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CRITIQUE LITTERAIRE : Levy et Musso : notre grand test comparatif des lectures de l’été - par Daniel Schwall - Librairie Quartier Latin Nice

Il y a des livres qui se vendent comme des petits pains, mais sans date de péremption. Autant les traiter comme ce qu’ils sont : des produits marketing rivalisant pour des premières places dans le hit-parade des ventes… sans oublier la valorisation de la marque, tellement le nom de l’auteur devient gage de succès.

Ces remarques sarcastiques ne veulent, a priori, pas entamer l’attente de qualité littéraire qu’on peut avoir. De la bonne lecture de plage, passionnante mais lisible, nous sommes nombreux à considérer que nous l’avons mérité. Ceux à qui le quotidien ne donne pas trop l’occasion de lire. Et ceux qui, lecteurs quasi professionnels , s’échappent temporairement de l’obligation au singulier, à l’abscons, à la découverte du jeune auteur qui promet.

Faisons donc le test de ce qu’on nous propose pour cet été. Les deux poids-lourds de l’édition française sortent quasi-simultanément pour les beaux jours.

Premier critère : le produit

Belles couvertures avec un léger avantage esthétique pour Levy : une photo promettant du romantisme et de l’exotique.. où d’ailleurs est photographiée cette femme délicieuse ? on reconnaît… ah mais je ne vais pas vous trahir la fin, n’est-ce pas ? 4/5

La couverture Musso, réussie, mais photomontage plutôt banal. Une jeune femme aussi, en silhouette au-dessus des toits de Paris. 3/5

Second critère : le prix

20,90 pour l’un, 21 pour l’autre, on va dire ex-aequo.

Troisième critère : l’histoire

Ah, ah, on ne nous la fait pas. Levy met très inutilement en scène des personnages anglais, londoniens qui plus est, alors que Paris et Deauville auraient fait l’affaire. Mais voilà ! on vise un marché international. Quand je vous parlais de marketing… Pour ce qui est du scénario du futur film, on s’interroge quand-même sur les personnages secondaires des cent premières pages, qui disparaissent ensuite. Mauvais pitch ! Quant à Musso, il nous sert carrément l’Amérique en continu, avec Paris comme petite étape romantique au passage. Cela sent le film à vedettes à plein nez, encore qu’on puisse imaginer quelques améliorations au scénario. Côté histoire, on nous allèche avec une situation de départ pleine de promesse : deux personnes se percutent dans un aéroport et échangent malencontreusement leurs portables. Situation excitante, même si elle manque un peu d’inventivité. On imagine toutes les ficelles soit d’une délicieuse comédie sentimentale, soit d’un thriller passionnant. Résultat ? Sans rien dévoiler, on est quand même déçu. Rien ici qui vous rendrait cardiaque. Et si on poursuit jusqu’à la fin, c’est quand –même plus parce que la lecture est facile que parce qu’on serait accroché par l’intrigue. Bref, si vous vouliez du thriller, prenez un bon policier, et si vous vouliez de la romance, il y a également mieux à trouver. 2/5

Quant à Levy, il nous entraîne dans un abracadabrant et plus ou moins romantique voyage « aux sources », ou se mèlent une faible intrigue, une promesse d’exotisme passablement délavée et un schema de quête de soi.. bref, une sauce pas très piquante non plus 2/5.

Quatrième critère : le style

Nos deux concurrents, là , sont au coude-à-coude. Malheureusement pas dans l’excellence. Aucun des deux ne se gaspille en création d’ambiance, description des lieux ou autres fadaises pouvant appeler à l’émotion : les situations, manifestement, devront suffire (puisqu’on vous dit que c’est écrit pour faire un film !). La langue, elle aussi ne dépasse pas le niveau de la sixième, autant dire que c’est de lecture pour tous. Il faudrait pointer la grossière erreur de construction du Levy avec sa séquence d’introduction, fastueuse mais sans suite, mais on peut mettre en face les longueurs trop voyantes du Musso. Reste que Musso nous impose quand même des lourdeurs de style dont nous dispense largemen Levy.
3/5 pour Levy, 2/5 pour Musso.

Verdict ? Levy gagne par deux points d’avance, dont un pour la couverture, qui est encore la partie la plus réussie de l’ouvrage.

La sévérité du jugement peut ne pas vous décourager et en lisant ce dont tout le monde parlera sur la plage, vous ne vous déshonorerez certes pas. Et donc, aux hommes, plutot portés sur l’intrigue, on recommandera le Musso, pour les femmes, amatrices d’exotisme (modéré) et de romance, va pour le Levy !

Quant à moi je vais essayer de vous dégotter quelque lecture plus charnue pour les moments estivaux.

Guillaume MUSSO, L’appel de l’ange, roman, XO éditions, 20,90 €

Marc Levy, L’étrange voyage de Monsieur Daldry, roman, Robert Laffont, 21 €

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