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Fin de cet événement Octobre 2017 - Date du 16 juin 2017 au 2 octobre 2017

"Bises de Nice, Moscou et Tokyo", une exposition consacrée à William Klein

Du 16 juin au 2 octobre 2017 au Musée de la Photographie Charles Nègre, la Ville de Nice vous invite à découvrir une exposition consacrée à l’œuvre de William Klein. Évidemment la rédac d’Art Côte d’Azur qui a adoré nombreux de ses films dont "Qui êtes vous Polly Maggo ?" vous invite chaleureusement à vous précipiter découvrir cette exposition ;)

 
Né en 1928 à New York, William Klein mène en France depuis 1947 une carrière de photographe, de peintre et de réalisateur de films. Après des études de sociologie, il est envoyé en Allemagne dans les troupes d’occupation. A l’issue de ce séjour, il choisit de bénéficier d’une bourse d’aide « franco-américaine » pour étudier à la Sorbonne, mais il est plus attiré par la peinture et fera un court séjour dans l’atelier de Fernand Léger avant de se consacrer entièrement à une peinture abstraite géométrique. La photographie l’intéresse et il réalise alors des clichés abstraits.
 

Bikini, Moscou 1959 © William Klein

En 1954, il rencontre Alex Libermann, directeur artistique de l’édition américaine de Vogue qui lui propose un contrat et des moyens financiers pour poursuivre son travail.

Il devient l’un des photographes attitrés de Vogue.

A l’occasion d’un séjour à New York, il réalise un « journal photographique » et en tire un livre, New-York, qui sortira au Seuil en 1956 grâce au soutien de Chris Marker. Son travail photographique novateur suscite des réactions violentes, il contraste violemment avec tout ce qui se fait. Noirs saturés, images décadrées ou bougées sont le propre d’une « action-photography » qui veut entrer dans la modernité, celle du New York Daily News qui tirait à trois millions d’exemplaires, séduisant et inspirant la peinture d’Andy Warhol et de Robert Rauschenberg.
L’année suivante, il obtient le prix Nadar et le livre, quasiment introuvable aujourd’hui, devient un objet de collection. En effet, avec New York, William Klein a initié une véritable rupture avec les images propres, parfaites, autonomes et immédiatement lisibles qu’étaient celles de Cartier Bresson ou de Doisneau. Pour William Klein, la photo doit bousculer, ne prétendre à aucune objectivité documentaire. Le photographe là, peut mettre en scène, interagir avec le sujet. Le regard de la caméra est dans ce sens percutant. William Klein a su imposer un style et un regard instinctif, la réalité est vécue avec subjectivité et montrée comme elle est : parfois dérangeante, parfois violente, toujours fascinante.

Pour cette exposition, conçue spécifiquement pour l’espace du Musée de la Photographie Charles Nègre, trois thèmes ont été retenus

 
Nice, et particulièrement le Carnaval et les batailles de fleurs, une série en couleurs, rarement montrée, réalisée en 1984 lors du centenaire de cette fête emblématique de notre cité ;

Moscou, un livre édité en 1964 (images prises entre 1959 et 1961) dresse un portrait de cette ville et de sa population. « J’avais l’intention de faire un livre sur Moscou, dit-il, et je pensais qu’en tant qu’Américain en pleine guerre froide, j’aurais des problèmes. J’avais tort, je n’ai jamais eu de problème. Les gens n’avaient pas l’habitude de voir quelqu’un avec un appareil photo se baladant parmi eux. » Et le résultat, ce sont ces images d’un monde révolu où la lumière s’insinue brièvement pour souligner les traits séduisants d’un visage entraperçu dans les couloirs d’une gare ou sous les frondaisons d’un parc ;

Cinéposter, Tokyo, 1961 © William Klein

Tokyo 1961, dont les photos furent publiées en 1964. Des images qui sont le reflet de la rencontre de l’artiste avec le désordre urbain, ou la violence des avant-gardes artistiques. Entre tirages noir et blanc grands formats et contacts peints, cette série témoigne de la vision percutante du photographe et de son génie qui l’ont fait reconnaitre comme l’une des figures les plus emblématiques de la scène artistique internationale

