre.
Le Cinéma d’aujourd’hui ne lésine pas sur la violence surtout quand le propos mêle performances de cascadeur et le monde interlope des malfrats indirectement associés puisque investissant dans le véhicule utilisé par notre héros. C’est le cas de “Drive”, également hors compétition, de Nicolas Winding Refn tiré du roman éponyme de James Sallis. L’acteur Ryan Gosling travaille un personnage complexe, indestructible à la Clint Eastwood que seule cette rencontre avec une jeune femme et son enfant va rendre plus humain. D’où peut-être la faille qui va pousser le cascadeur à la traque de ceux qui ont doublé le mari de la jeune femme tout juste sorti de prison. Son flegme, son sang froid et son courage déjà éprouvé comme conducteur émérite, servent son rôle de justicier que rien n’arrête. Carey Mulligan, nominée pour l’Oscar de la meilleure actrice pour son rôle l’an passé dans “Une éducation” est fort émouvante en Irène, la jeune femme à la fois fragile et déterminée. Elle fait écho au mystère et au peu de paroles du personnage principal. Un film esthétique, loin des courses poursuites traditionnelles et au héros conducteur dont on peut se dire d’où vient-il avec sa passion pour les cascades et où va t-il entre le début et la fin de la projection pour son caractère éminemment énigmatique. Sortie le 5 octobre 2011.
Quand les hommages sont rendus aux grands du 7e Art, on ne parle pas de Conférence de presse mais plutôt de conversation ou de séminaire. Ce fut le cas en ouverture du Festival de Deauville pour Francis Ford Coppola, Président d’honneur de cette 37e édition venu dénoncer l’approche mercantile de Hollywood. L’auteur d’”Apocalypse now”, Palme d’Or à Cannes en 1979, loue en revanche le Cinéma indépendant. A l’occasion de questions sur le 10e anniversaire du 11 septembre 2001, il a estimé que les films anti guerre étaient aujourd’hui difficiles à faire parce qu’ils magnifient trop cette dernière. La magnifique Shirley Mac Laine a, comme Ford Coppola, félicité le public français, le plus enthousiaste du monde comme la qualité des conférences de presse. Elle a par ailleurs fustigé les prouesses technologiques comme la 3 D et le marketing qui font que le cinéma d’aujourd’hui n’émerveille plus les consciences comme celui d’autrefois. Les codes de la communication d’aujourd’hui semblent émaner d’une volonté de mettre les gens à l’écart les uns des autres. Au cinéma comme dans la vie, il faut faire montre d’imagination. Elle aime à citer Einstein “Le hasard prend le nom de Dieu quand il voyage incognito”. Egalement admirée comme écrivain et personne de grande réflexion sur la philosophie de la vie, Shirley Mac Laine ne se considère pas comme une diva mais s’amuse à voir les autres être diva. Danseuse obligée de ne pas poursuivre à cause de ses obligations familiales dans “le tournant de la vie”, film projeté en son honneur, en partie autobiographique, elle rappelait l’apprentissage des textes de rôles à des mouvements de danse. Une rencontre exquise pour une grande dame à la vie spirituelle riche.

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