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EXPOSITION : Frutopies, le mariage improbable entre un humain et un fruit

Luli Barzman, artiste déjà fortement remarquée début 2012 grâce à son exposition « Tutu dans la Ville », expose, toujours au Centre Culturel de la Providence, « Frutopies et autres passions » jusqu’au 24 mars 2013. Cette artiste dispose avant tout d’un passionnant parcours qui l’a amenée à explorer différents aspects de son art et d’elle-même.

Quelle est l’origine du projet ?

Mon travail photographique met en avant les thèmes qui m’obsèdent.
J’ai quitté Nice en 2000, très triste. « Tutu dans la ville » (ndlr : 1e exposition au Centre Culturel de la Providence début 2012, voir notre article en cliquant ici) et « Frutopies et autres passions » sont nés de cette frustration. Pour moi, c’était un retour à la terre et un rapport différent à l’humain. Ce sont toujours les mêmes thèmes mais leur représentation change au cours du temps.
Frutopies, ça a commencé avec des vidéos. En 2006, j’ai eu un appareil photo et on a déménagé dans le 13e arrondissement de Paris, près de Tang Frères. On avait un énorme terrasse de 40m². C’est là que j’ai commencé à prendre des photos de nus sur la terrasse.
Ce travail a « mûri » depuis 12 ans. Au début, je travaillais sur des corps en noir et blanc, puis sur l’accumulation de fruits et le lancer de radis pour créer du mouvement.

Pimentiara
© Luli Barzman

Vous travaillez avec des modèles non professionnels. Pourquoi ?

Mon travail est politique. Ce que je fais en amont est aussi important que le résultat. Je souhaite un monde différent, où l’on ferait plus confiance aux autres. J’aimerais qu’on soit bien dans son corps. Ma démarche est dans l’échange avec les personnes, et souvent elles veulent revenir !

Vous utilisez des couleurs hyper saturées. Quelle en est la signification ?

Sur mes nouvelles photos je fais exprès de dépasser avec les couleurs. Par exemple, je fais un trait rouge pas réaliste sur une jambe, comme quelque chose qui soudain déteint. Cela signifie pour moi le passage de la nature à la culture.

Joueuse aux 5 pastèques
© Luli Barzman

Vous avez exposé dans une galerie de Liverpool en 2008, année où elle était capitale culturelle européenne. Pouvez-vous nous parler de cette expérience hors du commun ?

J’y ai exposé beaucoup d’œuvres de « Frutopies ». Pour la petite histoire, mon mari scénariste et doubleur, Fabrice Ziolkowski, aime énormément la musique. Il voulait faire un film sur les imitateurs des Beatles. On est allé à Liverpool en repérage pour ce film et on en a profité pour proposer mes œuvres aux galeries. On n’avait qu’une ou deux heures ! La première galerie m’a dit qu’elle ne prenait pas de photo. Mais en ouvrant le book, le galeriste anglais a trouvé cela incontournable et a accepté d’exposer mes photographies.

Cela vous a-t-il ouvert des perspectives européennes ?

Je n’ai pas voulu demander à mon mari de refaire la tournée des galeries, quand il est retourné à Liverpool. Cependant, de son côté, son film a été diffusé à la Cinémathèque de Nice et à l’international.

Tapis fruits
© Luli Barzman

Vous disiez avoir commencé par la vidéo ? Est-ce votre mari qui vous a influencé ?

Mon père était un grand scénariste et c’est moi qui ait influencé mon mari et pas l’inverse ! J’ai notamment fait des films (« Les mille et une vies de Lia Rodriguez ») sur la danse contemporaine diffusés à la Fondation cartier, au Centre Pompidou... Chaque film m’a fait voyager.
Je ne me suis tournée vers la photo qu’en 2006.

Pour cette exposition, vous avez travaillé avec des personnes de la Semeuse. Comment ça s’est passé ?

La professeure de danse Christine Eynard de la Semeuse m’a envoyé des personnes, car elle pensait que ça leur ferait du bien. En pleine canicule, j’ai mis des ailes de figuier à Aline Di Maggio, professeure de théâtre de la Semeuse ! Ce sont de belles aventures…

« En regardant mes images depuis le début, j’ai l’impression d’assister à la mise en lumière des différentes parties de moi. » : que voulez-vous dire ?
J’aime à la fois les choses épurées, baroques et surchargées. Parfois j’aime être complètement fofolle. Tous ces aspects de moi cohabitent. Au début j’étais plus coincée, chaque pixel était exactement en place. Depuis mon retour à Nice, avec la chaleur humaine, je me lâche pas mal : je déborde un peu et recherche des imperfections volontaires.

Leïla arbre
© Luli Barzman

« Mon travail est en train de changer »

Les couleurs étaient sursaturées, éclatantes, à Paris où c’est gris… Je voulais accentuer le contraste entre le corps et les fruits.
En ce moment, je travaille sur des dessins des enfants de la Semeuse (30 enfants !) qui représentent des fossiles ou oiseaux en vol. Je réfléchis beaucoup ces derniers temps à cette vie qui est avant et sous nous, ces traces de cette vie.
Voilà comment je travaille avec eux : je leur montre des fossiles, leur ramène du matériel, leur dis ce que j’aimerais, c’est-à-dire qu’ils soient libres. J’ai envie de les valoriser, en développant leur côté créatif et les incite à dessiner des choses qui ne ressemblent pas forcément au modèle.

Vous êtes donc aussi professeur d’arts plastiques ?

On m’a présentée comme une artiste tout de suite et on leur a dit que ce travail allait être exposé, donc je n’étais pas vue comme une professeure d’arts plastiques. Ce n’était pas un cours, mais une expérience, une aventure. Je voulais sortir de toute compétition, tellement forte dans notre société.

L’étreinte
© Lulil Barzman

« Frutopies et autres passions »
Centre Culturel de la Providence
8 bis rue Saint-Augustin
dans le Vieux Nice
tel : 04 93 80 34 12
de 15:00 À 19:00 du lundi au vendredi
du 5 février au 24 mars 2013

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