Nice, Tokyo et Moscou Texte d’Alain SAYAG – Commissaire de l’exposition

William Klein a 18 ans quand il quitte l’Amérique, envoyé en Allemagne dans les troupes d’occupation. À l’issue de ce séjour, il peut bénéficier d’une bourse d’aide « franco-américaine » pour étudier à la Sorbonne, mais il préfère fréquenter les ateliers et après avoir hésité entre l’école des Beaux-Arts, la Grande Chaumière, l’enseignement d’André Lhote, il opte pour l’atelier de Fernand Léger. Il n’y restera que quelques semaines, préférant pratiquer une peinture abstraite austère, géométrique et sans concession qu’il se plait à transcrire sur la pellicule photographique, créant des formes lumineuses et pures. Tirées en grand format, elles seront montrées au salon des Réalités Nouvelles à Paris, puis dans le cadre de Subjektive Fotografie à Sarrebruck en 1954. Alexandre Liberman, rédacteur en chef de Vogue, est séduit. Croisé à Paris, il lui propose de le faire travailler : « If you ever come to New York, come to see me and you can become, like an art director or something at the magazine, I will give you a way to make a living ». Mais Klein souhaite faire un livre sur New York. De passage dans sa ville natale, il lui rendit visite et Liberman tint parole : « That’sounds interesting, we’ll do a port-folio and foot the bill ». Vogue prit tout en charge : films, papier, labo, agrandissements, mais le port-folio ne fut jamais publié. Qu’un « magazine de mode finançât les moins publiables des photos de l’époque », c’était déjà surprenant, avoue Klein, mais pouvait-on s’attendre à ce qu’il les publie ? Car la photographie que pratique Klein n’a rien à voir avec la photographie niaise et sagement narrative du moment. S’il sort dans la rue, c’est pour bouger, rencontrer des corps, se livrer à une « action-photography » qui doit entrer dans la modernité, celle du New York Daily News qui tirait à trois millions d’exemplaires, affichant des images noires et brutales, celles qui séduisent et inspirent la peinture de Andy Warhol et de Robert Rauschenberg.

II dispose certes d’un appareil, mais il avoue ne pas trop savoir s’en servir. Et cette ignorance, il l’utilise d’une manière exemplaire sans la moindre inhibition. Il arpente les rues « armé d’une arme secrète imparable, la vérité... tout était là dans le viseur... rien de l’éthique du jour, la prétendue objectivité ». II fait sauter tous les tabous qui figeaient la photographie : contraste, bougé, accidents, décadrages... tout lui est bon pour exprimer une subjectivité viscérale.

Le matériel qu’il utilise est minimal, « un Leica d’occasion, deux objectifs (un 50 et un 100 mm) et basta ». Frustré « de ne pas pouvoir attraper plus », il découvre dans une boutique New-yorkaise un objectif grand angle qui lui permet de littéralement saturer le cadre. « Je tirais à bout portant, des plans flous... je voulais tout emmagasiner ». C’est là un moyen radical de lutter contre la photographie littérale et narrative, et d’imposer une esthétique nouvelle. William Klein était peu convaincu (et ne l’est toujours pas) de l’intérêt de la photographie nostalgique et propre, celle des magazines illustrés symbolisée par une exposition comme Family of Man, (MoMA, 1955). En noircissant le trait, en surchargeant le cadre, en déformant le sujet, il impose un style graphique qui n’a aucun antécédent et qui fera date dans la photographie.

Et pour comble d’audace, la sempiternelle mise en page classique : pleine page à droite, blanc à gauche où s’accroche une brève légende, présentation qu’il juge académique, assommante, vole en éclats au profit d’un nouvel objet visuel. « Doubles pages avec vingt images entassées les unes sur les autres dans le style bande dessinée, gauche-droite qui s’entrechoquent, doubles pleines feuilles, parodies de catalogues ». Il traite les images comme un matériau brut, ne laissant au lecteur aucun répit, aucune halte. « No place to park », le regard est sans cesse sollicité et ne peut pas se reposer sur le moindre blanc.

Photographe des foules urbaines, des manifestations de masse, William Klein est ainsi aussi à l’aise dans la foule du Carnaval de Nice que dans les couloirs d’une gare de Moscou ou sur la pelouse de l’ambassade de France à Tokyo, c’est toujours la même manière de créer le désordre pour mieux fixer l’inéluctable chaos de notre époque.

On pourrait s’attarder sur les images prises à Moscou entre 1959 et 1961, images d’un monde révolu ou la lumière s’insinue brièvement pour souligner les traits séduisants d’un visage entraperçu dans les couloirs d’une gare, on pourrait commenter celles faites à Tokyo en 1961 où les courbettes cérémonieuses succèdent aux happenings grimaçants, mais ce sont des images plus rarement montrées qui focaliseront notre attention, celles du Carnaval de Nice. Les rues de Nice explosent de couleurs bariolées, corps et objets s’entremêlent dans un désordre visuel qui occupe tout le champ de l’image. Ce désordre, c’est celui d’une fête populaire partagée par des milliers de corps sans visages. Ces images font de lui un photographe de notre temps, celui d’une sous-culture partagée par tous, qui n’a laissé échapper la beauté des dépliants touristiques que pour nous contraindre à regarder le monde autrement.

Le vernissage de l’exposition aura lieu le jeudi 15 juin 2017 à 19 heures.

Affiche de l’exposition

Artiste(s)

William KLEIN

Né en 1928 à New York, William Klein mène en France depuis 1947 une carrière de photographe, de peintre et de réalisateur de films. Après des études de sociologie, il est envoyé en Allemagne dans les troupes d’occupation. A l’issue de ce séjour, il choisit de bénéficier d’une bourse d’aide « (...)

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